L'Afrique, nouvel eldorado ou mirage pour les fonds privés ?

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Par Patrick FORT - Abidjan (AFP)
Publié le 13 avril 2018 - 11:25
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Les laurétas de l'Africa CEO Forum d'Abidjan en Côte d'Ivoire, le 26 mars 2018
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© SIA KAMBOU / AFP/Archives
Les laurétas de l'Africa CEO Forum d'Abidjan en Côte d'Ivoire, le 26 mars 2018
© SIA KAMBOU / AFP/Archives

Fort taux de croissance, émergence d'une classe moyenne et marchés potentiels énormes avec le boom démographique... L'Afrique est-elle un nouvel eldorado pour les investisseurs privés, ou bien les risques sont-ils trop importants?

"L'Afrique doit et va être le meilleur endroit pour investir à l'avenir", assure le ministre de l'économie du Ghana, Ken Ofori-Atta, rencontré par l'AFP lors du CEO Forum d'Abidjan.

Mais les données économiques sont plus contrastées et certains indicateurs sont clairement dans le rouge.

La crise pétrolière ou la chute des cours du cacao ont montré la fragilité de certaines économies, comme le Nigeria ou la Côte d'Ivoire.

Parallèlement, après une période de désendettement, on note un endettement public en hausse tandis que les experts voient un différentiel grandissant entre les besoins en infrastructures et les réalisations.

Baisse avant rebond ou symptôme grave? Le total des fonds d'investissements privés en Afrique (Private Equity) a baissé de 4,3 milliards de dollars en 2015 à 2,3 en 2017.

"D'abord, +les investissements en Afrique+, cela ne veut pas dire grand-chose", tempère Laureen Kouassi Olsson, de Amethis Finance. "Il y a plusieurs Afriques! Ce n'est pas un seul pays!".

"On a effectivement des croissances qui sont élevées mais encore faut-il pouvoir faire le pari de la bonne économie, la bonne industrie qui ne sera pas trop impactée par des changements, par le prix des commodités (matières premières)", explique-t-elle.

L'émergence d'une classe moyenne qui "consomme et qui amortit les chocs" constitue un atout de poids.

"Tout est une question de stratégie d'investissement dans les secteurs résilients dans des économies imparfaites", juge-t-elle, assurant qu'on peut promettre des retours sur investissement concurrentiels avec ceux proposés en Europe ou aux États-Unis.

Pour les investisseurs, il faut savoir gérer les risques.

"Les risques sécuritaires ça se gère avec un surcoût. Le risques politiques c'est plus délicat. Il y a à la fois les changements des règles en cours de route, mais aussi la non-application des règles en vigueur", précise Vincent Le Guennou du fonds ECP.

- Bons retours sur investissement -

"Le maître mot, c'est la diversification", pour ne pas subir "les à-coups" estime-t-il. "On peut attirer des privés qui veulent diversifier leurs options et investir en Afrique".

Amethis, ECP ainsi que la plupart des fonds d'investissement, ne mettent de l'argent dans des entreprises que sous conditions: conseils d'administration clairement identifiés et comptabilités claires sont la règle de base.

"A partir de là, on peut gérer les autres risques", résume Mme Kouassi-Olsson.

"Évidemment, il y a des risques mais où il n'y en a-t-il pas? Ce n'est pas une question d'optimisme ou de pessimisme mais de réalisme. Il faut être réaliste quand on investit", jugent Frederique Ekra et Charles Levy, de Bloomfield Investment.

"Qui dit risque élevé, dit retour sur investissement élevé", souligne Richard Arlove de Abax, société prestataire de services fiduciaires basée à Maurice d'où opèrent la plupart des fonds.

Mais il reconnait qu'il faut savoir aussi "toucher le côté émotionnel". "Les investisseurs ne veulent pas investir à perte mais beaucoup recherchent des projets de développement durables, des projets qui vont les toucher, qui vont changer la vie des gens. Il faut donc bien choisir ses projets pour les attirer", poursuit sa collègue Anjeelee Chinamal.

"Les levées de fonds pour investir dans des opportunités, ça se fait, mais après il faut trouver une sortie pour démontrer que le business a été rentable", nuance Christophe Charlier, du fonds Renaissance Capital.

Problème récurrent, les projets proposés ne sont souvent pas assez importants pour intéresser les investisseurs internationaux.

"Venir investir par exemple au Sénégal dans un projet de 10 millions de dollars, ça ne les intéresse pas, ce n'est pas assez gros", explique M. Charlier. "C'est plus facile de lever 50 millions, 70 millions que de lever 5 ou 10. Parce que 5 ou 10, c'est le même boulot, mais par contre le rendement n'est pas pareil".

"Les entrepreneurs en Afrique, quand ils trouvent des financements, c'est un tel miracle", note-t-il. Pour lui, "Il faut que les États et les politiques trouvent des moyens et créent les conditions pour que les banques investissent" dans les entreprises, et non dans le circuit financier.

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