De retour à l'Assemblée, la privatisation d'ADP cristallise les critiques

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Par Pierre ROCHICCIOLI - Paris (AFP)
Publié le 13 mars 2019 - 17:08
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Vue de l'aéroport Charles de Gaulle à Roissy, le 18 février 2019
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© ERIC PIERMONT / AFP/Archives
Un avion décolle de l'aéroport de Roissy, le 18 février 2019
© ERIC PIERMONT / AFP/Archives

Pomme de discorde du projet de loi Pacte, de retour mercredi à l'Assemblée, la privatisation d'Aéroports de Paris, combattue par les oppositions, est farouchement défendue par le gouvernement qui assure avoir posé des garde-fous pour encadrer vente, exploitation et missions régaliennes.

"Le rôle de l'Etat dans l'économie doit être redéfini en profondeur", a proclamé le ministre de l'Economie Bruno Le Maire à l'ouverture des débats.

"Il a le mauvais rôle lorsqu'il exerce des activités commerciales en lieu et place d'un entrepreneur privé, il a le bon rôle lorsqu'il fait respecter l'ordre public économique, gère des services publics ou protège contre des investissements agressifs qui menace notre souveraineté", a-t-il avancé, inscrivant la privatisation d'ADP "dans cette nouvelle doctrine".

Depuis la première lecture du projet de loi Pacte en octobre, le projet de privatisation d'ADP est devenu, après son rejet au Sénat, la principale pierre d'achoppement.

Aéroports de Paris bénéficie d'un droit d'exploitation exclusif des aéroports de Paris-Charles-de-Gaulle, Paris-Orly, Paris-Le Bourget, ainsi que de dix aérodromes en Ile-de-France.

Le projet de loi entend supprimer l'obligation pour l'État de détenir la majorité du capital d'ADP (actuellement 50,63%, pour un montant évalué à 9,5 milliards d'euros) ouvrant ainsi la voie à sa privatisation. Les conditions de cession - totale ou partielle - ne sont pas encore connues.

- "Joyaux de la couronne" -

"Il est utile de libérer du capital public, d'accroître le contrôle de l'Etat sur la régulation de l'infrastructure, pour financer (...) l'innovation de rupture", a lancé le Premier ministre Edouard Philippe mercredi.

Les privatisations d'ADP et aussi de la Française des jeux, prévue par le texte, doivent servir à alimenter un fonds pour les nouvelles technologies.

Pour les oppositions de droite et de gauche, qui ont défendu mercredi des motions de rejet de la loi qui ont été retoquées, la vente d'ADP représente "un choix stupide", "une vision court-termiste" et "un projet dogmatique et déraisonnable économiquement".

"C'est une mauvaise décision qui prive notre pays d'importantes rentrées financières", a dénoncé Ian Boucard (LR), sa collègue Véronique Louwagie précisant que l'Etat a empoché près d'un milliard d'euros de dividendes entre 2016 et 2020.

"Vous bradez des joyaux nationaux au profit d'investisseurs privés. Votre logique est celle d'un libéralisme du XIXe siècle", a dénoncé Régis Juanico (apparenté PS), Stéphane Peu (PCF) parlant d'un "contre-sens historique".

Dans une longue intervention, Jean-Luc Mélenchon (LFI) a présenté cette privatisation comme un "choix idéologique", reprochant au gouvernement de penser que "la loi du marché produit les meilleures décisions possibles".

250 élus PS avaient "solennellement" appelé dimanche la majorité à renoncer à son projet ou, à défaut, à le soumettre au grand débat national.

Accusant l'Etat de vouloir "tuer la poule aux oeufs d'or", à l'image de la privatisation des autoroutes devenues source de profits pour des multinationales, les opposants s'inquiètent aussi pour les missions régaliennes (frontières, douane, sécurité).

"Idées fausses", "fantasmes, "amalgames faciles", a balayé le président de l'Assemblée Richard Ferrand (LREM): "Il ne s'agit pas d'une privatisation mais d'une concession de 70 ans" et "le contrôle des frontières restera une compétence de l'Etat".

Bruno Le Maire s'est dit prêt à "renforc(er) encore les protections". L'Etat ne cédera pas de parts "à un autre Etat", a-t-il assuré.

"Il gardera le dernier mot sur les tarifs aéroportuaires" et au terme de la concession, récupérera "l'intégralité du foncier et des infrastructures", a aussi rappelé le ministre, qui va en outre chercher "un moyen de garantir" le service des lignes régionales.

Il a promis de présenter le cahier des charges imposé aux futurs actionnaires. Un texte qui prendra aussi "en compte la qualité de service aux passagers et la gouvernance qui devra être validé par l'Etat", a souligné le rapporteur général Roland Lescure.

Les députés LREM, a-t-il ajouté, vont "profiter de la loi pour améliorer la protection des riverains: plafond dans les créneaux de décollage et d'atterrissage et couvre-feu à Orly, fonds d'indemnisation pour les travaux d'isolation à Roissy".

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