"C'est une spoliation !" : des milliers d'avocats dans la rue contre la réforme de leur retraite

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Par Caroline TAIX - Paris (AFP)
Publié le 16 septembre 2019 - 20:08
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Plusieurs milliers d'avocats dans la rue à Paris pour protester contre la réforme des retraites le 16 septembre 2019
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© Thomas SAMSON / AFP
Plusieurs milliers d'avocats dans la rue à Paris pour protester contre la réforme des retraites le 16 septembre 2019
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Des milliers de robes noires dans la rue: les avocats, stars du barreau comme jeunes venus de toute la France, ont manifesté en nombre lundi à Paris pour défendre leur régime de retraite et plus largement, leur profession.

Sur les marches de l'Opéra Garnier, des avocats brandissent la banderole de leur barreau: ils sont venus en bus ou en train de Caen, Saint-Nazaire, Marseille, Agen... "Plus de cotisation, moins de pension#objection", lit-on. Ou encore: "retraite plus chère = justice précaire".

"Mes chers confrères, nous n'avons jamais été aussi nombreux. Nous n'avons jamais été aussi unis et rassemblés!", proclame au haut-parleur Christiane Féral-Schuhl, la présidente du Conseil national des barreaux (CNB), qui représente les quelque 70.000 avocats français.

Devant l'Opéra, les ténors Thierry Herzog et Francis Szpiner parlent des menaces qui pèsent sur le métier. "On se mobilise pour la profession et pour les générations futures", déclare le premier, qui souligne que "beaucoup sont déjà dans la précarité dans cette profession".

Comme un leitmotiv, dans le cortège on entend: "Nous ne sommes pas la RATP ou la SNCF. Nous ne sommes pas un régime spécial mais un régime autonome, avec une caisse qui s'auto-finance".

"On s'administre tout seul. On ne touche pas un euro d'argent public. On demande une chose: qu'on nous laisse tranquille!", s'exclame Me Szpiner.

Les avocats redoutent une forte augmentation des cotisations (un doublement de 14 à 28% pour ceux gagnant moins de 40.000 euros par an) avec la réforme. Les charges pourraient atteindre 60% des revenus.

Selon un calcul du CNB, un avocat qui déclare 24.000 euros par an cotise actuellement à hauteur de 3.744 euros par an, pour une retraite de 20.690 euros par an (1.724 euros par mois). Après la réforme, pour cet avocat, la cotisation s'élèverait à 6.748 euros par an mais sa retraite serait de 14.021 euros par an (1.168 euros par mois).

"Notre régime actuel est bien géré, il est excédentaire", vantent des avocats trentenaires des barreaux de Paris, Strasbourg et Lyon. "Et surtout, c'est un système solidaire, où les avocats perçoivent au minimum 1.450 euros par mois à la retraite, quelque soit leur revenu". Après la réforme, "on pourrait tomber à moins de 1.000 euros par mois, tout en cotisant plus", dénoncent-ils.

- Fortes disparités -

"C'est une spoliation, une mise sur la paille des petits cabinets!", s'emporte une avocate parisienne, Linda Teghbit, qui travaille à son compte.

"La réforme pourrait entraîner la fermeture de cabinets. (...) Qui va assurer l'aide juridictionnelle et les commissions d'office? Pas les gros cabinets. On va être contraint d'augmenter les tarifs, on ne pourra plus embaucher de secrétaire", s'inquiète Hélène Thirion, bâtonnière à Melun.

"C'est dans la lignée de la réforme de la justice (qui a été adoptée au printemps, ndlr) qui crée une justice à deux vitesses", critique cette avocate.

Bernadette Llados, venue de Béziers, manifestait déjà l'an dernier contre cette réforme: "Nous avons peur d'un transfert de compétence vers Montpellier. La réforme des retraites alimente encore nos craintes", explique-t-elle.

Actuellement, les avocats partent en moyenne à la retraite à 65 ans, le revenu médian est d'environ 44.000 euros, "en décroissance depuis plusieurs années" et avec de fortes disparités, selon le rapport Haéri de février 2017.

"En province c'est compliqué. On est loin de l'image de l'avocat fortuné", déplore Cathy Beauchart, avocate à Cambrai (Nord). "Beaucoup d'avocats débutants vivent en dessous du SMIC", renchérit sa consoeur Catherine Goussot.

La manifestation à Paris a été doublée d'une grève des audiences dans de nombreux barreaux. A Rennes, c'était une journée "justice morte" avec demande de renvoi de toutes les audiences. A Ajaccio et Bastia, aucune "désignation ou commission d'office par le bâtonnier" n'a eu lieu.

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