Partir ou rester ? Le dilemme des Européens au Royaume-Uni face au Brexit

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Par Anna CUENCA - Londres (AFP)
Publié le 10 novembre 2018 - 12:45
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L'infirmier et militant anti-Brexit espagnol Joan Pons Laplana le 31 octobre 2018 à Londres
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© TOLGA AKMEN / AFP
L'infirmier et militant anti-Brexit espagnol Joan Pons Laplana le 31 octobre 2018 à Londres
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Faire ses valises, ou bien demander le passeport britannique, rester et tenter d'arrêter cette "folie"? Les Européens installés au Royaume-Uni s'interrogent, face à l'imminence d'un Brexit qui bouleverse déjà leur vie.

Melanie Moerbe, une Allemande de 38 ans, vient tout juste de recevoir la nationalité britannique, à l'issue d'une cérémonie officielle à Manchester (ouest de l'Angleterre).

"Je suis très émue", confie cette femme arrivée au Royaume-Uni en 2003 pour devenir infirmière. "J'aime le Royaume-Uni. Toute ma vie et mes meilleurs amis sont ici et j'ai bien l'intention d'y rester", dit-elle.

C'est après avoir appris que l'Allemagne n'acceptait pas la double nationalité avec un pays extérieur à l'Union européenne que Melanie a entamé les démarches pour obtenir son passeport britannique, malgré un coût élevé, environ 1.500 livres (1.700 euros).

"Si je n'avais pas obtenu la nationalité britannique avant la date officielle du Brexit (...), j'aurais dû renoncer à mon passeport allemand pour avoir un passeport britannique."

- Réaliser un rêve -

Romeo Manciu envisage aussi de demander le précieux sésame. Ce Roumain de 37 ans est arrivé à Londres en août pour réaliser son "rêve": "travailler dans un aéroport".

"Et quel est le plus grand aéroport d'Europe? Heathrow !", s'exclame-t-il. "C'est le seul endroit où je sais qu'un avion atterrit ou décolle toutes les 45 secondes", ajoute-t-il plein d'enthousiasme.

Malgré son manque d'expérience, il a trouvé un emploi d'agent de piste et se prépare aujourd'hui à faire venir sa famille.

"Le Brexit n'est pas un problème", dit-il avec optimisme. "Quiconque arrivant avant le 29 mars (la date du Brexit, ndlr) peut demander un statut de résident, c'est pourquoi je suis venu avant."

- Bye bye UK -

Ce n'est pourtant pas aussi facile pour Barbara Lovatt, une Polonaise de 44 ans installée près de Birmingham (centre de l'Angleterre) depuis dix ans avec son mari, britannique, et son fils handicapé de 21 ans.

"J'ai demandé le statut de résident permanent à deux reprises, pour moi et mon fils, mais ça a été rejeté", raconte-t-elle.

"Bien que mon mari travaille, ils disent que je ne peux pas subvenir à mes besoins, parce que je reçois des allocations (pour aider son fils, ndlr)."

Barbara se sent mal à l'aise au Royaume-Uni, d'autant qu'elle a été licenciée en juillet du centre de visiteurs du brasseur chez qui elle travaillait.

La décision de quitter le pays s'est donc imposée. "L'année prochaine, nous partirons vivre à Chypre, où nous avons acheté une maison." Son mari est sûr de pouvoir y trouver du travail. "Et la vie est beaucoup, beaucoup moins chère."

- Le Brexit? Une 'folie' -

A Leeds (centre de l'Angleterre), Joan Pons Laplana, un Espagnol de 43 ans arrivé il y a 18 ans en Angleterre, employé dans le système de santé britannique (NHS), a reçu des offres d'emploi pour travailler dans d'autres pays mais ses trois enfants ne veulent pas quitter le Royaume-Uni, où ils sont nés.

"C'est pourquoi je suis toujours là et que je me bats pour pouvoir stopper le Brexit", déclare-t-il.

"J'espère que cette folie cessera", insiste-t-il, refusant d'accepter de devenir un "citoyen de seconde zone". "En l'état actuel des choses, je ne pourrai même pas voter aux élections municipales", se lamente-t-il.

Joan pensait prendre sa retraite au bord de la mer à Calella, au nord de Barcelone. "Mais maintenant on dit que si vous quittez l'Angleterre pour plus de cinq ans, vous ne pourrez pas revenir".

- "Protégée" -

"J'imagine que mon cas est différent parce que je suis arrivée il y a seulement un mois et demi (...) et j'ai le sentiment d'être protégée par mon entreprise, quoi qu'il arrive après le Brexit", explique l'Italienne Camilla Rigano, 24 ans.

Après un stage à Rome pour une agence de l'ONU, elle a trouvé en septembre un emploi au Royaume-Uni dans une société de gestion des crises et des risques.

"Je suis très, très heureuse de ce travail", dit-elle, affirmant qu'à son âge, elle n'aurait rien pu trouver de semblable en Italie.

Son projet? Rester quelques années à Londres avant de revenir en Italie avec "une solide expérience internationale". Ses parents étant à Rome et son frère à Madrid, elle craint toutefois que les nouvelles frontières qui apparaîtront après le Brexit ne compliquent les retrouvailles.

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