Première semaine du procès de Monique Olivier : la justice française vivement critiquée

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Laurence Beneux, France-Soir
Publié le 04 décembre 2023 - 13:20
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Miguel Medina / AFP
Le président de la cour d'assises de Nanterre refuse la demande des avocats d'interroger Monique Olivier en dehors des plages horaires prévues dans le planning. Ce qui révolte Me Didier Seban, avocat du père d'Estelle Mouzin.
Miguel Medina / AFP

FAITS DIVERS - Vendredi 1er décembre, s’est achevée la première semaine du procès de Monique Olivier, l’ex-épouse du tueur en série Michel Fourniret, pour complicité d’enlèvement, de viols et de meurtre, devant la cour d’assises de Nanterre. Un procès qui, au-delà de l’examen des charges retenues contre l’ex-épouse de “l’Ogre des Ardennes”, a pris la tournure d’une critique de l’institution judiciaire française. De l’organisation du procès actuel, en passant par l’indifférence quant au sort des jeunes filles sous la responsabilité de la DDASS jusqu’aux lenteurs de la justice, les griefs exprimés sont nombreux.

Témoins, parties civiles, défense, tous expriment leur mécontentement contre l’institution judiciaire française. Même la façon dont se déroule le procès actuel est contestée par des parties civiles. 

Vendredi, Me Didier Seban, l’avocat du père d’Estelle Mouzin, a créé un incident d’audience en reprochant au président de la cour d’assises “un procès qui ne respecte pas le contradictoire”. En cause, le refus du magistrat de permettre aux avocats d’interroger Monique Olivier en dehors des plages horaires prévues dans le planning des audiences. 

“Nous avons le sentiment que vous ne voulez pas que nous interrogions Monique Olivier”, a accusé l’avocat. “Mes clients sont en colère car cela fait 30 ans qu’ils attendent !", a-t-il renchéri. “On sait qu’il faut interroger Monique Olivier dans la longueur. Or, quand on a un témoin crucial qui fait des révélations, on ne peut pas l’interroger !”

“J’en veux énormément à la justice d’Auxerre”, explique Angélique L.

Angélique L., une amie de Marie-Angèle Domèce vient en effet de déclarer qu’elle avait aperçu Michel Fourniret et sa femme rôder à proximité de son propre domicile. Une information qu’elle avait tue jusqu’à ce jour. 

Pourquoi ? Ce témoin raconte avoir eu le sentiment d’être “prise pour une menteuse” après avoir elle-même tenté de déposer une plainte pour viol contre le compagnon de sa mère, plainte “partie directement à la poubelle”, d’après la jeune femme. Elle affirme aussi s’être rendue au tribunal d’Auxerre suite à la disparition de Marie-Angèle, et avoir vu un juge qui se serait contenté de lui dire : “Ce n'est pas mon affaire, Marie-Angèle.”

“J’en veux énormément à la justice d’Auxerre”, explique Angélique L., des sanglots dans la voix. “Je trouve inadmissible de ne pas avoir été entendue à l’époque.” Et d’exprimer ses regrets auprès des familles des victimes.

Les reproches d’Angélique L. font écho aux déclarations d’autres amies de Marie-Angèle Domèce et à celles d’une éducatrice de l’époque concernant le manque de considération de la justice pour les jeunes filles de la DDASS, “les filles du foyer”. Tous les témoins sans exception affirment qu’une fugue de la part de Marie-Angèle Domèce, jeune fille gentille et craintive, très attachée à sa famille d’accueil, n’était pas envisageable, et tous expliquent aussi que leurs cris d’alarme se sont heurtés à l’indifférence judiciaire.

Le lien entre les Fourniret et la disparition d’Estelle Mouzin aurait dû être fait plus rapidement

Un manque d’intérêt confirmé par l’ancien juge d’instruction de Charleville-Mézières, Pascal Préaubert. “Pas grand-chose n’a été fait dans l’Yonne”, commente l’ancien magistrat. “À l’époque, on constatait la disparition et six mois plus tard, on clôturait le dossier”, conclut-il.

Mais Pascal Préaubert et Anne Devigne, une autre ancienne juge d’instruction de Charleville-Mézières font, eux aussi, l’objet de reproches. Les avocats des parties civiles comme l’avocat de la défense dénoncent les délais écoulés, entre le procès de 2008 et celui de 2018, où comparaissaient déjà les époux Fourniret, jusqu’à celui de 2023, où Monique Olivier sera jugée seule. Les magistrats, mis sur le grill par les uns et les autres, se défendent en expliquant que certains dossiers n’étaient pas prêts à être renvoyés aux assises. Anne Devigne argumente qu’elle espérait que d’autres corps de victimes du couple seraient retrouvés (ce qui n’a pas été le cas) mais ébauche quelques paroles de regrets.

Les avocats des parties civiles estiment aussi que le lien entre les Fourniret et la disparition d’Estelle Mouzin aurait dû être fait plus rapidement.

Enfin, des avocats des parties civiles affirment encore et toujours que l’essentiel des dossiers tient sur le travail approfondi effectué par la police belge...

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