Migrants : nouvelle génération de bébés vénézuéliens au Brésil

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Par Paula RAMON - Boa Vista (Brésil) (AFP)
Publié le 10 mars 2018 - 10:33
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La Vénézuélienne Dayana Rodríguez s'occupe de sa fille après son accouchement à la maternité de l'hôpital Nossa Senhora de Nazaré, le 26 février 2018 à Boa Vista, au Brésil
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© MAURO PIMENTEL / AFP/Archives
La Vénézuélienne Dayana Rodríguez s'occupe de sa fille après son accouchement à la maternité de l'hôpital Nossa Senhora de Nazaré, le 26 février 2018 à Boa Vista, au Brésil
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Les accouchements de migrantes vénézuéliennes ont doublé en un an dans la maternité publique de Boa Vista, capitale de l'Etat frontalier de Roraima, dans le nord du Brésil, et les autorités s'inquiètent surtout de la gravité des problèmes de santé des mères.

"Ce ne sont jamais des patientes qui vont rester juste un ou deux jours. Il y a beaucoup de bébés prématurés et de mères diabétiques", explique à l'AFP Luiz Gustavo Araujo, directeur technique de l'hôpital Nossa Senhora de Nazaré, seule maternité publique de Roraima.

En 2017, cet établissement a accueilli 572 parturientes vénézuéliennes, contre 288 en 2016.

Le chiffre de l'an dernier ne représente que 6% des 9.342 accouchements dans la maternité, mais la tendance reste à la hausse.

En janvier dernier, 74 Vénézuéliennes y ont accouché, presque le double de janvier 2017. Au total, la maternité s'attend à voir naître près de 700 bébés originaires du pays voisin en 2018.

"Je suis venue parce que ce n'était pas possible d'avoir mon bébé au Venezuela, la situation du pays est de pire en pire. Comme j'ai eu des complications, nous serions mortes toutes les deux si j'étais restée", raconte Dayana Rodríguez, arrivée en novembre, enceinte de Sofia.

Cette adolescente de 17 ans est venue rejoindre une tante qui résidait déjà à Boa Vista.

Elle a eu des convulsions pendant l'accouchement et a dû passer deux semaines hospitalisées après sa césarienne.

À présent, Dayana ne pense pas retourner au Venezuela. Selon elle, sa fille "n'aurait pratiquement pas d'avenir là-bas".

- Augmentation de la mortalité -

Dans la maternité, les chambres sont spacieuses, propres, bien équipées et regroupent cinq femmes maximum, la plupart accompagnées d'un proche.

Dans une de ces chambres, Yulianny Vázquez, elle aussi âgée de 17 ans, est sur le point d'accoucher.

Originaire de Tigre, dans l'ouest du Venezuela, elle est arrivée au Brésil il y a quatre mois, enceinte de jumeaux. Elle n'avait eu aucun suivi médical dans son pays.

"Je suis venue à cause de la situation au Venezuela, j'avais peur d'y rester parce je n'avais aucun moyen d'avoir mes bébés là-bas, nous n'avons ni nourriture ni médicaments", explique Yulianny, se tordant de douleur sur son lit.

Selon Luiz Gustavo Araujo, les complications sont surtout dues à l'absence de suivi médical préalable qui pourrait détecter notamment des problèmes d'hypertension ou de diabète.

Sur les 572 accouchements de Vénézuéliennes recensées en 2017, 228 ont été considérés à haut risque, soit près de 40%.

"Des six décès recensés l'an dernier, deux étaient des Vénézuéliennes arrivées ici dans un état très grave", explique-t-il.

"Elles viennent ici à cause du manque de médicaments dans leur pays. Cela provoque une augmentation de nos dépenses, parce que nous ne nous attendions pas à recevoir ce type de population", ajoute le directeur.

- 'Tout s'est détérioré' -

Les autorités estiment à 40.000 le nombre de Vénézuéliens qui vivent à Boa Vista, la plupart dans des conditions insalubres.

"Avant, nous recevions de futures mères qui venaient de villes proches de la frontière, mais en ce moment certaines viennent de beaucoup plus loin, même de Caracas", explique le directeur de la maternité. La capitale vénézuélienne est située à 1.500 km de Boa Vista.

Eurimar Pérez, 36 ans, vient d'avoir son quatrième enfant. Ses trois premiers sont nés dans la ville frontalière de Santa Elena de Uairén.

Cette fois, elle a décidé de partir pour Boa Vista quelques semaines avant l'accouchement pour que sa fille naisse dans la maternité brésilienne.

"Les choses ont changé, tout s'est détérioré. Dans l'hôpital où j'ai eu mes autres enfants, il n'y a plus rien, plus de médecins, plus de médicaments. Je ne pouvais pas prendre le risque d'avoir mon bébé là-bas", explique-t-elle, au lendemain de sa césarienne.

À quelques mètres de là, dans la chambre qu'elle partage avec quatre autres mamans, Dayana tient la petite Sofia dans ses bras.

Quand on lui demande comment elle voit son avenir, elle regarde sa fille et dit, entre deux sanglots: "que ce soit au Brésil ou au Venezuela, je veux juste la voir grandir et lui donner ce que je n'ai jamais eu, une mère".

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