Covid et présidentielle de 2022

Auteur(s)
Christophe Lemardelé, pour FranceSoir
Publié le 27 août 2021 - 12:29
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Macron vs de Gaulle
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AFP/Vincent Kessler
Qui imagine le général de Gaulle jouer les épidémiologistes à la télévision ?
AFP/Vincent Kessler

TRIBUNE - Après un an et demi de crise sanitaire à rebondissements et de mesures gouvernementales variables et verticales, il importe d’en tirer quelques leçons.

Premier constat : les épidémies successives du Sars-CoV 2, à cause de ses variants, ont surtout fait des victimes chez les personnes âgées. Leur nombre important, du fait de l’augmentation de l’espérance de vie, a créé un engorgement des services hospitaliers étant donné que les récents gouvernements ont été plus préoccupés par une gestion au cordeau des dépenses publiques que par la préparation de l’Hôpital au vieillissement inéluctable de la population française.

Deuxième constat : la réactivité des autorités politiques et sanitaires s’est montrée brouillonne, autoritaire et dans l’ensemble inefficace. Au lieu de s’appuyer sur un conseil scientifique transparent et pluriel, le pouvoir politique a choisi l’opacité des Conseils de défense convoquant un groupe d’experts restreint et monocorde, sans se préoccuper des liens d’intérêt que certains d’entre eux, non parmi les moindres, ont avec l’industrie pharmaceutique. Dès lors, les discussions ouvertes nécessaires à toute science ont été rejetées au profit de la volonté de faire adhérer le pays à un discours scientifique officiel s’apparentant à une doxa.

Voir aussi : debriefing Vincent Pavan et Me Heringuez, contestant l'étude qui a fondé l'avis du conseil scientifique sur lequel s'est appuyé Emmanuel Macron

Troisième constat : la récente loi sur le pass sanitaire, élaborée et votée au pas de charge, révèle une crise politique majeure. Le pouvoir exécutif domine le pouvoir législatif, les deux chambres étant désormais « d’enregistrement » de décisions prises par le président de la République lors d’un Conseil de défense. Le premier ministre, les ministres et les députés de la majorité sont aux ordres de ce dernier, et les élus de l’opposition quand ils sont proches du centre en sont les alliés naturels. À moins d’un an d’élections nationales cruciales, le paysage politique est dévasté, le débat démocratique droite/gauche n’existe plus, remplacé par une pression du haut de la société sur le bas, les partis politiques sont exsangues et les candidats à venir de la présidentielle semblent être des individus isolés qui ne portent comme projet pour la France que leur seule ambition personnelle.

L’état de délabrement de la nation requiert un ressaisissement de son élite : élus, leaders politiques, intellectuels, journalistes, etc. Il ne s’agit plus pour cette élite de s’en prendre à telle ou telle composante de la population, qui manifeste pacifiquement en brandissant le drapeau national, sans se remettre elle-même en question. Trois axes de réformes sont à dégager au plus tôt.

Premier axe : une réforme institutionnelle

Le passage au quinquennat du mandat présidentiel entraîne trop de dysfonctionnements démocratiques. D’une part, le président de la République gouverne au lieu de présider en transformant la fonction de premier ministre en simple exécutant de ses décisions. D’autre part, et surtout, l’alignement du mandat présidentiel sur celui des députés a conduit à faire du quinquennat une période sans contre-pouvoir, chaque nouveau président se rêvant en maître presque absolu ! Une réforme possible serait de prolonger le mandat présidentiel d’un an et de réduire celui des députés à trois ans, de manière à avoir une élection nationale à mi-mandat présidentiel.

Deuxième axe : une grande loi de séparation du privé et du public

La collusion entre intérêts privés et enjeux publics se voit pratiquement dans tous les domaines. Or, la « corruption » des esprits est bien plus pernicieuse que la corruption financière car elle est invisible et même souvent inconsciente. C’est ainsi que la presse subventionnée par l’État en vient à être partiale – on ne critique plus le pouvoir en place… Qu’il soit au niveau national ou au niveau européen, le lobbying devrait être dénoncé par tout élu. Les chercheurs d’instituts d’État et les médecins de l’Hôpital travaillant en lien étroit avec l’industrie pharmaceutique ne devraient avoir aucune charge d’expertise publique. Tout conflit d’intérêt doit être dit et réduit au maximum car c’est l’info partielle qui fait le lit des complotismes ! Aucun élu ne devrait intégrer le conseil d’administration d’une grande entreprise privée. La confusion des rôles en démocratie entrave tout autant ce système politique que la république des notables d’antan.

Troisième axe : un « plan Marshall » pour le médical

Compte tenu du vieillissement considérable à venir de la population française – les générations du baby-boom, nées après-guerre, parvenant bientôt au grand âge –, il importe d’investir dans la recherche médicale publique, afin de proposer des traitements adaptés et peu chers, de renforcer l’Hôpital en maintenant la maillage et l’efficacité des petites structures départementales et en améliorant le fonctionnement des grands centres régionaux, de lutter pied à pied contre les déserts médicaux en redonnant toute sa place à la médecine libérale et de soutenir financièrement les Ehpad pour surmonter cette difficulté démographique qu’on ne peut plus nier.

L’urgence, c’est le retour au bon fonctionnement de la Vème République et à la transparence des politiques menées pour affronter le présent et anticiper l’avenir proche. Tout citoyen est en droit d’attendre d’un présidentiable qu’il s’engage au moins sur ces trois axes de réformes.
 

Pétition en ligne : Réformer les quinquennats : contre-pouvoir et esprit de la Vème République

 

Christophe Lemardelé est enseignant, chercheur et citoyen.

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