Le "Penelopegate" passe mal dans les rangs des collaborateurs parlementaires

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Par AFP
Publié le 02 février 2017 - 19:34
Mis à jour le 05 février 2017 - 01:45
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La statue de Marianne, emblème national de la Francen, devant l'Assemblée Nationale, le 18 juin 2012
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© JOEL SAGET / AFP/Archives
La statue de Marianne, emblème national de la Francen, devant l'Assemblée Nationale, le 18 juin 2012
© JOEL SAGET / AFP/Archives

Entre "agacement profond" et "colère" sourde, l'affaire des possibles emplois fictifs de la femme de François Fillon à l'Assemblée heurte une partie des collaborateurs parlementaires quant aux "fantasmes" sur leur travail et aux niveaux de rémunération cités.

L'affaire est "écoeurante pour ceux qui bossent, immorale sur le plan des montants financiers en jeu et injuste pour notre image de collaborateurs", lâche à l'AFP un collaborateur chevronné d'élus de l'opposition.

"Je vais mettre Le Canard enchaîné sur le bureau de mon patron et lui réclamer une augmentation!", sourit un collègue.

La plaisanterie traduit l'amertume de ces "petites mains", quand le salaire moyen des collaborateurs s'élève à quelque 2.800 euros brut d'après les syndicats, face aux montants avancés pour Penelope Fillon, jusqu'à 7.900 euros brut mensuels et 831.440 euros au total pour quinze années.

Qui plus est pour un travail dont la réalité est questionnée. Correction de discours, réception de personnes, représentation dans des manifestations ou "synthèse de la presse", a détaillé François Fillon, qui assure en avoir réuni les preuves.

Mais "le sentiment partagé par tous est: si on me demande de prouver que je travaille, je n'ai pas besoin de cinq heures d’auditions et d'un avocat mais d'un quart d'heure et d'un ordinateur", affirme Thierry Besnier, secrétaire général du Syndicat national des collaborateurs parlementaires-FO.

A Paris ou en circonscription, où sont basés les deux tiers des quelque 2.000 collaborateurs, certains ont des tâches de secrétariat, d'autres de rédaction ou de conseil politique, quand ils ne sont pas de véritables chefs de cabinet.

- Pas des "illuminati" -

Au sein de l'équipe parlementaire toutefois, "chacun est un couteau suisse" et doit rester "polyvalent", jusqu'à parfois "aller chercher une chemise au pressing", décrit Valentine Serino, rattachée à un élu LR, dans un billet beaucoup retweeté par des homologues. Elle y démonte avec ironie des visions faussées des collaborateurs, jusqu'à se demander s'ils seront pas bientôt présentés comme des "illuminati".

Les collaborateurs sont souvent recrutés dans le vivier des militants, mais pas seulement. Et on compte, selon des sources concordantes, une centaine de collaborateurs membres de la famille de leur député, recrutés pour leurs "compétences" ou leur "loyauté".

C'est un métier "passion", avec "des heures de travail qui ne veulent pas dire grand-chose", décrit Gonzague de Chanterac, représentant CFTC et collaborateur d'un député LR, en s'exclamant: "Non, nous ne sommes pas des petits marquis fonctionnaires à 15.000 euros par mois!"

Au Sénat aussi, certains en ont "marre de ces histoires d'épouse, d'enfants", lâche l'assistante d'un sénateur UDI, Anne Beinier, ni syndiquée ni encartée. "Ça fait beaucoup de mal à la profession. On est les hommes et les femmes de l'ombre, c'est la règle, mais avec tout ce qui se passe, ce serait bien de rétablir le contexte", juge-t-elle.

Aux Palais Bourbon et du Luxembourg, ce qui préoccupait nombre de collaborateurs ces dernières semaines était leur sort après les futures législatives et sénatoriales, près de 1.300 globalement risquant d'être licenciés cette année. Leurs syndicats revendiquent le cadre de licenciements économiques, et non pour motif personnel comme jusqu'alors.

Un accord collectif a été approuvé fin 2016 à l'Assemblée, embryon d'un statut jusqu'alors inexistant, et prévoyant une prime de précarité en fin de mandat.

"C'est au moment où on essaie de cadrer les choses qu'on dit qu'on est payé gras et qu'on fout rien", déplore un des acteurs de la négociation.

"Nous ne sommes pas Penelope", mais des salariés "employés par des TPE", et "nous payons nos impôts, nous n’avons pas de voiture de fonction, etc.", a clamé dans une tribune le SNCP-FO, jugeant "urgent" un "réel statut".

Et interdire les emplois familiaux, comme au Parlement européen et comme l'ont suggéré certains à gauche dans le sillage du "Penelopegate"? "Une des pistes de travail" pour ce syndicat.

La question est hautement sensible, alors que les couloirs du Parlement bruissent de noms, à droite comme à gauche, et que certains s'apprêteraient à démissionner par anticipation, selon une source syndicale.

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