Menace terroriste : le gouvernement revoit la prise en charge des détenus radicalisés

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 25 octobre 2016 - 21:17
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Jean-Jacques Urvoas, président de la Commission des lois à l'Assemblée nationale.
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Pour Jean-Jacques Urvoas, ce qui est importe, c'est "le désengagement de la violence".
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A quelques mois de la présidentielle, le gouvernement veut revoir la prise en charge des détenus radicalisés, toujours plus nombreux. Place à un système orchestré au niveau national, qui combine isolement des profils dangereux et prise en charge spécifique des détenus radicalisés "susceptibles d'évoluer", a expliqué le garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas lors d'une conférence de presse ce mardi.

Isolement des plus dangereux, dispersion des autres après évaluation, et fin de l'ambition de "déradicalisation" en prison: le gouvernement revoit de fond en comble la prise en charge des détenus radicalisés, toujours plus nombreux. Lors d'une conférence de presse, le garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas a donné le ton ce mardi 25: "Je n'utilise pas le terme de déradicalisation, je ne crois pas qu'on puisse inventer un vaccin contre cette tentation". Ce qui lui importe, c'est le "désengagement de la violence", a-t-il ajouté, quelques semaines après l'agression de deux surveillants à Osny (Val d'Oise) par un détenu placé dans une "unité dédiée". Exit justement ces "unités dédiées" ou "unités de prévention de la radicalisation" expérimentées à Fresnes, Fleury-Mérogis et Osny, près de Paris, et à Lille-Annoeullin. Place à un système orchestré au niveau national, qui combine isolement des profils dangereux et prise en charge spécifique des détenus radicalisés "susceptibles d'évoluer". Qui dit nouveau dispositif, dit nouveaux acronymes : "QDV" et "QER".

Le gouvernement va créer six "quartiers pour détenus violents" (QDV), de 290 places au total, avec un régime de détention durci (fouilles fréquentes, changements de cellules, isolement relatif). Viennent ensuite six "quartiers d'évaluation de la radicalisation" (QER), quatre en région parisienne, un dans la région de Bordeaux, et un dans la région de Marseille. Cent-vingt détenus seront placés dans ces QER, pour une période de quatre mois, avant d'être éventuellement aiguillés vers l'un des 27 établissements où sera mise en place une "prise en charge spécifique".

Un dispositif spécial, d'une centaine de places au total, sera mis en place pour les femmes radicalisées, avec une évaluation organisée à Fleury-Mérogis. Tout en promettant de préserver l'approche pluridisciplinaire avec psychologues, éducateurs et universitaires développée dans les "unités dédiées", M. Urvoas a regretté que du temps ait été "perdu" avec ces expérimentations hétéroclites, alors que le nombre de détenus radicalisés flambe.

Quelque 349 personnes, déjà condamnées ou en attente de procès, sont détenues en France pour des infractions ou crimes à caractère terroriste, contre 90 en 2014. Au total, les prisons françaises comptent actuellement 1.336 détenus considérés comme radicalisés, deux fois plus que l'an dernier à la même date. A quelques mois de la présidentielle et après avoir mis sur les rails un programme de construction de prisons, M. Urvoas a annoncé une remise à plat de la sécurité dans les lieux de détention, souvent surpeuplés et où les conditions de vie sont parfois très difficiles.

Depuis le début de l'année, la cellule de crise du ministère en cas d'incidents sérieux en prison a été activée à six reprises. Une sous-direction consacrée à la sécurité verra le jour. Les agents qui accompagnent des détenus à l'extérieur, par exemple pour des soins, seront désormais armés. Le "renseignement pénitentiaire" doit être renforcé, avec 51 recrutements. "On abandonne la philosophie angélique, on acte que la déradicalisation ça n'existe pas", se félicite Jean-François Forget, secrétaire de l'Ufap-Unsa, syndicat majoritaire chez les surveillants.

Alexis Grandhaie, pour la CGT Pénitentiaire, reconnaît au gouvernement le mérite de chercher une troisième voie "entre la tentation d'un Guantanamo à la française et la dissémination totale". Mais il s'inquiète à propos de la détection des détenus radicalisés: "A défaut d'organiser une formation sérieuse, on crée une grille avec des cases à cocher, les agents se transforment en statisticiens. Pour ne pas prendre de risques, ils vont ouvrir le parapluie très grand". Or à vouloir surveiller tout le monde, on risque de ne plus surveiller personne, fait valoir M. Grandhaie.

 

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