Pesticides : manifestation d'agriculteurs devant le Conseil d'Etat, de nombreuses gardes à vue

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Par Emmanuel PEUCHOT, Sofia BOUDERBALA et Alexandre HIELARD - Paris (AFP)
Publié le 14 décembre 2021 - 20:10
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Feu de palette et pluie d'interpellations: plus d'une centaine d'agriculteurs ont manifesté mardi devant le Conseil d’État pour protester contre l'exigence de renforcement des règles sur les distances d'épandage des pesticides, et des dizaines ont été interpellés, ravivant la colère des exploitants.

Sur les 73 personnes interpellées, dont deux organisateurs de la manifestation, 68 ont été placées en garde à vue, a-t-on appris de source proche du dossier.

Elles ont été placées en garde à vue pour "participation à un attroupement" et deux l'ont été aussi pour "organisation d'une manifestation non déclarée", a précisé le parquet de Paris, confirmant le nombre de gardes à vue.

"Ce soir, il y a encore au moins 25 personnes en garde à vue. Ce n'est pas acceptable. Nous appelons à des actions de blocage des routes un peu partout dans les 12 départements du Grand Bassin parisien pour exiger leur libération", a déclaré à l'AFP Damien Greffin, président de la FNSEA pour cette grande zone qui va du Nord jusqu'au sud de l'Ile-de-France.

"Certes, on n'avait pas déclaré ce rassemblement, mais on n'a commis aucune dégradation. On expliquait qu'on allait s'en aller vers 8H30 quand on a été encerclés puis arrêtés, +pour vérifier [les] identités+", a-t-il expliqué.

Dénonçant une "République des juges", les agriculteurs étaient arrivés avant l'aube et avaient fait flamber des palettes de bois devant les grilles de la plus haute juridiction administrative.

"On connaissait le gouvernement et les lois. On connaît maintenant le Conseil d’État qui, finalement pour nous, devient le deuxième gouvernement de la France puisqu'il sanctionne systématiquement un certain nombre de textes depuis quelques mois", avait déclaré Damien Greffin, disant "l'incompréhension" des agriculteurs face à des "décisions inapplicables" qui "font reculer l'agriculture française".

- "Pression" -

Fin juillet, le Conseil d’État a demandé au gouvernement de renforcer sous six mois la réglementation encadrant l'épandage des pesticides "pour mieux protéger la population".

Après plusieurs mois de polémiques, le gouvernement avait fixé en décembre 2019 les distances minimales à respecter entre les zones d'épandage de produits phytosanitaires et les habitations: cinq mètres pour les cultures dites basses comme les légumes et céréales, et dix mètres pour les cultures hautes, fruitiers ou vignes.

Le décret prévoyait également des dérogations réduisant encore ces distances, dans le cadre de "chartes d'engagement départementales" proposées par les utilisateurs de produits phytosanitaires et validées par les préfets après avoir été soumises à concertation publique.

Ce sont ces distances minimales qui ont été contestées par des associations, des communes ou des agriculteurs bio. Le Conseil d’État a estimé que les distances minimales d'épandage fixées à cinq mètres pour des produits dont la toxicité n’est que suspectée étaient "insuffisantes" et a donné jusqu'à fin janvier au gouvernement pour revoir sa copie.

Alors que l'échéance approche, les agriculteurs opposés à ces mesures sont de plus en plus inquiets, redoutant d'importantes pertes de production si les distances étaient allongées. Ils questionnent aussi la mise en œuvre de ces dispositions.

"Quand on prend son tracteur pour aller travailler son champ, on va devoir aller prévenir ses riverains, ses voisins. (...) On ne peut pas demander à un agriculteur de téléphoner à 200 personnes pour leur dire +Attention, je sors mon tracteur pour aller dans les champs! (...). C'est risible", s'était emporté Damien Greffin.

Joint par l'AFP, le secrétaire général de la FNSEA, Jérôme Despey, a appelé dans l'après-midi à "retrouver l'apaisement", indiquant que le syndicat travaillait avec le gouvernement sur cette question des distances d'épandage, demandant d'emblée la libération des agriculteurs interpellés.

De son côté, l'association Générations Futures a condamné dans un communiqué une "tentative de pression sur la justice et le gouvernement" de la part de la FNSEA.

Sur Twitter, la porte-parole du candidat écologiste à la présidentielle Yannick Jadot, Delphine Batho, a fustigé "une +opération coup de poing+ contre la plus haute juridiction administrative" et "le principe de précaution".

epe-sb-alh-mk/ak/swi

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