Les enjeux de demain : L’or, toujours une valeur refuge ?

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Yan Labêche pour FranceSoir
Publié le 10 février 2021 - 09:59
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L’or, toujours une valeur refuge ?
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Comme dirait Roger Gicquel, « la France a peur » ! Avec la crise sanitaire, les craintes dans l’économie s’accroissent. L’épargne se distille dorénavant entre nouveautés comme le bitcoin ou des valeurs sûres comme le livret A, l’immobilier ou les métaux précieux. Parmi la valeur préférée des Français, l’or qui culmine dorénavant à 50 000 euros le lingot d’un kilo.

 

Le PDG de Goldmarket.fr et expert en négoce de métaux précieux et pièces de monnaie, Rafik Makhlouf est sur un bon filon. Pour lui, il faut miser sur l’or. « On a une augmentation de 400% du prix en 20 ans et ce n’est pas prêt de se tarir. » En effet, comme lors des précédentes crises et notamment celles des subprimes de 2007, on revient à des valeurs sûres pour ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier. L’attrait pour le métal jaune trouve ses sources dans cette volonté de se rassurer. « On parle de 3000 tonnes d’or dans les tiroirs des Français, soit près de 200 milliards d’euros. On est sur le même niveau que l’assurance-vie. Les Français aiment ce produit car il est classé second produit d’investissement après l’immobilier. On n’a pas trouvé de remplaçant à l’or ! »

 

Autre avantage certain : la fiscalité de l’or. Il n’est pas considéré comme un revenu. Il n’y a pas de TVA sur l’achat d’or. Aucune imposition n’est exigible et à la revente, seule une taxe de 11,5% est applicable sur le montant brut de la vente. Un produit dont l’attrait est presque aussi vieux que le monde. « Les pièces de monnaie, les créséides inventées par Crésus, existent depuis le 6ème siècle avant Jésus-Christ. Le maitre mot de ce marché est la stabilité. La production n’augmente pas beaucoup alors que la demande est à la hausse. C’est ce qui explique sa montée en puissance en ce moment.»

 

Produire n’est pas détenir !

Cet attrait pour le métal jaune est normal quand on sait que tout l’or du monde représente un cube de 30 mètres sur 30 ! Les Etats qui en possèdent les plus grandes réserves sont les Etats-Unis (8100 tonnes), l’Allemagne (3300 t), l’Italie (2450 t), la France (2430 t) et la Russie (2300 t). Il sert de garanties pour les emprunts.  Du coté de la production, on retrouve le Canada, l’Australie et le continent africain. Un marché particulier où ceux qui détiennent l’or ne sont pas forcément les producteurs. « L’or d’Afrique est vendu en Europe, à Dubaï ou en Asie. Les plus gros acheteurs d’or sont les chinois et les indiens, notamment au moment des fêtes de Diwali et Dhanteras. Si les Africains gardaient leur or, ils seraient plus riches et surtout la crédibilité de leur Etat y gagnerait pour emprunter sur les marchés financiers. Seul l’Afrique du Sud conserve un peu de son or. »

 

Pour subir la « fièvre de l’or », il faut de grands investissements dans des mines énormes qui ont des conséquences sur l’environnement (utilisation du mercure, destruction de la biodiversité) et peuvent dans certains cas, provenir du travail des enfants ou de situations de conflits. « Chaque année, il y a 2000 tonnes produits. Ca n’augmente pas car on ne trouve pas de mines rentables. Il ne risque pas d’y avoir de découverte phénoménale. L’or « sale » est vendu dans des pays qui ne sont pas regardants sur la provenance, comme cela peut être le cas à Dubaï ou en Asie.»

 

Un marché sain et règlementé en France

L’or « sale » fait dorénavant partie aussi de la communication des grandes marques de luxe. De plus en plus vigilantes, elles ne veulent plus avoir à faire avec un métal qui peut leur causer des problèmes d’images. « Des grandes marques de montre comme Cartier, Rolex ou Mauboussin, veulent avoir une traçabilité, comme nous, sur l’origine. Le marché de l’or recyclé reste stable. On est sur des prix presque identiques mais la certification coûte un peu plus cher.»

 

Installée en France, la société Goldmarket.fr est dans le top ten des négoces de métaux précieux, travaillant en grande majorité avec de l’or recyclé. Elle fabrique elle-même ses lingots en Allemagne ou en Suisse mais pas en France « où le savoir-faire de la fonderie s’est perdu. ». Fier d’être en France, Rafik Makhlouf estime que l’Hexagone présente un gage de sécurité et de sureté. « Le marché est très réglementé en France. Il faut des agréments des douanes, de l’autorité du contrôle prudentiel et de résolution (Banque de France) mais aussi des autorités de sécurité publique (gendarmerie ou police). Il faut une pièce d’identité, des factures et des justificatifs de l’origine des fonds. Pour notre part, on ne vend pas d’or des mines. On travaille sur de l’or issu d’un commerce équitable ou de recyclage. En effet, tous les produits (téléphone, voiture, etc..) en contiennent car c’est un très bon conducteur. Dans notre cas, il s’agit de bijoux recyclés ou du métal tracé par nos fournisseurs. »

 

La folie du palladium, la baisse des pierres précieuses

Si l’or continue à faire cavalier seul, quelques métaux précieux font de plus en plus leur apparition. C’est le cas de l’argent qui concerne les petits investisseurs, le platine ou le palladium pour des connaisseurs du marché. « Le palladium est utilisé dans les voitures électriques et les laboratoires pharmaceutiques. Il y a quelques années, il se négociait à 1000 euros. Dorénavant, on est sur du 60000 euros ! Sinon, les courbes des métaux sont à peu près identiques à celles de l’or. La différence est que l’argent est beaucoup plus présent que l’or dans la nature. 1 kilo d’argent coute 700 euros, alors que l’or est aux alentours de 50 000 euros. »

 

Autre possible concurrent de la valeur refuge, les pierres précieuses. Toutefois, Rafik Makhlouf en est moins sûr à cause d’un changement opéré sur le marché des diamants, à Anvers. « Le marché des diamants était tenu jusqu’à présent par les juifs orthodoxes qui en fixaient les prix. Ils ont passé la main à leurs anciens contremaitres indiens. Le cours a alors baissé d’autant que ce sont des matières difficiles à travailler. »

 

Pour Rafik Makhlouf, une seule épargne sûre reste en ligne de mire : l’or. « Les banques ont pu faire faillite. Des comptes de particuliers ont pu être bloqués comme c’est arrivé au Liban, en Grèce ou à Chypre, indique le trentenaire. Les gens ont envie d’avoir quelque chose qui les protège chez eux. Je n’ai pas trouvé d’équivalent à l’or qui puisse être échangé dans le monde entier. ».  Le patron de Goldmarket a créé sa propre affaire dans le monde très fermé des négoces familiaux. Très impliqué dans le phygital (combinaison de numérique de magasin physique), il voit l’avenir sur ce terrain-là. « Quand on m’a dit que des gens vendaient et achetaient de l’or sur le web, il y a cinq and, je n’y ai pas cru. C’est faisable. J’en suis la preuve ! ».

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