La Roumanie appelle à son tour à anticiper un conflit armé avec la Russie, Moscou dénonce une “hystérie militaire”

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France-Soir
Publié le 12 février 2024 - 11:49
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Daniel Mihailescu / AFP
Parade de troupes roumaines à Bucarest le 1er décembre 2022, jour de la fête nationale.
Daniel Mihailescu / AFP

MONDE - Un vent de panique souffle sur les pays de l’Europe. Après la Belgique, la Suède et la Pologne, sans omettre l’Allemagne et le Royaume-Uni, c’est au tour de la Roumanie de faire part de ses préoccupations quant à un éventuel conflit armée direct avec la Russie. Le chef d'état-major de la Défense roumaine, Gheorghiță Vlad, estime que Moscou ne s’arrêtera pas en cas de victoire en Ukraine et la Moldavie ainsi que les Balkans occidentaux seraient en ligne de mire. Il affirme que ni l’OTAN et encore moins son pays ne sont prêts pour cette potentielle confrontation directe. “La Russie n’est pas une menace”, réagit le Kremlin, qui dénonce une “hystérie militaire” en Europe.

Les multiples avertissements de hauts responsables militaires de pays membres de l’OTAN sonnent comme un clairon de mobilisation générale. Si les appels de l’Alliance atlantique à se préparer à une “confrontation directe” avec Moscou datent de l’invasion russe de l’Ukraine, les avertissements se font de plus en plus insistants ces dernières semaines. Le 7 janvier dernier, Carl-Oskar Bohlin, ministre de la Défense civile de Suède, a évoqué la menace qui planerait sur les pays voisins de la Russie. "Pour une nation qui a connu la paix comme un compagnon agréable pendant près de 210 ans, l’idée qu’elle est une constante inébranlable de la vie est commode. Mais se reposer sur cette conclusion est devenu plus dangereux qu'il ne l'a été depuis très longtemps”, dit-il.

Panique à bord ou effet d’annonce ?

Quelques jours après lui, le chef d’état-major britannique, Patrick Sanders, a souligné le besoin d’une “armée organisée pour grossir rapidement”. Il a appelé à "entraîner et équiper une armée de citoyens" face aux risques de conflit. "Nous devons être capables de combattre et de gagner de manière crédible des guerres terrestres" et pas seulement dans les airs et en mer, a-t-il déclaré. "L'Ukraine illustre le fait que les armées régulières commencent les guerres, les armées de citoyens les gagnent".

Au même moment, c’est Boris Pistorius, ministre allemand de la Défense, qui se montre encore plus alarmant, en affirmant que Vladimir Poutine pourrait attaquer l’OTAN d’ici “cinq à huit ans”. “Nous entendons des menaces du Kremlin presque tous les jours (...). Nous devons donc tenir compte du fait que Vladimir Poutine pourrait même attaquer un jour un pays de l'OTAN (...). Nous devons aussi réapprendre à vivre avec le danger”, a-t-il déclaré. 

Le président du comité militaire de l’Alliance, Rob Bauer, dit se préparer à une éventuelle guerre entre l’OTAN et la Russie dans les 20 prochaines années : “Nous nous préparons à un conflit avec la Russie. Nous ne cherchons pas à entrer en conflit, mais s'ils nous attaquent, nous devons être prêts.”

La Pologne n’est pas en reste et son ministre de la Défense, Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, déclare Varsovie “prête” à se défendre contre une agression militaire russe “dans tous les scénarios”. Ceux-ci “sont possibles et je prends le pire très au sérieux... C'est le rôle d'un ministre de la Défense dans les circonstances actuelles... Nous devons être prêts à tout”.

Un discours identique qui s’est propagé en Roumanie, où le chef de l’État-major de la Défense, Gheorghiță Vlad, avertit contre un conflit armé avec Moscou. Dans une interview à la radio Europa Liberă România, il explique que son pays n’était pas prêt, appelant à prendre au sérieux cette “menace” : “Personnellement, et pas nécessairement en tant que militaire, je pense que la Russie ne s’arrêtera pas là. Si elle gagne en Ukraine, la cible principale sera la Moldavie. Nous assisterons à des tensions dans les Balkans occidentaux. Je suis plus que convaincu que la politique du président Poutine va s'intensifier dans un avenir immédiat.”

Il estime que “la population de la Roumanie, comme toute la population de l’Union européenne, de l’Europe, doit être préoccupée et nous devons adopter les mesures appropriées pour nous préparer”. Cette préparation doit concerner son armée comme celles des pays membres de l’OTAN et doit consister dans la reconstitution des stocks et dans la prise de conscience de la société du danger.

L’OTAN et son “hystérie militaire”

Gheorghiță Vlad appelle même la société à faire preuve de “résilience”, afin “de poursuivre l’effort de guerre”. Il plaide, à ce propos, pour un retour de la conscription, dont la suppression, en Roumanie comme dans les autres pays européens, “a entraîné un déficit” d’effectifs militaires. Il évoque un projet de loi du ministère de la Défense nationale, visant à introduire le service militaire volontaire : “Nous avons une réserve opérationnelle vieillissante, nous n'avons pas de programmes cohérents pour la formation de la population (...) je le répète, nous devons avoir une population préparée et une société résiliente”.

Un discours entonné en chœur qui rappelle celui imposé par l’Europe et ses autres alliés occidentaux et dicté par le cabinet McKinsey durant la pandémie de Covid. En tout cas, la Russie n’a pas tardé à réagir aux avertissements transatlantiques. Le porte-parole du Kremlin, Dmitry Peskov, avait déjà profité de la tenue de l’exercice militaire Steadfast Defender 2024, impliquant 90 000 membres de 31 pays alliés et de la Suède, pour répliquer aux discours des hauts responsables européens.

Il a rappelé que Moscou considérait aussi l’OTAN comme une menace et prend des mesures pour se protéger : “Bien sûr, c'est une menace pour nous, c'est ainsi que nous la traitons et nous prenons constamment les mesures appropriées pour y faire face. L'alliance déplace sans cesse ses infrastructures militaires vers nos frontières depuis plusieurs décennies".

A propos de Gheorghiță Vlad, c’est Valery Kuzmin, ambassadeur russe à Bucarest, qui a affirmé que “la Russie n’était pas une menace". Il a averti la Roumanie contre “certaines conséquences” compte tenu des commentaires sur le service militaire et l’accueil de troupes de l’OTAN sur son territoire. Il estime que les déclarations du chef de l'armée roumaine favorise "l'hystérie militaire".

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