Soudan : le président déchu en prison, les manifestants toujours mobilisés

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Par AFP - Khartoum
Publié le 17 avril 2019 - 15:03
Mis à jour le 18 avril 2019 - 00:20
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Des manifestants soudanais autour du QG de l'armée, à Khartoum, le 17 avril 2019
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© Ashraf SHAZLY / AFP
Des manifestants soudanais autour du QG de l'armée, à Khartoum, le 17 avril 2019
© Ashraf SHAZLY / AFP

Les manifestants réclamant un pouvoir civil au Soudan sont restés fortement mobilisés mercredi, malgré le transfert en prison du président déchu Omar el-Béchir, principale cible de leur colère avant sa destitution par l'armée la semaine dernière.

Un proche de M. Béchir, 75 ans, a indiqué à l'AFP que ce dernier, jusque-là détenu dans un lieu inconnu, avait été transféré dans la nuit dans une prison du nord de la capitale Khartoum.

En soirée, le Conseil militaire de transition qui a succédé à M. Béchir a annoncé l'arrestation de deux des cinq frères du président déchu, Abdallah et Abbas. Hommes d'affaires, les deux frères de M. Béchir n'ont pas de fonction officielle.

M. Béchir a vu ses trois décennies de règne s'achever le 11 avril avec sa déposition par les militaires après quatre mois de contestation populaire inédite. Il est par ailleurs sous le coup de deux mandats d'arrêt de la Cour pénale internationale, notamment pour "génocide" et "crimes contre l'humanité" dans la province du Darfour (ouest), mais son extradition reste très incertaine.

Dans la capitale, des milliers de personnes sont toujours rassemblées pour le 12e jour consécutif devant le QG de l'armée.

Déclenchées le 19 décembre pour protester contre le triplement du prix du pain en plein marasme économique, les manifestations se sont rapidement transformées en contestation contre M. Béchir. Aujourd'hui, les manifestants réclament la dissolution du Conseil militaire de transition qui a succédé à M. Béchir et l'instauration d'un pouvoir civil.

- Beaucoup à Faire -

Au moins 65 personnes sont mortes depuis le début de la contestation, selon un bilan officiel.

"Quand je pense à ceux qui ont été tués, cela me donne de l'énergie pour continuer", a dit Ossama Hussein, un manifestant, devant le QG de l'armée.

Des docteurs, des journalistes et des étudiants se sont joints mercredi au sit-in. De même que de nombreuses femmes -médecins, enseignantes et avocates- se faisant appeler "le réseau d'information de la révolution".

A leur arrivée au rassemblement, ils ont été accueillis avec des danses et de la musique africaine.

Les manifestants débattent de tout, "des droits de l'Homme, de démocratie", a indiqué un témoin.

Et d'autres estiment que beaucoup reste encore à faire. "C'est vrai, on a eu Béchir, mais nous devons encore nous débarrasser du régime", a déclaré Khaled Mohamed, un médecin.

"On a peur qu'on nous vole notre révolution, c'est pourquoi nous restons sur place, et nous ne partirons pas avant d'obtenir satisfaction", a dit de son côté Fadia Khalaf, une manifestante.

Le Conseil militaire de transition, dirigé par le général Abdel Fattah al-Burhane, a déjà fait des gestes envers les manifestants en libérant des protestataires, limogeant des figures controversées du nouveau pouvoir, et en promettant un gouvernement civil, sans ingérence des militaires.

L'Association des professionnels soudanais (SPA), fer de lance du mouvement, exige elle la dissolution du Conseil militaire et la mise sur pied d'un conseil civil, comprenant des représentants de l'armée.

Samedi, le général Burhane a promis "d'éliminer les racines" du régime Béchir, alors que le Conseil militaire qu'il dirige compte parmi ses dix membres des piliers du pouvoir sortant.

- Extradition -

Parmi les autres mesures annoncées par le Conseil militaire figure un cessez-le-feu à travers ce pays en proie à diverses rébellions.

Mercredi, Abdelaziz Al-Hilou, chef du Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord (SPLM-N, rebelle), a ordonné la suspension des hostilités jusqu'à fin juillet dans les Etats méridionaux du Nil Bleu et du Kordofan-Sud, où ses hommes sont engagés dans des combats contre les forces gouvernementales.

Il a parlé d'un "gage de bonne volonté pour donner une chance à un transfert immédiat du pouvoir aux civils".

Concernant le sort d'Omar el-Béchir, visé par des mandats d'arrêt de la CPI, le pouvoir militaire a d'abord affirmé qu'il refuserait de l'extrader. Puis un membre du Conseil militaire, le général Jalaluddine Cheikh, a indiqué que la décision serait "prise par un gouvernement élu et non par le Conseil militaire".

Pour Amnesty International, Omar El-Béchir "doit être immédiatement remis à la CPI".

A l'étranger, les Etats-Unis ont indiqué être prêts à retirer le Soudan de leur liste des pays accusés de soutenir le "terrorisme" si le Conseil militaire engageait un "changement fondamental" de gouvernance.

Selon un responsable du département d'Etat, Washington a poussé le Conseil militaire à "agir rapidement" pour inclure des civils dans un gouvernement provisoire et organiser des élections.

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