L'appel à l'aide de la fille d'un libraire à nouveau "disparu" en Chine

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Par Laura MANNERING - Hong Kong (AFP)
Publié le 05 février 2018 - 11:26
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Photo non datée d'Angela Gui, la fille de l'éditeur-libraire disparu Gui Minhai, fournie le 22 septembre 2017
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© Handout / Courtesy of Angela Gui/AFP/Archives
Photo non datée d'Angela Gui, la fille de l'éditeur-libraire disparu Gui Minhai, fournie le 22 septembre 2017
© Handout / Courtesy of Angela Gui/AFP/Archives

Depuis la seconde arrestation de son père par les autorités chinoises, la fille de l'éditeur-libraire suédois d'origine chinoise Gui Minhai est sans nouvelle de lui. Alors Angela Gui réitère son appel presque désespéré aux capitales étrangères.

"Il y a toute sorte de scénarios horribles qui sont envisageables", confie à l'AFP l'étudiante de 23 ans, qui vit en Angleterre.

Gui Minhai a été arrêté par des policiers en civil le 20 janvier dans un train à destination de Pékin, où il était en compagnie de deux diplomates suédois.

C'est sa seconde "disparition" inexpliquée, après celle de 2015. Angela Gui affirme n'avoir aucune idée de l'endroit où il de trouve désormais.

Les Etats-Unis et l'Union européenne ont demandé la libération immédiate de Gui. L'affaire a provoqué une brouille entre Stockholm et Pékin.

Les autorités chinoises se sont refusées à donner des explications, laissant simplement entendre que les diplomates suédois avaient d'une façon ou d'une autre enfreint la loi.

La présidence de Xi Jinping, qui a débuté en 2012, a été marqué par une répression accrue contre la société civile, avec des centaines d'arrestations d'avocats ou d'activistes.

"J'espère simplement que la Suède et les autres gouvernements feront autant de bruit que possible", explique Angela Gui.

- Suivi par la police -

"Je veux qu'ils montrent quelles peuvent être les conséquences réelles et pas seulement qu'ils répètent que c'est inacceptable", a-t-elle ajouté.

Gui Minhai travaillait pour la maison d'édition "Mighty Current" basée à Hong Kong, territoire chinois qui jouit de fortes libertés. Cette société publiait des livres salaces sur la vie privée des dirigeants chinois et interdits en Chine continentale.

En 2015, comme quatre autres employés de la maison d'édition, M. Gui s'était volatilisé lors de vacances, avant de réapparaître dans un centre de détention chinois. Il affirmait alors être allé en Chine de son plein gré pour y assumer ses "responsabilités légales", plusieurs années après y avoir été responsable de la mort d'un étudiant dans un accident de voiture.

Les autorités chinoises avaient affirmé en octobre qu'elles l'avaient relâché, mais sa fille affirmait que son père était en résidence surveillée à Ningbo, ville de l'est de la Chine, où vivent certains se ses des proches.

Angela Gui a expliqué à l'AFP qu'elle avait pu, ces derniers mois, parler plusieurs fois par semaine sur Skype à son père. Il lui avait dit qu'il pouvait librement circuler dans Ningbo, mais qu'il était suivi par la police.

On l'avait autorisé trois fois à se rendre au consulat de Suède à Shanghai pour faire refaire ses papiers, et notamment un nouveau passeport. Angela Gui estime qu'on ne lui avait pas ordonné de demeurer à Ningbo.

- 'Enlèvement sans précédent' -

La jeune femme a été diplômée de l'université anglaise de Warwick la veille de cette deuxième "disparition".

"Il m'avait dit: +Je suis très désolé de ne pas pouvoir être là+. Je lui ai dit que ce n'était pas grave parce qu'il pourrait se rattraper pour mon doctorat."

"J'espérais que tout cela s'arrêterait et qu'il pourrait rentrer à la maison."

Quand il a été arrêté, Gui Minhai se rendait à Pékin pour consulter un médecin spécialiste suédois, redoutant d'être atteint de la maladie de Charcot.

"S'il a cette maladie, il n'a peut-être plus beaucoup de temps à vivre", se désole sa fille.

Faute de communication officielle sur la situation de son père, elle redoute qu'il ne soit jugé et condamné à une peine plus longue, ce qui mettrait sa santé en péril.

Les autorités chinoises avaient déjà été fortement critiquées pour ne pas avoir laissé le Prix Nobel de la Paix Liu Xiaobo partir à l'étranger se faire soigner de son cancer du foie.

Il est décédé en juillet dans un hôpital chinois, quelques semaines après avoir été placé en liberté conditionnelle pour raisons de santé.

Pour Angela Gui, la communauté internationale doit sortir de sa "léthargie".

"Il n'aurait pas dû être enlevé une seconde fois, on aurait dû trouver un moyen de le faire sortir avant", dénonce-t-elle. "Ou on aurait dû faire en sorte de s'assurer qu'il pouvait voyager en toute sécurité."

Un porte-parole du gouvernement suédois a affirmé à l'AFP que des "efforts intenses" étaient en cours, se refusant toutefois à dire si Stockholm avait reçu des informations sur l'endroit où se trouve M. Gui.

Un diplomate occidental à Pékin a de son côté redouté que le libraire ne soit pas relâché "dans l'immédiat": "Les circonstances de son enlèvement sont sans précédent."

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