Que disent les données de mortalité d’EuroMomo ?

Auteur(s)
Patrice Taravel et Xavier Azalbert, pour FranceSoir
Publié le 06 septembre 2022 - 18:45
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Vaccin
Crédits
FREDERIC J. BROWN / AFP
FREDERIC J. BROWN / AFP

ANALYSE - Le site EuroMomo.eu (contraction de European mortality monitoring qui se traduit en français par surveillance de la mortalité européenne), un réseau statistique qui compile les statistiques de la mortalité dans 24 pays ou régions fédérales d'Europe, dont la France, publie depuis le début de la pandémie des données sur la crise sanitaire, qui sont standardisées afin de les rendre comparables.

Comme pour les analyses des données de la DREES, l’objectif de cet article (données en date du 4 septembre 2022) n’est pas tant de savoir si ces données sont correctes ou pas, mais d’en faire une représentation graphique quelque peu différente. Cela permet de montrer qu’il est possible de fournir une interprétation facile à comprendre.

De nombreux commentaires de ces données ont été déjà publiés sur les réseaux sociaux ou dans les journaux. L’objet de cet article est donc d’en proposer une méthode et une représentation, peut-être, plus facilement compréhensible.

Une analyse plus technique peut être consultée dans l'article Surmortalité en Europe chez les jeunes depuis cet été de Pierre Lecot pour FranceSoir. De plus, l’article Rapport vaccinés/non vaccinés, utilisant d’autres données, apporte des conclusions se rapprochant de celles publiées ci-après.

Ce qu'il faut retenir

Les classes d'âge 0-14 ans et 15-44 ans présentent une plus forte augmentation de la mortalité que les autres tranches d'âge pour l'année 2022 par rapport aux années précédentes.
Pour ces deux tranches d'âge, l'année 2022 semble la plus critique, alors que presque toute la population est vaccinée et que les variants sont dits beaucoup moins délétères que la souche originale. Ces tranches d’âge sont d’intérêt capital pour la reproduction de notre espèce, notamment dans un pays ayant fait le choix d’un modèle de retraite par répartition (les jeunes contribuent pour payer les retraites).
Eu égard à cette augmentation de la mortalité, la politique vaccinale comme unique méthode de traitement, ne devrait-elle pas sérieusement être reconsidérée ? A minima, un audit devrait se tenir.

Pour ce qui est des tranches d'âge supérieures, s'il semble acquis que le virus crée une surmortalité, il serait donc raisonnable de questionner l'efficacité des vaccins. Cependant, il faudra pondérer cette analyse par l’absence de soin, qui peut fortement contribuer à la surmortalité.

Il est cependant critique de faire ces analyses par tranche d’âge plus fine (de cinq ou dix ans comme présenté dans de nombreuses études sur la démographie) et de la relier à l’espérance de vie, une donnée démographique calculée en série longue par l’Insee. L’INED (Institut national des études démographiques publie les taux de mortalité par tranche d’âge et sexe. Pour que l’analyse soit exhaustive, interprétable, et présente un intérêt pour le décideur, il est essentiel qu’elle soit effectuée à partir des données de mortalité toutes causes. Ces informations ont été demandées sans succès depuis plusieurs mois par le chercheur Laurent Toubiana, un appel relayé par la sénatrice Laurence Muller-Bronn. Seule cette analyse permettrait d’avoir des mesures comparables et de conclure de manière éclairée.

Introduction

Le site EuroMomopublie un indicateur de surmortalité constaté durant les années 2019, 2020, 2021 et 2022 pour plusieurs tranches d'âge et pour l'ensemble des 29 pays enregistrés.

Comprendre le terme de surmortalité

La surmortalité se calcule par déduction de deux indicateurs.

Par exemple, la tranche d'âge 15-44 ans pour la semaine 15 de l'année 2020. La surmortalité est la valeur comprise entre les deux flèches rouges sur le graphique. C'est donc la soustraction du nombre de décès observés moins le nombre de décès attendu à une date donnée.

·       Le nombre de décès observés  (courbe bleue)2.

·       La ligne de base qui correspond au nombre de décès normalement attendu  (courbe pointillée grise)3.

Nous observons que si le nombre de décès observés est en dessous de la ligne de base, nous avons affaire à une sous-mortalité, sinon, c'est une surmortalité.
Cette surmortalité ou sous-mortalité est une valeur très théorique puisqu'elle dépend de la ligne de base qui, elle, est théorique, puisqu'elle dépend d'un calcul. C'est pour cela que seuls les écarts entre plusieurs années sont retenus.

Dans l'exemple ci-dessus, cette valeur de surmortalité est valide uniquement pour la semaine 15 de 2020.
Si nous voulons connaître la progression de la surmortalité tout au long de l'année, il suffit d'ajouter la somme des surmortalités des semaines précédentes, illustrée dans le graphique suivant :

Instinctivement, on pourrait croire que cette courbe, par exemple, la jaune, devrait toujours croître.
Il faut penser que chaque point de cette courbe est le résultat d'une soustraction, donc un résultat possiblement négatif (sous-mortalité) et d'une addition avec la somme des valeurs précédentes. Par conséquent, lorsqu'il y a sous-mortalité, la courbe peut décroître.

Résultats

Examinons les résultats pour plusieurs tranches d'âge avec 2019 comme année de référence.

Pour les 0-14 ans

Pour 2020, la courbe de surmortalités est très en dessous de l'année 2019. En sus, on observe une sous-mortalité importante à partir de la semaine 15.

La courbe de surmortalité de l'année 2021 commence très en dessous de celle de l'année 2019, en fait plus bas que celle de 2020, mais croise celle-ci aux alentours de la semaine 28. Elle rattrape celle de l'année 2019 autour de la semaine 46. Pour rappel, la vaccination des plus de 12 ans débute en France4 le 15 juin 2021, soit la semaine 24.

La courbe de 2022 est toujours au-dessus de celles de 2020 et 2021. La croissance est très légèrement plus supérieure à celle de 2021. Pour rappel, la vaccination des plus de 5 ans débute en France le 31 décembre 20214, mais le nombre des vaccinés de moins de 12 ans est très faible, en France. La partie inquiétante pour cette année, est la croissance continue depuis le début. Ici pas de décroissance et pas de palier.

15-44 ans

La surmortalité par rapport à l'année 2019, est supérieure pour toutes les années suivantes.

Les années 2021 et 2022 enregistrent une surmortalité plus grande que 2020, année qui correspond à la souche primaire du virus, dite la plus dangereuse. Il est quand même particulier de constater que malgré un virus dit moins délétère et le début de la vaccination des plus de 18 ans, commencée en France le 30 mai 2021 (semaine 21)4,  la surmortalité de cette tranche d'âge soit supérieure à l'année 2020.

45-64 ans

Pratiquement le même constat que précédemment. Mais comment est-il possible que la surmortalité en 2021 soit supérieure à celle de 2020 ? On constate plus de décès en 2021 qu'en 2020, et ce, malgré la mise en place de la vaccination des plus de 50 ans, en France, aux alentours du 19 février 20214 et des variants moins agressifs que la souche primaire apparue fin 2019.

La courbe de 2022 rattrape celle de 2020 aux alentours de la semaine 30. Un effet dose de rappel est-il envisageable ? À partir de ces données seules, il est impossible de l’affirmer.

65-74 ans

L’arrangement des courbes est similaire à celles des 45-64 ans. Les observations sont donc identiques pour ces deux tranches d’âge 45-64 ans et 55-74 ans.

75-84 ans

Égalité pour toutes les années Covid-19. On peut conclure qu’il y a quelque chose qui affecte cette tranche d’âge et les « fait mourir », mais rien ne les soigne. Pourrait-on imputer cela à l'absence de soins ? La vaccination dans cette tranche d’âge ne semble avoir aucune une influence.
Le SARS-CoV2 accélèrerait l’âge biologique, article d’un groupe de scientifique, propose des hypothèses et explications plus complètes (publication le 30 août 2021).

Plus de 85 ans

L'année 2020, présente une claire surmortalité probablement induite par la Covid-19.

L'année 2021 affiche une régression très nette de la surmortalité. Elle peut être attribuée à la vaccination et/ou à une moindre virulence du virus. Toutefois, à partir de la semaine 30, la surmortalité repart à la hausse.

L'année 2022 semble rattraper l'année 2020. Est-Il possible d'y voir l'effet de l'accumulation des doses de vaccins sachant que pour l'année 2022, nous sommes toujours avec un virus à très faible létalité ?

Notes et références

Il ne faut pas se laisser influencer par la forme des graphiques. Pour le graphique des 0-14 ans d'EuroMomo (figure ci-dessous), on peut « croire » que la surmortalité en 2022 n'est pas si grande que cela par rapport à celle de 2019. 

En y regardant bien, on voit que pour la semaine 34 de 2019, on atteint une surmortalité de 525. Pour l'année 2022, on atteint 854. Ce qui représente tout de même une différence de 329 décès. Sois environ 63% de plus.

1.     https://www.euromomo.eu/how-it-works/background-data

2.     https://www.euromomo.eu/how-it-works/methods/, https://www.euromomo.eu/how-it-works/rationale/, https://www.euromomo.eu/how-it-works/background-data

3.     https://www.euromomo.eu/how-it-works/methods

4.     https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/vaccin/covid-19-on-vous-resume-la-premiere-annee-de-campagne-de-vaccination-en-france-en-neuf-actes_4894643.htm

 

Patrice Taravel est scientifique (ancien ingénieur au CNRS) et informaticien.

Mathématicien et économiste de formation, Xavier Azalbert est le directeur de la publication de FranceSoir.

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