Au son du glas, les évêques font "mémoire" aux victimes de pédocriminalité et se repentent

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Par AFP - Lourdes
Publié le 06 novembre 2021 - 18:03
Mis à jour le 07 novembre 2021 - 14:32
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L'archevêque de Reims, Mgr Eric de Moulins-Beaufort, lors d'une prière de pénitence à la mémoire des victimes de pédocriminalité le 6 novembre 2021 à Lourdes
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© Valentine CHAPUIS / AFP
L'archevêque de Reims, Mgr Eric de Moulins-Beaufort, lors d'une prière de pénitence à la mémoire des victimes de pédocriminalité le 6 novembre 2021 à Lourdes
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Les évêques catholiques, des responsables de congrégations religieuses et des fidèles ont "fait mémoire" et pénitence samedi à Lourdes pour les victimes de pédocriminalité dans l'Eglise, soutenues par des collectifs, dans le sanctuaire, mais aussi à Paris.

Après avoir reconnu vendredi sa responsabilité dans les crimes sexuels sur mineurs et leur dimension "systémique" ces soixante-dix dernières années, l'épiscopat, réuni en assemblée plénière depuis mardi, a accompli "deux gestes" symboliques.

Un geste mémoriel d'abord: une photo, prise dans une église par une victime, montrant une sculpture représentant une tête d'enfant pleurant, a été dévoilée. Scellée au mur de l'hémicycle dans lequel se réunit l'épiscopat, elle préfigure la construction d'un "lieu de mémoire", décidée en mars par les évêques, mais dont les modalités restent à définir.

"Nous voulons marquer ce lieu de Lourdes pour un premier témoignage visuel qui fera mémoire de tant de violences, de drames et d'agressions", a affirmé Hugues de Woillemont, le porte-parole de la Conférence des évêques de France (CEF).

Véronique Margron, présidente de la Corref (ordres religieux), a souligné le "malheur" et l"'effondrement" qui ont "fait intrusion dans des existences qui ne demandaient qu’à grandir, vivre, faire confiance".

Second geste: les 120 évêques, qui n'étaient pas vêtus de leurs habits liturgiques à la demande des victimes, les religieux, des prêtres et laïcs ont ensuite participé à une prière de pénitence et demandé, après le tintement lent du glas, pardon à Dieu" sur l'esplanade de la basilique Notre-Dame du Rosaire.

"Relève les personnes qui souffrent, nous t'en supplions à genoux. Donne-nous de les écouter et de faire ce qu'elles nous demandent", a imploré Eric de Moulins-Beaufort, président de la CEF.

- "Du pipeau" -

"J'ai vécu ces moments avec beaucoup d'émotion", a déclaré une victime, Véronique Garnier, qui participe régulièrement aux travaux de la CEF. Il était important de "nous rendre justice".

Au contraire, une personne se présentant comme la victime, enfant, d'un prêtre de la congrégation des pères de Bétharram, implantée près de Lourdes, a lui, crié sa "colère".

"La repentance, c'est pipeau", a dénoncé Jean-Marie Delbos, 75 ans. Il a réclamé devant la presse, que son prédateur, "revenu dans sa communauté, soit sanctionné et défroqué".

Samedi après-midi, une vingtaine de fidèles, rubans violets attachés au bras ou autour du cou, se sont rassemblés derrière une banderole réclamant "les 4 R", à l'appel du collectif d'associations "De la parole aux actes". "R" comme "reconnaissance", "responsabilité", "réparation" et "réforme".

Anne Reboux, 64 ans, se présentant comme une "laïque de base" du diocèse de Toulouse, témoigne: "on a notre rôle à jouer: plus les laïcs s'investiront" dans la vie de l'Eglise, "moins il y aura la tentation, pour la hiérarchie, d'abuser de son pouvoir".

A Paris, quelques dizaines de personnes se sont aussi rassemblées devant le siège de la CEF.

"Ça faisait longtemps que j'avais envie que les victimes se montrent dans la rue, qu'on montre (...) la souffrance qu'on a eue, la détermination qu'on a à être +réparé+", a déclaré à l'AFP-TV Jean-Luc Hery, victime.

"On espère, par notre présence (...) être pris en compte dans l'élaboration du plan d'action et du calendrier qu'il va falloir mettre en place pour trouver les indemnisations", a renchéri Yolande Fayet de la Tour, membre du collectif organisateur. "Oui, on attend un peu comme le messie d'avoir des engagements de la part des évêques".

Des décisions fortes, notamment sur la réparation des victimes, y compris dans sa dimension financière, sont attendues lundi, lors de la clôture des travaux de la CEF.

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise, a estimé à 330.000 les personnes de plus de 18 ans ayant fait l'objet de violences sexuelles en France depuis 1950, quand elles étaient mineures, de la part de clercs (prêtres ou diacres), religieux ou personnes en lien avec l'Eglise (surveillants d'internats, responsables de mouvements de jeunesse etc).

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