Navalny, l'opposant anticorruption déterminé à défier Poutine

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Par Germain MOYON - Moscou (AFP)
Publié le 17 janvier 2018 - 13:32
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Alexeï Navalny pendant un entretien avec l'AFP, le 16 janvier à Moscou
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© Mladen ANTONOV / AFP
Alexeï Navalny pendant un entretien avec l'AFP, le 16 janvier à Moscou
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Pourfendeur de la corruption des élites russes, orateur charismatique aux idées parfois nationalistes, Alexeï Navalny reste déterminé à défier Vladimir Poutine, dont il s'est imposé comme le principal opposant libéral, malgré son absence de la présidentielle.

Ignoré des médias nationaux, non représenté au parlement et régulièrement condamné par la justice, l'avocat de 41 ans a rassemblé depuis un an des dizaines de milliers de jeunes dans toute la Russie, qui semblait être devenue un pays sans opposant après 18 ans de pouvoir de Vladimir Poutine.

Déclaré inéligible, il appelle ses électeurs à la "grève" pour la présidentielle du 18 mars: boycott mais aussi envoi d'observateurs pour traquer les fraudes dans les bureaux de vote.

Avec son Fonds de lutte contre la corruption, créé en 2012, il s'appuie sur ce point faible de la Russie de Poutine, et du parti au pouvoir, Russie Unie, le "parti des voleurs et des escrocs" selon lui.

Infatigable, Alexeï Navalny, grand blond aux yeux bleus, multiplie les coups d'éclat en s'en prenant aux plus intouchables: il porte plainte contre le procureur général Iouri Tchaïka, puis contre Vladimir Poutine, publie sur son blog des révélations sur le patrimoine caché de proches du pouvoir, qu'il accuse de corruption.

Dès 2007, l'avocat a ferraillé avec le gouvernement en achetant des actions dans des groupes semi-publics comme la compagnie pétrolière Rosneft et le géant gazier Gazprom: arguant de son statut d'actionnaire minoritaire, il exigeait la transparence des comptes.

- Discours nationaliste -

Formé au début des années 1990 à l'université de l'Amitié des peuples à Moscou, passé par le parti d'opposition libéral Iabloko d'où il a été exclu en 2007 pour ses prises de position nationalistes, il n'a eu de cesse de contester la légitimité de Vladimir Poutine, qui cultive une image de défenseur intègre des intérêts de la Russie.

Mais c'est seulement à la faveur des législatives de décembre 2011, qui vont déclencher une contestation sans précédent, qu'Alexeï Navalny a gagné en notoriété, grâce à son charisme, mais aussi à la virulence de ses prises de parole contre le Kremlin.

En septembre 2013, il obtient son premier succès électoral à l'élection municipale de Moscou. Il crée la surprise en arrivant en deuxième position avec 27,2%, juste derrière le maire sortant, l'ex-chef de cabinet de Vladimir Poutine Sergueï Sobianine, un score qui le conforte en figure de proue de l'opposition.

Alexeï Navalny a aussi souvent participé à des rassemblements aux relents racistes tels que la Marche russe. Il a néanmoins pris ses distances avec ce milieu ces dernières années et progressivement gommé les tonalités nationalistes de ses discours.

Dans un entretien à l'AFP, il se dit aujourd'hui "fier" de son travail pour relier "les branches traditionnelles de l’opposition en Russie, libérale et soi-disant nationaliste".

Il dit en garder "des vue conservatrices" sur le plan migratoire, souhaitant l'introduction de visas pour les ex-républiques soviétiques d'Asie centrale, d'où vient une grande partie de l'immigration économique.

- Procès et campagne -

Depuis 2013, ce père de deux enfants a été condamné à des peines de prison avec sursis pour deux affaires de détournement de fonds qu'il juge politiques et qui lui valent d'être déclaré inéligible jusqu'en 2028.

L'année dernière, il a effectué trois séjours en prison mais a aussi parcouru la Russie, rassemblant des milliers de partisans dans des villes peu habituées aux manifestations et ouvrant des bureaux de campagne.

A son appel, des dizaines de milliers de jeunes, parfois mineurs, sont descendus dans la rue, débouchant sur des milliers d'arrestations.

Régulièrement entarté ou couvert de désinfectant indélébile par des inconnus, Alexeï Navalny est souvent le sujet de reportages à charge diffusés aux heures de grande écoute sur des chaînes de télévision publiques.

Rejetant les décisions de ses procès actuels comme ceux des précédents, il a toujours assuré que rien ne viendrait enrayer sa motivation, même les menaces qui pèsent sur sa sécurité et sa famille.

"Je fais de la politique depuis longtemps, je suis souvent arrêté (...), c'est simplement une partie de la vie", relativise-t-il. "Je fais le travail que je préfère, les gens me soutiennent, j'ai de nombreux partisans. Qu'est-ce qui peut rendre un homme plus heureux?"

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