Thibault Dijols, un éleveur des hauts plateaux en transhumance à Paris

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Par Isabel MALSANG - Paris (AFP)
Publié le 20 février 2018 - 10:39
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Thibaut Dijols, éleveur de vaches dans l'Aubrac à Curières, près de Rodez le 17 novembre 2017
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© PASCAL PAVANI / AFP/Archives
Thibaut Dijols, éleveur de vaches dans l'Aubrac à Curières, près de Rodez le 17 novembre 2017
© PASCAL PAVANI / AFP/Archives

D'ordinaire, Thibault Dijols préfère les hauts plateaux de l'Aubrac balayés par les vents. Mais l'éleveur fait une exception pour accompagner jeudi à Paris la transhumance de sa vache, prénommée "Haute", égérie 2018 du salon de l'Agriculture.

La photo de la placide ruminante - maquillage smoky, robe blond froment et cornes en lyre - voluptueusement couchée sur une prairie infinie, a envahi les couloirs du métro sur les affiches de promotion de la plus grande ferme de France, qui ouvre ses portes samedi.

"J'ai déjà participé au salon en 2008 et en 2010, mais avoir une vache de son troupeau sélectionnée pour en être l'égérie, c'est un vrai bonheur" dit M. Dijols, grand athlète de 32 ans, agriculteur et footballeur amateur.

Levé à six heures chaque jour, il élève 130 vaches de race Aubrac, avec sa mère et son épouse Florence, sur 190 hectares de paturages, à Curières, une commune de 200 habitants près de Laguiole dans l'Aveyron.

Ce fils et petit-fils d'éleveur et sélectionneur produit ce que l'élevage français a de plus beau à offrir, des bêtes nourries à l'herbe sur les vastes plateaux du Massif Central. Avec transhumance obligatoire en altitude de la fin mai à la mi-octobre.

Cet hiver, le plateau a eu "beaucoup de neige". Endurantes et adaptables, les vaches sont "au chaud jusqu'au printemps" dit le jeune homme, happé depuis deux mois par les préparatifs du salon.

Il avoue sa "surprise" d'avoir été sollicité par de nombreux journalistes pour visiter son exploitation malgré le froid et la neige, dont beaucoup venus de Paris.

"Ce n'est pas évident, en pleine saison des vêlages, nous devons surveiller chaque mise-bas, c'est notre gagne-pain, et on a déjà eu 95 veaux cet hiver, ça fait du travail, heureusement je suis bien aidé" dit-il. "Mais ça me touche de voir autant d'attention sur l'agriculture".

M. Dijols ne fait pas partie des centaines de jeunes exploitants conviés jeudi à l'Elysée. "On ne m'a pas prévenu" dit-il à l'AFP. Mais il s'en fiche. "Toute ma famille viendra autour de Haute, c'est ce qui compte".

"Mes parents ont patiemment sélectionné et créé le troupeau et m'ont transmis un bon cheptel génétique". Ce qui lui a permis d'amortir la crise qui a frappé nombre d'autres éleveurs.

Installé depuis 2009, il échappe au redécoupage vivement contesté des zones défavorisées qui épargne les régions de montagne comme la sienne.

"Les aides que nous percevons nous permettent de vivre, même si je préférerais m'en passer bien sûr", dit-il. Si le consommateur devait acheter la viande de qualité qu'il produit à son prix de revient réel (sans aides), "peu de gens pourraient s'en offrir" juge-t-il.

- Travail "avec le vivant et avec la terre" -

Car sa vache "Haute", est une pure sang Aubrac, comme le reste du troupeau. L'aristocratie du plateau. Ses veaux produisent de la viande Label rouge.

Jeudi matin, toutes les bêtes du secteur qui partent pour Paris, dont Haute, seront regroupées sur la grand place de Laguiole. "C'est la tradition, ceux qui ne viennent pas à Paris peuvent venir les voir," explique M. Dijols.

Au milieu de la place, trône depuis 70 ans une statue de taureau en bronze. Symbole de ce terroir. "Notre Tour Eiffel à nous" dit l'éleveur.

Il avoue volontiers ne pas être "à la mode d'aujourd'hui, le circuit-court", la vente directe. "Je vends mes bêtes au boucher et je lui achète ensuite la viande".

"Si j'habitais plus près d'une grande ville, je m'y mettrais, mais nous sommes trop loin des lieux de consommation", estime-t-il. A chacun son métier. Et puis, c'est un boucher qui s'est démené pour faire reconnaître la qualité du boeuf fermier Aubrac label rouge.

Sur son métier, il est intarissable. "Nous travaillons avec le vivant, et avec la terre, c'est unique" dit-il.

"Si le plateau de l'Aubrac est si beau, c'est parce qu'il est paturé, et notre sol, c'est le patrimoine qu'on nous a transmis, avec l'herbe, les chemins, les haies qu'on entretient, j'espère le transmettre à d'autres un jour".

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