Des Marseillais en colère après le drame de la rue d'Aubagne

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Par Julie Pacorel, Martin DE MONTVALON - Marseille (AFP)
Publié le 10 novembre 2018 - 17:53
Mis à jour le 11 novembre 2018 - 00:20
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Marche blanche à Marseille samedi 10 novembre 2018, en hommage aux 8 morts de l'effondrement deux immeubles vétustes, le 5 novembre 2018.
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© CHRISTOPHE SIMON / AFP
Marche blanche à Marseille samedi 10 novembre 2018, en hommage aux 8 morts de l'effondrement deux immeubles vétustes, le 5 novembre 2018.
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Plusieurs milliers de Marseillais --8.000, selon la police-- ont défilé samedi en hommage aux victimes de l'effondrement de deux immeubles, qui a fait 8 morts, exprimant leur "colère noire" à leur arrivée sous les fenêtres de l'hôtel de ville aux cris de "Gaudin assassin! Gaudin démission!"

Comme un symbole des critiques et des polémiques qui s'abattent sur la municipalité et sa gestion de l'habitat indigne depuis le drame, le balcon d'un immeuble --pourtant apparemment en bon état général-- s'est partiellement effondré à quelques mètres à peine du parcours de la marche blanche, faisant 3 blessés légers: une femme de 59 ans et un garçon de 7 ans, tombés du premier étage, et une femme de 24 ans, qui a reçu un bloc de pierre sur le pied.

Rassemblé auparavant à quelques dizaines de mètres du lieu de la catastrophe, le cortège s'est ébranlé derrière les proches des huit victimes --5 hommes et 3 femmes--, une rose blanche à la main. Parmi eux, de nombreux amis de Pape Maguette, un jeune Sénégalais mort sous les décombres de son immeuble, brandissaient des portraits du jeune hommes, dreadlocks sur la tête.

"Vous vous rendez compte que lundi matin, une heure après l’effondrement, il avait rendez-vous pour un nouveau logement?", raconte son ami Salim. Tonio, 39 ans, cigarette à la main, évoque, lui, ses "nuits sans sommeil" depuis lundi: "J’ai peur, il y a un mois, j’habitais encore dans un immeuble qui a été évacué hier, par précaution (...). C'est pas normal de vivre ça, c’est une insulte aux pauvres".

Chez les manifestants, la colère monte très vite. "Aujourd’hui il y a des enfants qui refusent d'aller à l’école parce qu'ils ont peur pour leur maman qui reste à la maison, des gens qui flippent parce que leur appartement est sale et humide", dénonce Évelyne, du collectif "5 novembre".

- "Une catastrophe politique!" -

Après avoir traversé dans un silence impressionnant Noailles, le quartier populaire où a eu lieu le drame, d'habitude très vivant, le cortège arrive en bas de la Canebière, non loin de la mairie de Jean-Claude Gaudin, cible de critiques virulentes depuis le drame.

Sous les balcons de l'hôtel de ville, les cris fusent: "Gaudin assassin! Gaudin en prison! Gaudin démission!". Une minute de silence suit, suivie d'une longue salve d'applaudissements, dans une grande émotion.

"Ce n'est pas une catastrophe naturelle mais une catastrophe politique!", lance au micro Kevin, un habitant de la rue d'Aubagne. Après le drame, la mairie avait évoqué parmi les causes de l'effondrement des immeubles les fortes pluies.

"Nous refusons que ce drame soit l'occasion pour la mairie et les spéculateurs de dégager quiconque du quartier", prévient aussi le jeune, applaudi bruyamment. Des centaines d'habitants des immeubles effondrés --trois, dont un tombé en partie sous l'action des secours et dont un seul était habité-- et de plusieurs autres alentour ont été évacués par précaution par les autorités. Celles-ci craignent un "effet domino" dans un quartier dont le bâti est souvent très ancien. Les recherches de victimes ont été arrêtées samedi.

Plusieurs élus, dont le député LFI des Bouches-du-Rhône Jean-Luc Mélenchon, ou encore les députés LREM Saïd Ahamada et Alexandra Louis, ont défilé discrètement, sans écharpe tricolore.

La mairie de Marseille a pris en charge 187 familles soit 404 personnes dans 5 hôtels de la ville, a annoncé la municipalité dans un communiqué samedi soir. "Avec le soutien des bailleurs sociaux, la ville compte aujourd’hui 150 logements sociaux disponibles, dont 60 en centre-ville", a indiqué la Ville, ajoutant que "9 ménages ont accepté un relogement définitif et 2 un relogement temporaire". La mairie a aussi mis à disposition des sinistrés un restaurant et "la cantine gratuite" pour tous les enfants.

Depuis le 7 novembre, 130 signalements ont été enregistrés sur l’ensemble de la commune et 78 interventions ont eu lieu, a indiqué la Ville. A titre de comparaison, pour toute l'année 2017 le maire avait signé moins de 100 arrêtés de péril imminents.

Tout au long de la semaine, les critiques à l'égard de la gestion de Jean-Claude Gaudin (LR), aux manettes de la ville depuis 23 ans, n'ont cessé de croître. Un rapport remis en 2015 au gouvernement faisait état de 40.000 logements indignes à Marseille, menaçant la sécurité de près de 100.000 habitants (Marseille en compte plus de 860.000 selon l'Insee).

Une enquête a été ouverte et confiée à la police judiciaire pour déterminer les circonstances exactes de la catastrophe et d'éventuelles responsabilités.

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