Dans le Pacifique, la France veille au respect des sanctions contre Pyongyang

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Par Mathias CENA - A bord d'un Falcon 200 de la Marine française (AFP)
Publié le 08 novembre 2021 - 07:45
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L'équipage de l'avion Falcon 200 Gardian de la Marine française scrute la surface de la mer Jaune, guettant des transferts illicites de marchandises à destination de la Corée du Nord, le 2 novembre 20
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© Quentin TYBERGHIEN / AFP
L'équipage de l'avion Falcon 200 Gardian de la Marine française scrute la surface de la mer Jaune, guettant des transferts illicites de marchandises à destination de la Corée du No
© Quentin TYBERGHIEN / AFP

Les yeux braqués sur le radar et jumelles en main, l'équipage de l'avion Falcon 200 Gardian de la Marine française scrute la surface de la mer Jaune, guettant des transferts illicites de marchandises à destination de la Corée du Nord.

Le détachement de la flottille 25F, arrivé mi-octobre de Polynésie française où elle est basée, assurait jusqu'à vendredi une mission de surveillance depuis la base américaine de Futenma (Okinawa, sud-ouest du Japon) visant à faire respecter les sanctions des Nations unies contre Pyongyang.

"L'ONU nous communique des informations sur les navires soupçonnés de comportements illicites", à partir desquelles est élaboré le plan de vol de chacune des missions, explique à l'AFP Guillaume, commandant du détachement, qui ne peut être identifié que par son prénom.

Pour accomplir leur mission, les six membres d'équipage disposent d'un radar détectant les échos à la surface de l'eau et du système AIS - des signaux radio envoyés par les navires incluant diverses informations comme leur identité et leur route de navigation.

Mais leur meilleur outil reste leurs yeux: deux observateurs sont assis à côté de grands hublots pour scruter la mer avec leurs jumelles et prendre des photographies. "On est les yeux des Nations unies dans la zone de travail", résume Guillaume.

- "Ferme mais courtois" -

Tout à coup, l'équipage se tend: il a repéré un navire à fort tonnage ayant désactivé l'AIS, un comportement généralement suspect.

Les pilotes déroutent l'avion, effectuant deux passages à moins de 500 pieds (150 m) d'altitude pour vérifier le nom du bateau inscrit sur la poupe, tout en le contactant par radio.

Au briefing pré-décollage, Guillaume a insisté sur l'importance d'une "réponse cordiale et professionnelle" lors de ces contacts. "Dans un contexte de tensions internationales dans la zone, le but n'est pas d'envenimer la situation. Il faut être ferme mais courtois".

Un peu plus loin, l'équipage aperçoit deux navires à l'arrêt, coque contre coque: une possible situation de flagrant délit.

Un premier passage à basse altitude renforce les soupçons: des tuyaux de pompage raccordent le plus grand, un pétrolier dont la ligne de flottaison indique qu'il est chargé, à un navire marchand de moindre tonnage.

Ce second navire est "idéal pour faire de la contrebande, mais pourrait aussi simplement servir à ravitailler des pêcheurs", explique un membre d'équipage.

Aucun pavillon n'est visible sur le bateau, qui ne répond pas aux appels radio. Un contact a pu être établi avec le pétrolier, dont la flottille préfère taire la nationalité, mais celui-ci a prétendu ne pas savoir pourquoi un navire était arrimé à sa coque.

L'équipage recueille un maximum d'informations visuelles et techniques à transmettre à l'ONU. Laquelle pourra, si son enquête démontre une infraction à ses résolution 2375 et 2397 adoptées en 2017 à l'encontre de la Corée du Nord, constituer un dossier contre les navires et leurs armateurs.

- "Crédibilité de la France" -

Les forces françaises participent régulièrement depuis 2018 au côté de huit autres pays à ces missions supervisées par l'ECC, la cellule de coordination impliquée dans la mise en application des résolutions onusiennes.

Cela permet d'accroître la visibilité de la France, qui a dévoilé en 2019 une vaste stratégie de défense dans l'Indo-Pacifique, où elle compte avec ses territoires d'outre-mer 1,6 million d'habitants et une zone économique exclusive (ZEE) de 9 millions de km2.

Mais l'action de la France illustre aussi "son intérêt pour la région, en dehors de ses propres priorités dans l'Indo-Pacifique", note Hugo Decis, analyste à l'Institut international d'études stratégiques de Londres.

La zone est éminemment stratégique aussi en raison des ambitions territoriales croissantes de la Chine et des tensions sino-américaines.

Ces missions confirment "la capacité des militaires français à travailler avec leurs partenaires et alliés et contribuent à la crédibilité de la France comme puissance, même secondaire, du Pacifique", estime-t-il.

François Heisbourg, de la Fondation pour la recherche stratégique, évoque "une convergence de logiques" pour la France.

La Corée du Nord, rappelle-t-il, "est engagée dans un processus de prolifération nucléaire, et la France est donc présente aussi en tant que puissance nucléaire qui veille à la pérennité du régime de non-prolifération".

Pour M. Decis, "ces initiatives sont par ailleurs particulièrement appréciées" par les partenaires de la France dans la région, pour lesquels la situation en péninsule de Corée demeure particulièrement préoccupante".

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