Education : comment revaloriser une voie professionnelle mal aimée ?

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Par Isabelle TOURNÉ - Paris (AFP)
Publié le 21 février 2018 - 12:27
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Une classe vide de l'université de Mont-Saint-Aignan, près de Rouen, le 11 octobre 2017
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© CHARLY TRIBALLEAU / AFP/Archives
Un rapport va proposer des mesures pour la revalorisation de l'enseignement professionnel, voeu pieux des gouvernements depuis des années
© CHARLY TRIBALLEAU / AFP/Archives

Mal connu, mal aimé, l'enseignement professionnel est pourtant une voie centrale dans le système éducatif. Un rapport publié jeudi va proposer des mesures pour sa revalorisation, voeu pieux des gouvernements depuis des années.

En novembre, le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer avait mandaté la députée LRM Céline Calvez et le chef étoilé Régis Marcon pour une mission consacrée à la transformation de la voie professionnelle.

Le constat: cette voie "souffre d'un manque de lisibilité des diplômes, d'une adéquation imparfaite entre les formations proposées et les attentes du monde économique et d'une articulation trop limitée avec l'apprentissage".

Co-secrétaire générale du Snuep-FSU, premier syndicat dans l'enseignement professionnel, Sigrid Gérardin le dit plus brutalement: "la voie professionnelle est considérée depuis plus de 20 ans comme une voie de relégation, avec des élèves qui y sont affectés par défaut".

Objectif de la mission: la rendre "plus efficace", "plus attractive" et "plus ouverte", grâce à des partenariats avec d'autres pays.

"L'idée n'est pas de proposer de petites adaptations mais une vraie transformation de la filière", a expliqué à l'AFP Céline Calvez.

Les conclusions de la mission devront s'articuler avec d'autres réformes déjà annoncées, comme celle du bac et du lycée, et celle de l'apprentissage, ce qui fait craindre à des syndicats "une mise en concurrence de la voie professionnelle avec l'apprentissage".

Quelle différence entre les deux systèmes? Un apprenti (forcément âgé de 16 ans au moins) est sous statut de salarié et dépend du Code du travail. Les jeunes en voie pro sont, eux, sous statut d'élèves.

Quelque 700.000 élèves suivent actuellement un parcours scolaire menant à un CAP ou un bac professionnel, qui représente près de 30% des candidats au bac chaque année.

Ce bac a été créé en 1985 avec une double finalité: permettre une insertion professionnelle et la possibilité de poursuivre des études. Depuis 2008, les candidats au bac pro préparent leur diplôme sur trois ans, comme les élèves en lycée général, et non plus quatre.

- Inégalités sociales -

Or, les bacs pro restent très marqués socialement, puisque 12% seulement des enfants de cadres sont dans l'enseignement professionnel, contre 60% des enfants d'ouvriers.

L'insertion professionnelle après ce diplôme reste peu satisfaisante: 46% des bacheliers pro sont au chômage sept mois plus tard et toujours 20% trois ans après. "La France fait ainsi partie des pays de l'OCDE qui insèrent le moins bien les jeunes issus de l'enseignement professionnel", relevait en 2016 le conseil d'évaluation du système scolaire (Cnesco).

Et si certaines filières s'en tirent bien (énergie, agriculture, restauration, etc.), d'autres comme la vente ou les services à la personne affichent des taux de chômage de 30% trois ans après l'obtention du bac si l'élève n'a pas poursuivi en BTS.

"Aujourd'hui, la voie professionnelle n'est pas du tout lisible" pour les familles, souligne aussi Michel Lugnier, inspecteur général de l'Éducation nationale, qui a participé à la mission.

Quelque 200 CAP et 80 baccalauréats professionnels coexistent. "Pour autant, on assiste à une extrême concentration sur quelques formations, et de manière très +genrée+: les filles dans les services, les garçons dans la production", poursuit-il.

Selon Sigrid Gérardin, du Snuep-FSU, il faudrait "pouvoir réintroduire des parcours en quatre ans pour les élèves les plus en difficulté, dédoubler les effectifs dans toutes les classes de seconde pour redonner les moyens aux profs de bien enseigner, et surtout revoir les contenus de pas mal de diplômes".

Jean-Michel Blanquer a récemment esquissé une autre ambition: "nous voulons un enseignement professionnel qui fasse envie", "des Harvard du pro", du nom de la prestigieuse université américaine. Avec des campus réunissant lycées professionnels, centres d'apprentissage, branches professionnelles et universités.

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