Dans le sud syrien, des déplacés échoués près d'une frontière fermée

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Par Mohamad ABAZEED - Nassib (Syrie) (AFP)
Publié le 02 juillet 2018 - 18:18
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Des Syriens ayant fui les bombardements des forces pro-régime dans la province de Deraa attendant dans un camp de fortune près de la frontière jordanienne, dans le sud de la Syrie, le 1er juillet 2018
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© Mohamad ABAZEED / AFP
Des Syriens ayant fui les bombardements des forces pro-régime dans la province de Deraa attendant dans un camp de fortune près de la frontière jordanienne, dans le sud de la Syrie,
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Avec sa femme enceinte, Ayman al-Homsi a fui le pilonnage du régime dans le sud syrien. Il se retrouve face à une frontière fermée, aux portes de la Jordanie, comme des milliers de déplacés attendant une aide qui ne vient pas.

"Une femme qui va accoucher maintenant, où est-ce qu'on doit l'emmener? On n'a rien pour l'aider", lâche le jeune homme de 25 ans, qui a abandonné l'est de la province de Deraa, bombardée par l'armée de Bachar al-Assad, pour trouver refuge près de la frontière avec la Jordanie.

"On manque de tout ici, il n'y a pas d'eau, pas de nourriture, rien pour se protéger du soleil", poursuit le futur papa, arborant une chemise noire sobre et une courte barbe.

Autour de lui, installées sur des terres arides, à quelques mètres seulement de la frontière, plusieurs petites tentes ont été dressées à la hâte, à l'aide de bâches blanches, de couvertures et de tapis de jute.

Certains ont transformé un camion frigorifique en abri. D'autres dorment dans leur voiture.

Au sommet d'une colline surplombant le campement informel, des soldats jordaniens, tenant un poste d'observation, sont assis à l'ombre de leur véhicule blindé.

"On demande à ce que les gens puissent entrer en Jordanie, pour la sécurité des femmes et des enfants", martèle M. Homsi.

Déterminé à reconquérir le sud syrien, le régime de Damas a lancé le 19 juin une offensive contre les territoires rebelles, pilonnant avec son indéfectible allié russe les secteurs insurgés, notamment dans l'est de la province de Deraa.

Les hostilités ont poussé au moins 270.000 personnes à fuir selon l'ONU, et ils sont quelque 70.000 déplacés à avoir trouvé refuge près du poste-frontière de Nassib, aux portes de la Jordanie.

- "Sauvés de justesse" -

Face à cet afflux, les autorités d'Amman se sont montrées catégoriques: elles n'ouvriront pas la frontière, fermée depuis 2016, et le pays ne pourra pas accueillir une nouvelle vague de réfugiés.

En Jordanie, quelque 650.000 réfugiés syriens ont été enregistrés auprès des Nations unies, mais les autorités évaluent leur nombre total à près d'1,3 million.

"On s'est sauvés de justesse de sous les décombres, avec nos enfants et nos femmes. Il y a des personnes âgées avec nous, des enfants, ils ne peuvent pas supporter cette chaleur", poursuit M. Homsi.

C'est la deuxième fois que le conflit meurtrier qui ravage la Syrie depuis 2011 le pourchasse. Une première fois déjà, il avait fui les combats dans la province centrale de Homs.

Installés à l'abri des habitations de fortune, des femmes et des enfants cherchent un peu d'ombre. Les plus chanceux sont arrivés en voiture ou à bord de minibus, encore bourrés de leurs maigres affaires emportées à la hâte: des matelas, des couvertures, parfois une bonbonne de gaz.

Dans un communiqué, l'ONG Amnesty international a appelé la Jordanie à ouvrir sa frontière, qui représente pour les déplacés "la seule sortie vers la sécurité".

"Les habitants de Deraa sont pris au piège, beaucoup de déplacés vivent dans des tentes de fortune, dans la chaleur écrasante, sans avoir suffisament de nourriture, ni d'eau ou de soins médicaux", déplore Amnesty, soulignant également "la peur constante d'être touchés par des attaques à tout moment".

Amna al-Khazaale est Jordanienne, mais mariée à un Syrien avec lequel elle vivait à Deraa depuis des années. Aujourd'hui à la frontière, elle ne peut pas rentrer dans son pays d'origine.

"On tourne en rond pour trouver de la nourriture, on doit manger du pain dur", se lamente la quadragénaire, toute de noire vêtue, le visage encadré par un voile strict.

Un de ses fils est mort il y a quelques jours dans les violences. Il lui reste deux fillettes et un garçon.

"On n'a plus de maison pour nous abriter. On est installés à même le sol."

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