Wikipedia : Alias Coccyxgrue et les bignoles de l'info (partie I)

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Alias Coccyxgrue (sur wikipedia) pour FranceSoir
Publié le 06 décembre 2020 - 16:55
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mouton de demain
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Wikipedia : Alias Coccyxgrue et les bignoles de l'info (partie I)
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Témoignage de Coccyxgrue, contributeur anonyme. Comment Wikipédia devient subrepticement une version propre sur elle de la surveillance générale à la chinoise en transformant ses articles d'actualité en « fiches W » des individus ou des œuvres « conspirationnistes ».

(ndlr : Le feuilleton de l'aventure récente d'un contributeur anonyme sur wikipedia qui révèle son expérience personnelle, les batailles d'édition qu'il a dû mener ces dernières semaines.  De quoi sérieusement poser des questions sur ce qu'est devenu ce projet d'encyclopédie collaborative.)

 

Contributeur de confiance

Depuis 2012, j'ai été contributeur Wikipédia sous le pseudonyme « Coccyxgrue ». Je l'avais été auparavant depuis 2008 sous d'autres pseudonymes. À l'époque où certains collègues enseignants disaient aux élèves (et certains le disent encore, malheureusement) : « il y a des erreurs sur Wikipédia ; regardez dans des vraies encyclopédies », j'étais au contraire fasciné par ce travail collaboratif, cette mine de connaissances, ce tumulus de pierres entassées une à une par des tâcherons anonymes, et qui devenait sous nos yeux une montagne, avec des erreurs certes, mais qu'un esprit objectif savait relativiser, parce que la connaissance n'est qu'une suite d'erreurs indéfiniment rectifiées. En 2008 j'avais aussi pendant quelques mois animé un atelier avec quelques élèves du lycée où je travaillais, et nous avions créé des articles sur Wiktionnaire, par exemple l'article « unijambiste », ce qui prouve que le projet Wiktionnaire était balbutiant à l'époque, pour n'avoir pas encore d'entrée sur un mot aussi courant. Depuis je suis devenu un contributeur assez productif sur Wiktionnaire, un peu moins sur Wikipédia, avec le même compte Coccyxgrue. Je ne sais plus pourquoi j'avais choisi ce pseudonyme. L'une de mes premières contributions avait été sur le mot « coquecigrue » ; j'avais ajouté une citation de Mme de Sévigné, qui est toujours dans l'article. Sur Wikipédia, l'une de mes premières contributions fut sur « Akiaki », où j'avais introduit une citation de Diderot, contribution qui depuis a été bien développée. Donc je contribue surtout en ajoutant de belles citations issues de mes nombreuses lectures d'enseignant curieux de tout, et parfois je crée des articles, sur des mots désormais plus rares que « unijambiste ». Cela m'a valu d'avoir été promu « utilisateur de confiance » sur Wiktionnaire en juillet 2017. Cela signifiait que mes articles n'étaient plus revus par les « patrouilleurs », parce qu'on avait constaté à la longue que je n'étais pas un vandale. Tout allait bien dans le meilleur des mondes, et j'ai été pendant 12 ans, dont huit sous l'avatar Coccyxgrue, un bon petit maçon qui apportait sa petite pierre à cette cathédrale édifiée par des anonymes. Or voilà que comme Senghor je dois jeter la bombe de cet article sur la maison que j'ai contribué à édifier :

« Ah ! ne suis-je pas assez divisé ? Et pourquoi cette bombe

Dans le jardin si patiemment gagné sur les épines de la brousse ?

Pourquoi cette bombe sur la maison édifiée pierre à pierre ? » (« Poème liminaire », Hosties noires). Ce qui suit ne concerne qu'une partie infime de Wikipédia, et je ne jette pas la pierre sur toute la partie émergée qui reste extraordinaire et à laquelle j'aurais sans cette affaire, toujours envie de contribuer, celle qui concerne les notions objectives, les hommes, les choses et les œuvres éternelles et celles qui relèvent du passé. Mais je refuse de participer si le politiquement correct à l'œuvre aujourd'hui, encouragé par des Georges Soros et consorts qui financent en partie Wikipédia, participent au déboulonnage des statues selon la nouvelle mode.

 

Première alerte : Coccyxgrue suspect de raoultisme

Une première alerte bénigne intervint en juin 2020, après que j'eus créé sur Wiktionnaire les articles « raoultiste », « raoultisme », puis à la lecture de Épidémies. Vrais dangers et fausses alertes, de Didier Raoult, j'avais créé « pharmacosurveillance », et introduit une quinzaine de citations de cet excellent livre dans des articles existants. C'est une contribution habituelle quand un livre me plaît, et je vais bien au-delà si le livre fait 500 pages et qu'il emploie un vocabulaire rare. Le 30 juin, je reçus des messages de deux contributeurs (toujours lisibles sur ma page) : « Bonjour, je pense que cette personne est trop clivante pour être citée sur des mots anodins comme grippal, babouin, technologie, imprévisible, etc. Merci de trouver des attestions plus consensuelles pour le vocabulaire qui n'appartient pas à sa spécialité », et « Bonjour, les personnes adeptes des polémiques, le font souvent pour vendre des livres. Donc on va surtout rechercher des citations qui illustre (sic) le mot et qui aide (sic) à le comprendre et le réemployer par la suite. Le problème ici c'est que la personnalité publique de Mr Raoult n'est pas neutre. Le taux de lecture d'un livre n'est pas un critère pour ajouter les citations. » Ce contributeur antiraoultiste fâché avec l'orthographe se permettait donc, à moi qui étais contributeur de confiance, de me donner une leçon de débutant, sans donner aucune raison sérieuse sauf son antiraoultisme primaire qui transpirait sous chaque mot. Prétendre que « grippal » « n'appartient pas à [l]a spécialité » d'une star mondiale de la microbiologie, c'est quand même fort de café à l'heure où la presse de caniveau demande leur avis sur l'hydroxychloroquine à des Thierry Lhermitte. Cela m'a étonné, mais finalement, personne n'a enlevé aucune des citations que j'avais mises, et l'affaire a été close. Je trouvais quand même révélateurs les qualificatifs de « clivant », « consensuel » « pas neutre ». Cela me faisait penser à la punchline désormais célèbre de Raoult : « Le consensus, c'est Pétain ». Et puis l'expression « pas neutre » me fait tiquer, car je l'ai entendue de plus en plus souvent, y compris dans la bouche d'amis ou de collègues atteints par cette nouvelle rhinocérite depuis le début de l'épidémie qui rend fou. Si je leur parle de Didier Raoult ou de Michel Onfray[1], ils me renvoient du tac-au-tac l'url d'un article d'autoproclamés « décodeurs », ces escadrons de la vérité, nouveaux corbeaux de la Toile, prouvant que « il est pas clair, ton Raoult », « Dis donc t'as vu Onfray, il est pas très clean ». Alors j'ai compris que de la petite pierre apportée à l'édifice, on arrivait à la petite pierre jetée sur l'hérétique, l'adultère de la doxa, le traître du consensus ; et du tumulus, nous sommes passés à la lapidation.

Je poursuis donc ma collaboration wiki, et en octobre j'introduis neuf citations du nouveau livre du « charlatan », dans les articles « compliance » ou « audimat », cette fois sans aucun rappel à l'ordre. Je ne m'intéresse pas de près aux articles de Wikipédia, même si je crois comprendre que la tendance est plutôt à la pensée grégaire, doxa Télérama de salles des profs.

Lynchage de Hold-Up par la meute de la bienpensosphère relayée par Wikipédia.

Et voilà que sort le film Hold-Up. La saga de l'article de Wikipédia sur ce film que je vais résumer ici, pourrait dans le détail constituer une nouvelle idée de documentaire que je suggère à Pierre Barnérias, pour compenser le manque à gagner engendré par le retrait de son film de la plate-forme Vimeo, conséquence immédiate du lynchage express par la meute confédérée de la macronie, de la presse d'État, de Wikipédia et de la médecine de plateaux-télés familière des croisières Pfizer-Gilead, bref la « majorité compacte » selon le mot d'Ibsen. Il ne faut pas oublier que grâce à Wikipédia et autres chiens de garde de la Vérité, Pierre Barnérias à l'instar des travailleurs d'un secteur sinistré par les mesures délirantes du gouvernement, et à l'instar de l'Église catholique privée du revenu de la quête, a aussi été privé du revenu de son travail, ce qui peut fournir matière à une action en justice, comme l'a expliqué son avocat Me Carlo Brusa. J'achète le film dès le premier jour, le 11 novembre, je le visionne le soir, et le lendemain je guette Wikipédia pour en savoir plus. L'article est créé sous mes yeux le 12 novembre à 11h28. Moins d'une heure après, à 12h22 précisément, « Marc Mongenet » (pour une fois un contributeur qui a au moins le courage de ne pas se réfugier derrière l'anonymat, à moins que ce soit un pseudonyme) ajoute dès la première ligne de l'article, le mot « conspirationniste », dans une version archivée que l'on peut consulter.

Cette contribution de Marc Mougenet : « Hold-Up est un film documentaire conspirationniste français sorti en novembre 2020 » demeure plus ou moins l'accroche de l'article dans la version que l'on peut lire à l'heure où nous mettons sous presse (remarque valable pour tout le présent article). Puis certains contributeurs (parmi d'autres plus objectifs, bien sûr) ajoutent leur petite pierre pour lapider non seulement le réalisateur, mais aussi chacun des intervenants qui se voit décoré d'une étoile jaune de « soutien de l'extrême droite italienne » pour Carlo Brusa, « extrême droite » pour plusieurs intervenants, dont la généticienne Alexandra Henrion-Caude qui se voit aussi gratifiée du crachat « proche des milieux catholiques », qui est effectivement quelque chose de « pas glop » dans la wikisphère à l'heure où l'on égorge des catholiques et où le Macronistan a voulu interdire à plus de 30 personnes de se réunir dans ces lieux hautement dangereux que sont les cathédrales. Étonnamment, Michel Rosenzweig n'est pas qualifié de « proche des milieux juifs », bien qu'il soit intervenu à deux reprises dans Tribune juive pour défendre ce documentaire auquel il a participé. Jean-Dominique Michel se fait épingler la rosette « « expert autoproclamé » aux prises de positions complotistes ». Luc Montagnier peut ajouter sur son CV la médaille « complotiste » agrafée par un courageux autant qu'anonyme contributeur teckel jouissant de pisser sa giclée sur la cheville d'un prix Nobel. Laurent Toubiana se voit attribuer la médaille « chef de file des « rassuristes » ». Ah ! ma bonne dame, ça fait frémir, on laisse donc s'exprimer jusque dans nos chaumières d'horribles « rassuristes ». C'est « l'armée du crime » dénoncée par l'Affiche rouge, et l'on voit sur les médias bien-pensants des images d'archives de ces « conspirationnistes », « noirs de barbe et de nuit, hirsutes, menaçants », comme le charlatan Raoult avec sa bague et sa barbe démoniaques qui font frémir les chaisières complotophobes de la bienpensosphère. Quant à l'ignoble Christian Perronne, dont le faciès simiesque fait frémir les résidents des Ehpad quand ils sirotent leur Rivotril, le voici fiché W sous l'auréole de « professeur de médecine, adepte des « théories alternatives », faisant l'objet de poursuites par l'ordre des médecins pour ses déclarations polémiques sur l'épidémie ». Pourquoi ne pas ajouter pendant qu'on y est : « achetant son pain chez un boulanger dont le fils est fiché S, saluant chaque matin sa concierge dont il sait pourtant pertinemment que cette salope a voté Marine Le Pen » ? On se demande comment un tel individu socialement nuisible n'est pas encore pourvu d'un bracelet électronique ! Voilà le niveau où croupit en 2020 le débat dans la France des Droits de l'homme. En revanche, dans la liste des personnes seulement mentionnées dans le film, qui figure plus bas dans l'article, je lis « Tedros Adhanom Ghebreyesus : directeur général de l'OMS », mais j'ai beau chercher, je ne trouve pas « ayant apporté son soutien au dictateur Robert Mugabe ».

Suite demain... ou Coccyxgrue se fait accuser de raoutiste caractérisé aggravé de complotophilie.

[1] Fiché W : « Elle est à ce stade, si je puis dire, « souverainistement » politiquement correcte » (selon le politologue Jean-Yves Camus, spécialiste de l'extrême droite) », article de Wikipédia sur Michel Onfray. On sent passer le vent du boulet !

 

 

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