Portables en prison : il n'a "jamais été question" de les autoriser, assure la Chancellerie

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Par AFP
Publié le 23 août 2017 - 14:45
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Nicole Belloubet ministre de la Justice à l'Assemblée nationale, le 9 août 2017
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© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives
Nicole Belloubet ministre de la Justice à l'Assemblée nationale, le 9 août 2017
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Nadir a "toujours eu un portable" en prison, pour parler à sa famille, "pour respirer". Le débat sur les téléphones mobiles en prison, interdits mais dont des milliers circulent, a été relancé mercredi après des déclarations de la ministre de la Justice.

"J'appelle tous les jours ma famille, je prends soin de ma mère", explique Nadir, joint par l'AFP sur son téléphone portable. Il purge une peine de quatre ans, bientôt aménageable, et n'envisage pas une seconde ses longues journées sans ces appels familiaux.

Le sujet reste brûlant pour les syndicats de la pénitentiaire, fermement opposés à un assouplissement des règles, tandis que les associations de défense des détenus se réjouissent de voir le débat "relancé".

Dans un entretien diffusé mardi par La Provence, la ministre Nicole Belloubet avait dit qu'il fallait "donner aux détenus des moyens de communication", estimant qu'il n'y avait "rien d'absurde" à envisager la distribution en prison de portables "bridés", comme le demande le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, Adeline Hazan.

Dès le lendemain, le ministère de la Justice a assuré qu'il n'avait "jamais été question" d'autoriser les portables en prison, mais seulement de développer les lignes fixes, suivant l'expérience menée depuis un an à Montmédy (Meuse) où l'augmentation des postes fixes en cellule a fait chuter les saisies de portables.

Au premier semestre 2017, 19.339 téléphones portables et accessoires ont été découverts dans les prisons françaises, qui comptaient au 1er juillet quelque 70.000 personnes, condamnées ou en attente de leur procès.

Légaliser les portables serait "suicidaire", proteste David Calogine, secrétaire général adjoint de l'UFAP-UNSA, syndicat majoritaire chez les surveillants.

Les détenus "ont toujours deux ou trois coups d'avance sur nous. Un téléphone bridé, ça se débride", déclare-t-il à l'AFP, assurant que les portables servent à certains détenus pour "faire leurs petits trafics". Christopher Dorangeville, secrétaire général de la CGT pénitentiaire, considère qu'il "faut améliorer l'accès téléphonique pour les familles, mais pas avec des portables".

- "Grande hypocrisie" -

Au contraire, pour François Bes, de l'Observatoire international des prisons (OIP), "l'usage du portable devrait être généralisé". Il rappelle que "l'immense majorité des détenus ne s'en sert que pour garder un lien familial", aidant à la fois à la réinsertion et à la prévention du suicide.

Le téléphone fixe n'est pas adapté, explique-t-il: "Les cabines sont en général accessibles aux horaires des promenades, de 9 à 11H00 et de 14 à 16H00, quand les enfants sont à l'école et les conjoints au travail. Les appels coûtent entre 80 centimes et un euro la minute, ce qui fait près de 15 euros le quart d'heure en métropole mais peut être beaucoup plus cher pour l'outre-mer".

"Le téléphone, ça maintient les liens familiaux, un point c'est tout. J'ai le même numéro depuis quinze ans, on n'a rien à cacher, mais je veux pouvoir parler à mon mari", raconte à l'AFP Naïma, dont l'époux purge une peine de 10 ans pour braquage.

"Il peut voir des photos des enfants, on s'appelle sur WhatsApp. Parfois on essaie de manger à la même heure, on met le téléphone sur la table. Pour mes enfants, leur père a un visage et une voix", poursuit cette mère de trois enfants. "Mon mari purge sa peine, mais nous, on n'a pas à être punis."

Pour Hakim, père d'un détenu condamné pour détention de téléphone portable, "il y a une grande hypocrisie autour du téléphone: c'est interdit mais tout le monde sait que ça circule, cela fait baisser la tension et cela permet des écoutes".

Nadir, qui purge une peine pour recel de vol, a expliqué à l'AFP qu'avec un peu d'argent, il était "assez simple" de se procurer un téléphone: "Il y a ceux à 150 euros qui ne bipent pas au parloir, ceux à 29 euros qui sonnent au détecteur. Ils entrent par le parloir mais aussi par des surveillants".

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