"Delivreznoo" : des chanteurs livrés à domicile à Toulouse

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Par Daniel MARTINEZ - Toulouse (AFP)
Publié le 22 février 2021 - 13:16
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Le chanteur Davy Kilembé qui se déplace à domicile, le 20 février 202 à Toulouse, pendant la fermeture des festivals et des salles de concert
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© Fred SCHEIBER / AFP
Le chanteur Davy Kilembé qui se déplace à domicile, le 20 février 202 à Toulouse, pendant la fermeture des festivals et des salles de concert
© Fred SCHEIBER / AFP

"D'habitude c'est vous qui allez au concert, aujourd'hui c'est le concert qui vient chez vous", lance, avec un grand sourire, le chanteur, guitare en main, à la dizaine de personnes qui l'attendent, masquées, dans le jardin d'une maison à Toulouse.

Puis, sous les applaudissements d'un public aussi ravi que soucieux des gestes barrières, Davy Kilembé enchaîne deux chansons, l'une de son répertoire, intitulée "Pagayer", puis une autre qui aura bientôt soixante ans : "Jeanne" de Georges Brassens.

En ces temps de Covid et de concerts interdits, le Bijou, une salle de spectacles toulousaine historique de moins de 100 places assises qui a notamment accueilli, en 32 ans d'existence, Zebda, Bénabar ou Anaïs, a décidé de "livrer" des chanteurs à domicile pour une prestation facturée à partir de 5 euros.

Ce "service", qui vient d'être expérimenté avec succès, a été baptisé "Delivreznoo", un jeu de mots combinant le souhait de nombre d'habitués des concerts en live cloués depuis des mois devant leurs écrans ("Délivrez-nous !") et l'entreprise britannique de livraisons de plats cuisinés à domicile Deliveroo.

- Double rencontre -

"C'est moi votre commande", s'amuse Davy Kilembé. "C'est bizarre, j'avais commandé une pizza", lui répond sur le même ton badin l'un de ses hôtes.

"C'est une émotion directe, un plaisir immense", explique-t-il à la fin du mini concert dans le jardin ensoleillé. "Ca m'a en plus permis de rencontrer ma voisine, que je ne connaissais pas et qui est venue quand elle a compris qu'il s'agissait de musique en live".

Cette émotion et ce plaisir du concert en live sont palpables chez les spectateurs pendant que Davy Kilembé s'enflamme ou baisse un peu la voix pour évoquer "la Jeanne" de Brassens.

Un quart d'heure plus tard, le chanteur est déjà en route pour un autre mini concert, dans un appartement cette fois-ci.

Meriem, 38 ans, a voulu faire une surprise à son compagnon Romain, 35 ans. Il croyait attendre un artisan pour fixer une pergola. "J'étais prêt à parler fixations et tenue des murs. C'est une grosse surprise, un rêve", s'amuse-t-il.

- Tête-à-tête -

"On revient à la plus simple expression : la chanson en tête-à-tête avec le chanteur. Le concert en vidéo peut être bien, mais c'est aussi déshumanisant", tranche Pascal Chauvet, directeur du Bijou.

Comme le public ou les chanteurs des mini concerts, Pascal Chauvet est inquiet pour l'avenir, faute de perspectives claires quant à une éventuelle réouverture des petites salles comme la sienne.

Organisateurs, chanteurs ou public de "Delivreznoo" rappellent volontiers que ces salles ont déjà montré en 2020 leur capacité à faire des concerts dans le respect des gestes barrières, avant qu'ils ne soient à nouveau interdits.

Valentin Vander, l'autre chanteur qui a participé au lancement de "Delivreznoo", regrette ces "choix politiques" du gouvernement : "Ce sont les petits artistes et les salles comme le Bijou qui vont trinquer".

Puis, quelques heures plus tard, dans une maison avec jardin de la banlieue de Toulouse, devant un public moins nombreux, mais tout aussi ravi, il s'adresse en chantant au président de la République, dans une parodie qu'il vient d'écrire sur la musique de la chanson de Brassens de 1954 "J'ai rendez-vous avec vous".

"Sa Majesté Jupiter/Qui là-haut veillez sur nous/Pourquoi avoir appelé Bachelot près de vous ?/A quoi sert-elle après tout ?", chante-t-il, dans une prestation jugée "extraordinaire" par son hôtesse Sandrine, 53 ans, pendant qu'elle applaudit à tout rompre.

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