1 million de jeux pour les enfants réfugiés : la belle initiative d'une petite entreprise de Montpellier


Tout part de la volonté d'un homme. Jean-Thierry Winstel, patron de Bioviva, une petite PME montpelliéraine spécialisée dans les jeux de société, voulait aider a son niveau ces millions de gamins réfugiés dont les images hantent les JT. Mais comment? L'idée lui est venue une nuit, raconte-t-il à France-Soir en rendant à ces gosses une partie de leur enfance, volée par la violence des adultes, grâce à son métier. L'entrepreneur se lance donc un défi, celui d'arriver à fabriquer et distribuer un million de jeux aux enfants réfugiés.
Futile? Pas selon l'entrepreneur qui se base sur la pyramide de Maslow (lien). "Dans les camps, la base de la pyramide, les besoins physiologiques et de sécurité, sont au cœur des préoccupations. Mais quid des autres étages? Des besoins d'accomplissement, d'estime et de s'accomplir?", explique-t-il avec son léger accent montpelliérain. Or c'est justement l'objectif des jeux que développe sa société, contribuer à l'épanouissement des enfants et leur socialisation via des activités de groupe.
Sauf que sa PME, spécialisée dans les jeux de société éco-responsables éducatifs et de sensibilisation à la nature, n'a aucune expérience en matière d'humanitaire. Et, bien que florissante, ne dispose pas du budget colossal que demande une telle opération.
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Jean-Thierry Winstel décroche son téléphone. Première étape, appeler l'imprimeur avec qui il travaille depuis des années pour lui proposer l'idée. Banco! Graphot, c'est le nom de la société, le suit. Le projet prend corps. Grâce la gouaille et la détermination communicatives de Jean-Thierry Winstel, très vite un groupe d'entreprises et de volontaires se forme.
Outre Graphot, le papetier Arjowiggins Creative Papers, les agences de communication Kaliop et Entre nous soit dit, le spécialiste des annuaires de sociétés Kompass, les ingénieurs informatiques d'Ip Stream et de Solutrek, les spécialistes de la lutte contre le gaspillage alimentaire Excellents Excédents forment le noyau dur de la mobilisation. Tous travaillent bénévolement ou à prix coûtant. Des ONG rejoignent aussi l'aventure pour distribuer les jeux sur place, là où la demande se fait sentir, même si quelques petites structures françaises participent aussi, à Calais ou Ivry notamment. "Nous avons aussi contacté l'Unicef. +Super projet!+, nous ont-ils répondu... Mais ne comptez pas sur nous tout de suite car la décision prendra des mois", raconte Jean-Thierry Winstel.
Car l'entrepreneur veut aller vite. Sa nuit d'insomnie date seulement d'avant l'été mais, en quelques mois, il a déjà réussi à envoyer les premiers jeux.
Ceux-ci sont édités en arabe, la langue parlée par l'écrasante majorité des enfants réfugiés. "La langue ce n'est pas la question!" réplique-t-il, interrogé à ce sujet. "Il faudrait les faire en quelle langue? En français? Mais il n'y a pas de réfugiés français!". Puis de préciser que la moitié des produits n'ont pas de texte mais des pictogrammes, pour leur caractère universel. Sans compter que les enfants des camps (les publics visés sont les 4-7 ans et 8-12 ans) n'ont que très peu accès à l'instruction.
Grâce à toutes les bonnes volontés et à force de tirer les prix, les acteurs du projet "Bioviva For Life" (lien vers le site dédié) parviennent à produire des jeux pour 0,50 euros pièce. Sortir un million d'unité reviendra donc à 500.000 euros. Un record pour des produits de qualité. Mais une somme tout de même colossale pour l'attelage de volontaires engagés dans l'initiative.
L'étape suivante sera donc celle de la mobilisation. Du public, bien sûr, mais aussi et surtout des entreprises pour l'équipe, qui n'a pas la force de frappe médiatique d'Omar Sy et sa "Love Army for Rohingya". Grâce à l'opération lancée ce jeudi 14, Bioviva For Life veut toucher un large public. Car bien que lancée depuis plusieurs semaines, l'initiative peine a franchir les limites du Sud-Ouest et les cercles de bénévoles engagés. "Nous espérons arriver à lever 50.000 euros avant la fin de l'année. C'est 100.000 jeux. Mais après Noël commencera le plus dur: trouver les 450.000 euros restants", confie celui qui veut rester confiant, même si "maintenant qu'il faut agir, certaines entreprises qui étaient volontaires au début se font désirer...".
Un million de jeux, pour plusieurs millions de gamins qui en bénéficieraient, serait plus qu'un symbole. Une première étape? "Peut-être", sourit l'entrepreneur, conscient de la tâche qui lui reste à accomplir. "Mais nous réfléchissons aussi à pérenniser le processus. Par exemple en reversant 1 euro pour tout jeu acheté? Ou en lançant une gamme de jeux dédiés à la paix? Il est trop tôt pour le dire, mais ce sera un projet pour 2018".
Comment participer au projet Bioviva For Life?
- pour les particuliers, une cagnotte en ligne est disponible en cliquant sur ce lien: HelloAsso Bioviva For Life (les dons par chèque envoyé par courrier sont aussi acceptés)
- pour les entreprises: formulaire de contact dédié
- en diffusant sur les réseaux sociaux le hashtag dédié: #Games4Refugees
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