L'armée mobilisée au Brésil pour lever les barrages routiers

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Par Eugenia LOGIURATTO - Brasilia (AFP)
Publié le 25 mai 2018 - 19:32
Mis à jour le 26 mai 2018 - 00:16
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Des manifestants brûlent une voiture sur une route pour dénoncer la hausse des prix du diesel à Ribeirao das Neves au Brésil, le 25 mai 2018
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© DOUGLAS MAGNO / AFP
Des manifestants brûlent une voiture sur une route pour dénoncer la hausse des prix du diesel à Ribeirao das Neves au Brésil, le 25 mai 2018
© DOUGLAS MAGNO / AFP

Le gouvernementbrésilien a haussé le ton vendredi face à la grève des routiers qui paralyse tout le pays depuis le début de la semaine, en mobilisant l'armée pour lever les centaines de barrages dans le pays.

Le président Michel Temer a annoncé en début d'après-midi dans une allocution télévisée au ton solennel "avoir mobilisé les forces de sécurité" pour dégager les routes du pays.

Le ministre de la défense, Joaquim Silva e Luna, est allé plus loin en affirmant deux heures plus tard que l'armée agirait de façon rapide, coordonnée et énergique (...) pour libérer la circulation dans des zones critiques" comme les raffineries et les aéroports.

Dans un communiqué conjoint, les leaders des principaux syndicats du pays ont affirmé que "la décision du gouvernement de mobiliser l'armée comme instrument de répression" revenait à "tenter d'éteindre l'incendie avec de l'essence".

Peu avant, la mairie de Sao Paulo, capitale économique du pays, a décrété l'état d'urgence, une mesure extrême permettant notamment de réquisitionner du combustible.

Vols annulés, stations-service à sec, supermarchés à cours de produits frais: la situation était absolument critique au cinquième jour de cette grève pour protester contre la hausse des prix du diesel.

"Nous n'allons par permettre que la population n’ait pas accès à des produits de première nécessité (...), que les hôpitaux n’aient pas les médicaments nécessaires pour sauver des vies", a expliqué le président Temer.

- "Minorité radicale" -

Pourtant, le gouvernement avait affiché un certain optimisme jeudi soir, une partie des dirigeants syndicaux s'étant engagés à "suspendre le mouvement de grève pendant 15 jours, jusqu'à une nouvelle rencontre avec le gouvernement" en échange notamment de la suppression d'une taxe sur le diesel.

"Nous avons accepté les 12 revendications prioritaires des routiers, qui se sont engagés à mettre fin aux barrages immédiatement. Mais malheureusement une minorité radicale a continué de bloquer les routes", a souligné le chef de l'Etat, en référence aux sept heures de négociations de la veille.

"Le gouvernement a eu le courage de dialoguer, le gouvernement aura le courage d'exercer son autorité", a-t-il assuré.

Pour l'Association brésilienne des Camionneurs (Abcam), syndicat qui représente 700.000 chauffeurs routiers, "l'idée est de maintenir la grève, les barrages routiers".

"L'Abcam n'est pas d'accord (avec la trêve) parce que (le gouvernement) n'a pas tenu sa promesse initiale d'annuler les taxes avant la fin de la semaine", a expliqué une porte-parole de ce syndicat à l'AFP.

Les problèmes d'approvisionnement majeurs causés par cette grève ont affecté l'ensemble de l'économie, dans cet immense pays qui n'a quasiment pas de réseau ferroviaire et où 60% du transport de marchandises s'effectue par la route.

À l'aéroport de la capitale Brasilia, plus de 30 vols ont été annulés, dont deux internationaux, les réserves de kérosène étant épuisées.

Selon la société gestionnaire Infraero, dix autres aéroports du pays sont également à sec, y compris celui de Recife (nord-est).

- Chaînes de montage à l'arrêt -

Les exportations du pays sont en passe d'être fortement affectées, et l'industrie automobile, qui emploie 132.000 personnes, est déjà totalement à l'arrêt.

Dans de nombreuses grandes villes brésiliennes, les automobilistes ont affronté depuis plusieurs jours d'immense files d'attente pour faire le plein. Mais vendredi, de nombreuses stations-service étaient désertées, car sans essence.

Cette situation chaotique porte un rude coup à la crédibilité du gouvernementdu président Michel Temer, à moins de cinq mois de la présidentielle d'octobre.

"Cela montre à l'opinion publique et au marché, au Brésil et à l'étranger, que le gouvernement Temer est un gouvernement nain, sans aucun pouvoir", a affirmé à l'AFP l'analyste politique André César, du cabinet de consultants Hold.

"On a été dévalorisés par ce gouvernement. Ils disaient que le Brésil ne s’arrêterait pas si les camions s’arrêtaient. On a prouvé que si", a affirmé à l'AFP Luiz Carlos, chauffeur de 47 ans, qui a garé son poids lourd devant une raffinerie de Duque de Caxias, près de Rio.

Selon la Confédération nationale des transports, le Brésil dispose d'une flotte de plus de 2,5 millions de poids lourds, dont 477.000 appartiennent à des chauffeurs routiers indépendants.

Si le mouvement dure, les conséquences économiques risquent d'être catastrophiques pour un pays qui a du mal à se remettre sur pied après la récession historique de 2015-16.

Les prix du diesel ont fortement augmenté récemment en raison de la hausse du cours du pétrole et d'une nouvelle politique de tarifs de Petrobras, qui s'est alignée depuis la fin 2016 sur les cours internationaux.

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