Cannabis : un rapport préconise de remplacer la prison par une contravention pour les consommateurs

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 11 août 2016 - 20:03
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De la résine de cannabis.
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©Jon Santa Cruz/Sipa
Une centaine de peines d'emprisonnement ont été prononcée en 2015.
©Jon Santa Cruz/Sipa
La consommation de cannabis est aujourd'hui punie par une peine de prison, dans les faits rarement appliqué. Un groupe de travail a rendu un rapport au gouvernement proposant d'effacer de la loi le risque d'incarcération, pour ne garder que la contravention.

Un groupe de travail de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) a proposé de remplacer par une contravention et une amende la peine d'un an de prison prévue pour usage de cannabis.

Ce rapport, dont l'AFP s'est procuré une copie, a été élaboré par des représentants des ministères de l'Intérieur, de la Justice, des Finances (douane) et de la Santé.

Commandé en juillet 2015 par Manuel Valls, il lui a été remis en décembre de la même année, sans effet jusqu'à présent, note jeudi le quotidien Le Monde, qui a le premier fait état de ce rapport.

Les experts du groupe de travail ont proposé des pistes de réforme de la réponse pénale, la situation actuelle conjuguant un "caractère globalement peu dissuasif pour les consommateurs (faible risque pénal) et une lourdeur de la procédure pour les enquêteurs", tout en restant dans le cadre du maintien de l'interdit de l'usage de drogue.

"Le gouvernement n'écarte pas le débat", mais pour autant il "n'entend pas agir dans la précipitation", fait-on savoir au ministère de la Justice. Lequel défend le principe d'une "double approche, conjuguant la prévention et la répression".

"On peut considérer que plus d'un million d'heures de travail seraient aujourd'hui dédiées par les policiers et les militaires de la gendarmerie aux procédures diligentées contre les usagers", ont-ils jugé, ajoutant qu'au "regard des contraintes opérationnelles et matérielles", "un nombre important d'infractions constatées par les policiers et les gendarmes ne fait l'objet, en fonction des circonstances, d'aucune procédure", ce qui contribue "au renforcement du sentiment d'impunité des usagers".

Le cannabis est prohibé depuis 1970, avec au maximum un an de prison et 3.750 euros d'amende en cas d'usage, dix ans d'emprisonnement et 7,5 millions d'euros d'amende en cas de possession.

Si l'esprit de la loi est de poursuivre pour détention les personnes soupçonnées de trafic, aucune quantité minimale n'étant définie pour distinguer l'usage de la possession, il est possible de poursuivre pour détention de stupéfiants même pour une très faible quantité. Dans la pratique, si l'emprisonnement pour usage est exceptionnel, les amendes perdurent.

En 2014, 170.126 usagers de drogue (en très grande majorité du cannabis) ont été interpellés en métropole, mais seulement 102.871 faits d'usage ont été traités, avec 40.900 rappels à la loi et seulement 33.645 condamnations en 2013 (dont une centaine de peines d'emprisonnement) soulignent les auteurs du rapport.

Et pour la direction générale de la Santé, "l'incarcération lorsqu'elle est prononcée est un facteur d'aggravation des problèmes d'addiction aux drogues".

Parmi les évolutions possibles, les participants au groupe de travail ont privilégié la solution d'une contravention, avec une amende forfaitaire entrainant extinction de l'action publique pour les personnes majeures primo-délinquantes, et une réponse pénale individualisée pour les mineurs et les personnes réitérantes.

En France, en 2014, 17 millions de personnes déclaraient avoir déjà pris du cannabis dans leur vie et 700.000 en consommaient quotidiennement, selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies.

A plusieurs reprises, une éventuelle dépénalisation ou "contraventionnalisation" du cannabis a été évoquée dans le débat public.

En février 2015, des sénateurs écologistes avaient mis sur pied une proposition de loi pour autoriser l'usage et la vente contrôlée par l'Etat du cannabis. L'initiative est rejetée en avril par les sénateurs.

En octobre 2012, alors ministre de l'Education, Vincent Peillon s'était prononcé pour un débat sur la dépénalisation du cannabis, avant d'être rappelé à l'ordre par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault.

En 2003 et en 2007, avant son élection à la présidence, Nicolas Sarkozy avait assuré qu'il allait proposer la "contraventionnalisation", une promesse restée lettre morte.

Selon une étude réalisée en décembre 2014 par un groupe de réflexion proche du PS, Terra Nova, une légalisation dans le cadre d'un monopole public rapporterait 1,8 milliard d'euros à l'Etat par an.

 

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