Pédocriminalité dans l'église : création d'une commission de réparation

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Par Karine PERRET - Paris (AFP)
Publié le 19 novembre 2021 - 11:41
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Marie Derain de Vaucresson, présidente de l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, le 15 novembre 2021 à Paris
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© JOEL SAGET / AFP/Archives
Marie Derain de Vaucresson, présidente de l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, le 15 novembre 2021 à Paris
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Dix jours après les évêques, les responsables des congrégations religieuses ont pris à Lourdes des mesures à destination des victimes de pédocriminalité, avec la création d'une Commission indépendante de reconnaissance et de réparation (Cirr).

Cette instance a été votée à "l'unanimité" des quelque 300 majeurs supérieurs (responsables) de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref) réunis en assemblée générale à Lourdes, selon sa présidente Véronique Margron.

Elle est présidée par l'ancien magistrat Antoine Garapon, 69 ans, membre de la Commission de Jean-Marc Sauvé sur la pédocriminalité dans l’Église (Ciase) catholique depuis les années 1950, qui a auditionné de nombreuses victimes.

La Cirr aura pour mission première de reconnaître la parole de la victime, de la "prendre au sérieux", a expliqué sœur Margron lors d'une conférence de presse à l'issue de l'assemblée générale.

"A partir de là, selon le souhait de la victime, la commission fera médiation -soit elle même, soit via d'autres médiateurs- avec l'institut religieux concerné", dont est issu l'agresseur de la victime, pour une éventuelle indemnisation financière.

"La réparation ne sera pas d'abord financière", a précisé Antoine Garapon. "Les victimes demandent beaucoup de choses différentes: d'avoir des informations, d'avoir des excuses, des éclaircissements, d'être entendues et parfois d'avoir des indemnisations."

Il a assuré que sa commission pourrait assurer "une prise en charge" des victimes "à partir du 1er janvier 2022", le temps de "faire quelques réglages en terme de capacité d'accueil" notamment.

L'instance comprendra des "juristes spécialistes de la justice +restaurative+, de psychologues, des psychiatres, des praticiens de la médiation, des historiens", mais pas de victimes, ni de religieux.

Pourront s'y adresser les victimes de faits prescrits, mais aussi celles pour lesquelles une procédure pénale ou civile est en cours. "C'est techniquement envisageable", a dit M. Garapon.

Il s'agit d'une structure distincte de l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr), annoncée le 8 novembre par les évêques de France.

Selon Véronique Margron, l'idée est qu'il y ait un "portail de l’Église de France qui permette d'accéder aux deux commissions", l'Inirr, présidée par la juriste Marie Derain de Vaucresson et la Cirr dirigée par M. Garapon.

- "égalité de traitement" -

Les deux commissions travailleront ensemble", "l'horizon final étant de garantir une égalité de traitement des victimes", a précisé ce dernier.

La Cirr sera aussi chargée de rendre un rapport annuel sur le nombre d'affaires traitées, les premiers constats, etc. Deux adresses internet (contact@crr.contact et victimes@crr.contact) sont mises en place et un site (www.reconnaissancereparation.org) sera bientôt opérationnel.

Les quelque 300 responsables de la Corref, qui représente environ 30.000 moines, moniales, frères et sœurs de l’Église (soit 450 instituts ou congrégations), ont aussi voté la création d'un fonds subsidiaire de dotation "pour le moment alimenté à hauteur de 500.000 euros".

Il servira lorsque l'institut religieux n'existe plus ou lorsqu'il est notoirement insolvable, a précisé sœur Margron.

Le fonctionnement (bureaux, secrétariat, etc.) de la Commission sera "assumé par les congrégations féminines". "C'est notre façon de rendre compte de notre responsabilité", a-t-elle souligné. Le fonds de dotation sera lui "surtout alimenté par les instituts masculins, qui paieront une cotisation par nombre de religieux en France".

En outre, plusieurs chantiers ont été mis en place: sur la "gouvernance" dans les instituts, sur "l'accueil" des candidats à la vie religieuse et "leur accompagnement", "le suivi des auteurs" de violences, ou encore sur "les charismes spirituels" dans les communautés.

Ces décisions montrent que le "fruit est mûr", s'est félicitée Véronique Margron, réélue jeudi pour un nouveau mandat de quatre ans à la tête de la Corref. Très impliquée dans l'écoute des victimes, la dominicaine plaidait depuis plusieurs mois pour mettre en place une démarche de justice réparatrice en plusieurs étapes, comportant la reconnaissance, avant la dimension de réparation financière.

En avril, la Corref avait reconnu "la responsabilité collégiale et spirituelle de l'ensemble de la vie religieuse" dans les violences sexuelles.

Publié début octobre, le rapport de la Ciase a estimé à 330.000 le nombre de personnes de plus de 18 ans ayant fait l'objet de violences sexuelles depuis 1950, quand elles étaient mineures, de la part de clercs, religieux ou personnes en lien avec l’Église.

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