Séparation des pouvoirs : Le Conseil de l'Europe prend en grippe le 49.3

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France-Soir
Publié le 14 juin 2023 - 17:30
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Élisabeth Borne, à l'Assemblé nationale le 6 juillet 2022
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F. Froger / Z9, pour FranceSoir
Élisabeth Borne, à l'Assemblée nationale le 6 juillet 2022.
F. Froger / Z9, pour FranceSoir

DÉPÊCHE — Mercredi 14 juin, le Conseil de l'Europe a pris en grippe l'article 49.3 de la Constitution française, soulignant qu'il "soulève des interrogations au regard de la séparation des pouvoirs". L'institution prévoit d'étudier les alternatives envisageables, notamment chez nos voisins européens, avant de rendre sa conclusion.

Difficile de ne pas avoir entendu parler de lui, tant il fait couler d'encre. Il est à la fois joker pour un gouvernement chancelant, et "déni de démocratie" pour les oppositions. En bref, l'article 49.3 permet au gouvernement de survoler l'habituelle navette parlementaire pour adopter un projet ou une proposition de loi sans vote. Seule une motion de censure, déposée dans les 24 heures et signée par au moins un dixième des membres de l'Assemblée nationale, peut contrer cette procédure.

Utilisé cent fois depuis sa création, en 1958, cet article a été dégainé pas moins de onze fois par l'actuelle Première ministre Élisabeth Borne. Ce score la place en deuxième position dans le classement des chefs de gouvernement qui ont le plus eu recours au 49.3, derrière l'indétrônable Michel Rocard (28 fois en trois ans). Avant elle, Édouard Philippe ne s'en était servi qu'une seule fois.

Au total, Élisabeth Borne l'a utilisé dix fois pour le projet de loi de finances, notamment relatif à la sécurité sociale, et une fois pour faire passer la décriée réforme des retraites. C'est cette dernière occurrence de mars 2023 qui a fait bondir députés et citoyens, et enflammé Paris.

Lire aussi : Sur le vif : 49.3, Paris brûle-t-il ?

Aujourd'hui, la Commission de Venise, groupe consultatif du Conseil de l'Europe apportant aux États des avis juridiques sur des projets de lois ou des textes déjà en vigueur, estime que ce dispositif "soulève des interrogations au regard des principes du pluralisme, de la séparation des pouvoirs et de la souveraineté du législateur".

Cet article constitue selon elle une "ingérence significative de l'exécutif dans les pouvoirs et le rôle du pouvoir législatif", et "ne représente pas une forme de délégation, mais plutôt un pouvoir législatif autonome entre les mains de l'exécutif". La Commission souligne par ailleurs que cette inversion des rôles se fait "d'une manière apparemment inégalée par rapport aux autres pays européens". Enfin, les auteurs de ce rapport critiquent le contrôle du Conseil constitutionnel, qui vérifie seulement le "strict respect de la procédure", plutôt que de garantir la "suprématie du pouvoir législatif".

Pour toutes ces raisons, comme le rapporte l'AFP, le groupe de travail va réaliser une "analyse comparative" des dispositifs qui permettent aux gouvernements "d'intervenir dans les pouvoirs législatifs des parlements" des autres pays européens, avant de publier ses conclusions définitives.

Toujours prompts à suivre les directives européennes, Emmanuel Macron et son gouvernement changeront-ils leur fusil d'épaule si l'article 49.3 venait à être dénoncé ?

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