Raqa, Kirkouk : le problème kurde de Washington

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Par AFP
Publié le 18 octobre 2017 - 12:24
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Des partisans et membres des unités kurdes de protection du peuple (YPG) célèbrent dans une rue de Q
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Des partisans et membres des unités kurdes de protection du peuple (YPG) célèbrent dans une rue de Qamichli la reprise de Raqa par les Forces démocratiques syriennes, le 17 octobre
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La chute de Raqa et les affrontements pour le contrôle de Kirkouk montrent, de façon simultanée, l'efficacité militaire de la stratégie américaine en Syrie et en Irak, appuyée sur les Kurdes, mais aussi ses faiblesses politiques.

Le référendum sur l'indépendance kurde, dont Washington n'a pas su empêcher la tenue fin septembre, a semé la discorde entre les deux principaux alliés des Etats-Unis en Irak et en Syrie: l'armée irakienne équipée et entraînée par Washington, et les combattants kurdes qui ont empêché en 2014 le groupe Etat islamique de s'emparer de Kirkouk et qui ont largement contribué à la prise de Raqa en Syrie.

"Nous ne prenons pas parti", a déclaré lundi Donald Trump, apparaissant impuissant alors que les Etats-Unis ont des troupes déployées aussi bien aux côtés de l'armée irakienne que des peshmergas kurdes.

Les Etats-Unis veulent "calmer les choses", a indiqué le ministre de la Défense Jim Mattis. Ils sont "très inquiets" et "encouragent le dialogue", a renchéri Heather Nauert, la porte-parole de la diplomatie américaine.

Pour Linda Robinson, du centre de recherche Rand, le gouvernement américain s'est mobilisé "trop tard", en appelant le président kurde Massoud Barzani à annuler son référendum deux jours avant la date prévue.

Le oui à l'indépendance de la région autonome kurde ainsi que des zones disputées, notamment la province de Kirkouk, riche en pétrole, "a placé (Haider) al-Abadi dans une situation très difficile", indique Mme Robinson, ajoutant que le Premier ministre irakien, qui est chiite, craignait de se faire déborder par des factions chiites plus radicales, soutenues par l'Iran.

- 'Exaspérée' -

L'administration américaine est "exaspérée" par les Kurdes irakiens, ajoute-t-elle, estimant que les divergences avec M. Barzani ne devraient pas affecter la coopération de Washington avec les Forces démocratiques syriennes (FDS), composées de combattants arabes et kurdes.

De fait, les aspirations kurdes à l'indépendance menacent la stabilité de trois pays avec lesquels les Etats-Unis entretiennent des relations compliquées: l'Iran, la Turquie et la Syrie.

Alors que les tensions diplomatiques sont au plus haut avec la Turquie, pays membre de l'Otan, Washington cherche à garder de bonnes relations avec les militaires turcs, qui ouvrent notamment leur base d'Incirlik à la coalition anti-jihadiste menée par les Etats-Unis. Or la Turquie est confrontée depuis 1984 à une sanglante guerilla du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), organisation classée "terroriste" par Ankara.

L'Iran, ennemi historique des Etats-Unis qui abrite lui aussi un forte minorité kurde, a tout intérêt à voir les combattants kurdes perdre du terrain en Irak, mais aussi en Syrie où Téhéran est engagé en aux côtés du régime de Bachar al-Assad pour lutter contre les jihadistes ainsi que les groupes rebelles soutenus par Washington.

Le Pentagone salue la qualité des combattants kurdes, mais les militaires américains se gardent bien de toute promesse à leur égard.

"Les FDS se sont révélés (...) des partenaires efficaces et capables", a indiqué mardi le colonel Ryan Dillon, porte-parole de la coalition.

Interrogé sur la possibilité que la formation militaire des Kurdes par la coalition puisse être suspendue en raison du référendum, il a répondu qu'aucune décision n'avait été prise et que la formation se poursuivait.

Pour David Pollock, du Washington Institute for Near East Policy, les tensions à Kirkouk bénéficient largement à Téhéran et les Kurdes ont quitté la ville sans combattre car "ils ont compris que personne ne viendrait à leur secours".

Les Etats-Unis ont "utilisé les Kurdes contre Daesh et ils les ont laissé tomber en Irak, et ça peut se produire peut-être en Syrie aussi", ajoute cet analyste qui s'est récemment rendu à Erbil, la capitale de la région autonome kurde. "On leur dit: vous avez tout donné depuis trois ans, mais on vous laisse tomber".

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