Réduire le risque médicamenteux : le plan de François Pesty (partie 7)

Auteur(s)
François Pesty
Publié le 06 novembre 2023 - 19:04
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Photo Plan Pesty 7
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France-Soir
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DOSSIER - Erreurs médicamenteuses, mésusage, non-pertinence et inefficience des prescriptions, le talon d’Achille se trouve dans les logiciels métiers des professionnels de santé. Mon plan pour y remédier.

Une tribune en dix épisodes, dix propositions faisant appel au "numérique en santé", mon projet de loi citoyen en dix amendements au projet de loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2024

Septième épisode : Proposition N°7

Encadrer et aider à la préparation infirmière des doses à administrer et à leur étiquetage.

Proposition N°7

Septième amendement : "La HAS est chargée de définir un référentiel de certification des logiciels hospitaliers, y compris en hospitalisation à domicile, ainsi que pour les logiciels utilisés dans les EHPAD et autres établissements sociaux ou médico-sociaux, couvrant l’étape cruciale de la préparation des doses à administrer et de leur étiquetage."

L'article L. 161-38 du Code de la sécurité sociale (ici) est également modifié de la manière suivante :

8° Après le II, est introduit un II a dans lequel les mots suivants sont insérés "II a. La Haute Autorité de santé établit la procédure de certification des logiciels d’aide à la préparation des doses à administrer (PDA ou LAPDA) ayant respecté un ensemble de règles de bonne pratique. Ces logiciels apportent une aide infirmière pour le calcul des doses, débits, volumes, vitesses de perfusion pour la préparation des doses à administrer, en particulier pour les formes injectables et buvables, ainsi qu’à leur étiquetage complet et conforme à la réglementation avec impression des étiquettes dans la salle de soins ou sur le chariot de distribution des médicaments, et permettent également de tracer les opérations réalisées par l’infirmière pour préparer les doses. Un préalable indispensable pour effectuer les contrôles de sécurité et s’assurer du non-dépassement des doses maximales par prise et par 24h. La lecture code-barres doit être rendue obligatoire lors de la cueillette infirmière des présentations pharmaceutiques à préparer ou à administrer. Lorsque la date de péremption est dépassée (donnée embarquée dans le code-barres ou le Datamatrix), le logiciel infirmier doit produire une alerte." 

Exposé sommaire :

Les logiciels des professionnels de santé à l’hôpital, en ville (notamment en HAD), dans les établissements sociaux et médico-sociaux, dont les EHPAD, ne couvrent ni la préparation des doses à administrer (PDA) par l’infirmière, ni leur étiquetage. La HAS, en collaboration avec l’ANSM, doit être au plus vite être chargée par le législateur d’élaborer un référentiel de certification des logiciels à l’étape de la PDA (puisqu’elle n’a pas pensé s’en autosaisir).

Cet amendement se propose donc d’étendre le périmètre de la certification et les exigences fonctionnelles minimales attendues des logiciels hospitaliers d’aide à la prescription et à la dispensation, aux étapes infirmières de préparation des doses à administrer (PDA), d’étiquetage de ces préparations, et de traçabilité des tâches effectuées par l’infirmière.

Cette dernière est sans nul doute le professionnel de santé actuellement le plus démuni de tout support logiciel dans l’exécution de ses tâches à risque élevé d’erreur. La lecture code-barres doit aussi pouvoir sécuriser la cueillette par l’infirmière du médicament qu’elle doit préparer ou administrer. La date de péremption embarquée dans le code-barres ou Datamatrix doit permettre au logiciel infirmier de produire une alerte en cas de dépassement. La HAS, idéalement en partenariat avec l’ANSM, pour l’étiquetage, notamment des médicaments à risque (Never events ou "événements qui ne devraient jamais arriver" : chlorure de potassium, insuline, anticoagulants, méthotrexate…), serait parfaitement habilitée pour définir le référentiel permettant d’améliorer la qualité et la sécurité des pratiques infirmières dans ce domaine à risque très élevé pour la sécurité des patients. Aujourd’hui, faute d’exigence formalisée en la matière, les logiciels couvrant la prise en charge médicamenteuse du patient ne gèrent pas ces étapes pourtant si cruciales en matière de sécurité des soins. Pour une perfusion à poser, le plus souvent, l’infirmière colle sur la poche une étiquette imprimée lors de l’admission du patient et se contente d’inscrire au marqueur de manière pas toujours très lisible le nom du (des) médicament(s) ajouté(s) dans la poche, parfois en abréviations, et toujours de manière très incomplète.

Les logiciels n’apportent aujourd’hui aucune aide concrète et systématique au calcul des doses, volumes, débits, vitesses de perfusion. Par exemple, lors de la reconstitution d’une solution injectable à préparer à partir d’une "poudre pour préparation injectable", le recueil du volume V1 de solution injectable prescrite pour la reconstitution (chlorure de sodium isotonique, eau pour préparation injectable…), puis le volume V2 de cette solution introduite dans le flacon, puis le volume V3 de solution soutirée du flacon après reconstitution, et enfin le volume V4 injecté au patient sont tous nécessaires pour contrôler correctement que les doses maximales de principe(s) actif(s) par prise et par 24 heures n’ont pas été dépassées, et donc pour produire une alarme ou un message d’alerte dans le cas contraire. Si l’on souhaite sécuriser la préparation par l’infirmière des doses à administrer, il sera nécessaire qu’elle renseigne ces paramètres dans son logiciel métier… Ce n'est nullement la compétence du personnel infirmier qui est ici remise en question, mais plutôt l'injonction contradictoire permanente face à laquelle il est placé. De la même manière, lors de la préparation de "gouttes buvables", seule l’impression d’une étiquette complète, réalisée dans la salle de soins ou sur le chariot de distribution des médicaments, à partir du logiciel "prescription – administration », permettrait d’offrir à l’infirmier un support facilitant et sécurisant cette préparation, comprenant l’ensemble des informations utiles et nécessaires, garantissant ainsi la possibilité d’identifier à la fois le patient et le ou les médicament(s) présent(s) dans le gobelet, à la (aux) dose(s) prescrite(s), jusqu’au moment de l’administration. Sans un tel dispositif, l’arrêté du 6 avril 2011 (ici) reste totalement inapplicable. Les logiciels n’apportent aucune aide aux risques d’incompatibilités physico-chimiques entre les principes actifs ajoutés dans le gobelet (couramment jusqu’à cinq principes actifs mélangés dans un même gobelet).

Les systèmes d’aide à la décision indexés par médicament ("SAM" ; procédure HAS de référencement : ici), doivent pouvoir protéger les infirmières contre la survenue d’erreurs médicamenteuses non-intentionnelles et évitables. 

Au hasard d’un webinar de l’OMS dans le cadre de sa campagne Medication without Harm également traduite en français par "Médicaments sans préjudices" (ici, de 3:32 à 11:48 de l’enregistrement vidéo), Sir Liam Donaldson, envoyé spécial de l’OMS pour la sécurité des patients, revenait sur les circonstances qui avaient entrainé un "incident" médicamenteux fatal chez un jeune homme leucémique de 16 ans traité alors qu’il était en rémission, en Angleterre. Ce patient devait recevoir deux injections, l’une en intraveineuse (vincristine), l’autre en intrathécale (cyclosporine)

Un incident fatal de même nature (méthotrexate en intraveineuse, vincristine accidentellement injectée en intrathécale) rapporté par l’OMEDIT de la région Centre chez une femme de 45 ans (ici)

Comment le mieux éviter ces incidents dramatiques ?

1. Lecture code-barres sur l’étiquette du flacon (identification de la présentation pharmaceutique) ; 

2. Production immédiate d’une alerte par le logiciel métier "Ne pas administrer par voie intrathécale !" ; 

3. Production d’une étiquette* à coller sur la seringue reproduisant cette alerte en plus des mentions réglementaire (nom, prénom du ou de la patient(e), nom(s) et dosage(s) de(s) substance(s) actives, voie d’administration, Datamatrix embarquant l’ensemble des informations à scanner juste avant l’administration par l’infirmière avant ou après avoir scanné le Datamatrix sur le bracelet d’identification du patient.

(*) L’étiquette devra permettre d’attirer fortement l’attention des soignants grâce à un code couleur (rouge ou violet) qui aura pu être défini d’un commun accord entre la HAS et l’ANSM.

Ne pas faire cela, c’est exposé le patient au risque d’erreur humaine !

Sir Liam Donaldson termine cette séquence du webinar en affirmant : "C’est difficile de prévenir ce type d’erreur qui est très, très rare, difficile d’avoir une mesure de sécurité qui soit introduite, pour l’introduire mondialement dans la prise en charge médicale, c’est pratiquement impossible !"

Evidemment, si l’on n’encadre pas les tâches manuelles sujettes à l’erreur humaine, par un processus informatique qui va guider et alerter à chaque étape à haut risque d’événement indésirable grave, pas à pas si nécessaire, voilà ce qui se passe…

Les propos de renoncement fataliste de ce haut cadre de l’OMS sont à la fois consternants et anachroniques. Ils dénotent une complète ignorance des meilleures pratiques dans ce domaine ainsi que des potentialités du numérique pour éviter ce type d’erreur !

A partir de 12:42 et jusqu’à 17:32 de l’enregistrement vidéo de ce même webinar (ici), Donaldson relate le cas d’un enfant de 9 ans chez lequel une biopsie rénale devait être pratiquée. Une injection intraveineuse lente de midazolam, benzodiazépine, devait être administrée à l’enfant pour le sédater. L’infirmière part chercher le médicament dans la salle de soins et se trompe. Le midazolam injectable était stocké juste à côté de la forme orale liquide du même principe actif. L’infirmière aspire dans sa seringue le contenu de la forme orale liquide de midazolam, l’apporte au médecin senior qui l’administre en intraveineuse à l’enfant. Heureusement, le liquide était trop épais et n’est pas passé dans la veine. Les soignants ont alors réalisé leur erreur et l’enfant n’a pas subi de préjudice.

Comment éviter ce type d’erreur qui aurait pu être dramatique ?

Idem, la lecture code-barres au moment de la cueillette, ou au plus tard juste avant l’administration, de la seringue contenant la présentation pharmaceutique sous forme liquide orale, n’aurait pas matché au regard de la prescription d’une présentation pharmaceutique sous forme injectable de midazolam (codes-barres différents), produisant une alerte au niveau du logiciel métier (voir la proposition N°5 à venir « Rendre obligatoire et systématique l’administration des médicaments assistée par la lecture code-barres au lit du malade ou au chevet des résidents…)

Toujours sur ce webinar (ici), à 1:10:28 de l’enregistrement, ce haut gradé de l’OMS, Sir Liam Donaldson, évoque comme solution, pour éviter de nombreuses erreurs médicamenteuses, qui surviennent notamment aux étapes de la préparation des doses à administrer, d’apposer un code-barres sur chaque médicament. Tout en disant que l’on ne peut pas obliger les industriels à la faire ! Il vaut mieux être sourd que d’entendre cela.

La FDA et le secrétaire d’Etat américain à la Santé de l’époque, avaient annoncé dès le 25 février 2004, avec comme date butoir le 26 avril 2006, l’obligation faite aux industriels de la pharmacie de mettre un code-barres ou Datamatrix sur chaque conditionnement primaire (voir la diapositive n°15 du diaporama présenté devant l’ANSM lors d’une réunion avec la direction des affaires juridiques et réglementaires, la direction de la surveillance de l’ANSM le 6 mai 2019 : ici).


Pourquoi donc, l’OMS, qui se considère être le leader mondial de la santé, n’a-t-elle pas emboité le pas à la FDA ? Pourquoi l’ANSM est-elle encore dans les starting-blocks ?

Les situations à hauts risques ciblées par l’OMS dans son défi "Médicaments sans préjudice"

Premier intervenant d'un webinar proposé en mai 2022 (ici), le Pr. Philip Routledge, université de Cardiff, au pays de Galles, propose une liste de médicaments à hauts risques de préjudice en cas d’erreur. Nommée "APINCHO" pour :

A = antiinfectieux. Ex. : amphotéricine B, aminosides ;

P = potassium et autres électrolytes. Ex. : magnésium, calcium, chlorure de sodium hypertonique ;

I = insulines. Ex. : Toutes les insulines ;

N = narcotiques et autres sédatifs. Ex. : oxycodone, morphine, fentanyl, benzodiazépines (diazépam, midazolam), propofol ;

C = chimiothérapie. Ex. : vincristine, méthotrexate, étoposide, azathioprine ;

H = héparines et anticoagulants. Ex. : warfarine, fluindione, enoxaparine, rivaroxaban, dabigatran, apixaban ; 

O = Autres (other).

Une autre intervenante, Pr Galappatthy, pharmacologue, de l'université de Colombo, Sri Lanka insiste (à 33:41 de la vidéo) sur l’importance au niveau national pour une liste définie de médicaments à hauts risques, de produire des étiquettes qui alertent fortement les professionnels de santé à l’aide d’un code couleur adapté et de logos explicitess. Cela concerne évidemment les médicaments prêts à l’emploi et les préparations à administrer. Problème, la HAS, l’ANSM et le législateur n’ont pas prévu de référentiel de certification des logiciels métiers à l’étape de la préparation des doses à administrer et de leur étiquetage. Encore une grave lacune !

The US and Canadian Institutes for Safe Medication Practices

Troisième intervenant, le D.r Michaël Hamilton, directeur Médical de l’ISMP Canada, homologue de l’ISMP USA, tous deux fers de lance de la lutte contre l’erreur médicamenteuse en Amérique du Nord. L’Institut pour la sécurité des médicaments aux patients du Canada a défini un plan stratégique 2022-2026 avec pour objectif : "Zéro dommage évitable lié aux médicaments". Il publie chaque année un bulletin depuis 2004 (ici). Quant à l’Institute for Safe Medication Practices américain, il exerce une surveillance au niveau fédéral des événements indésirables médicamenteux, et publie des recommandations de bonnes pratiques. Nous décortiquerons un peu plus loin ses recommandations sur la préparation des formes injectables. Michaël Hamilton associe aux risques élevés des alertes élevées, et distingue les médicaments à risque, les situations à risque et les populations à risque. Il reprend dans sa présentation une cartographie de plus de 7 500 incidents médicamenteux signalés avec préjudices pour les patients dans les différents types de prises en charge entre 2015 et 2020, publiée dans le bulletin 2020 (ici). Hôpitaux 65,9 % des incidents, pharmacies de ville 26,5 %, soins de longue durée 6,7 %, soins à domicile 0,8 %. En termes de médicaments impliqués, à l’hôpital : insuline 7,8%, hydromorphone 6,8 %, morphine 3,3 % ; en pharmacie de ville : méthadone 6,3 %, lévothyroxine 2,9 %, metformine 2,6 % ; soins de longue durée : hydromorphone 12,3 %, fentanyl 10,5 %, insuline 8,1 % ; soins à domicile ou en milieu communautaire : hydromorphone 6,3 %, méthotrexate 6,3 %, bisoprolol 4,7 %. A ce stade du webinar, le directeur médical d’ISMP Canada fait une remarque tellement pertinente : "Comment peut-on utiliser cette liste de médicaments à risque en fonction des contextes de prises en charge ? Lorsque vous développez votre liste, il est important de s’appuyer sur ces publications médicales. Comprendre qu’une liste n’est qu’une liste. C’est le point de départ. En soi, ça ne sert à rien si vous n’agissez pas !". Le titre de sa diapositive traduit en français : "Votre liste de médicaments à risque – relativement inutile sans les stratégies de réduction des risques qui y sont associées". Ce titre fait écho à un article publié par l’ISMP Canada en avril 2013 dont je vous recommande vivement la lecture (ici). Un court extrait de cet article vieux de déjà dix ans qui détaille un peu plus le constat que tout le monde devrait faire : "Une liste de médicaments de niveau d'alerte élevé est relativement inutile si elle n'est pas actualisée, connue du personnel clinique et accompagnée de solides stratégies de réduction des risques, plus efficaces que la sensibilisation, que les doubles contrôles manuels, que la formation du personnel et que les appels à la 'prudence'. Nombre de ces stratégies devraient être transposées à d'autres médicaments."

Un peu plus loin dans sa présentation, Michaël Hamilton propose une classification des stratégies destinées à éviter les erreurs médicamenteuses. Les plus efficaces sont celles basées sur des systèmes : fonctions de forçage et contraintes ; automatisation et informatisation, qu’il oppose aux moins performantes, basées sur l’humain (l’erreur est humaine) : formation et information, règles, procédures, bonnes pratiques. Au milieu, les stratégies de standardisation ou de simplification, les pense-bêtes, les checklists, les doubles contrôles indépendants, sont jugés modérément performants.

L’expert de l’ISMP Canada poursuit en indiquant qu’il va falloir agir à toutes les étapes du processus de prise en charge médicamenteuse : achat des médicaments, stockage, prescription, transcription, dispensation, préparation des doses et étiquetage, administration, surveillance.

Très exactement ce que n’a toujours pas compris la HAS et le législateur qui l’a pourtant chargé d’élaborer les référentiels de certification, se bornant aux seules étapes de la prescription (mais sans la conciliation médicamenteuse) et de la dispensation (mais sans les contrôles qui permettraient d’éviter une erreur à cette étape). Quelle méconnaissance des processus de la prise en charge médicamenteuse !

Tout est dit

Ni la sensibilisation du personnel soignant par voie de notes de service, qui le plus souvent ne concernent qu’un seul aspect du processus, généralement le "stockage" des médicaments, ni leur formation, ni les appels à la prudence, ni même les doubles contrôles manuels, ni le port d’un gilet jaune fluorescent portant en rouge la mention "Ne pas déranger" ne pourront garantir qu’aucune erreur ne se produira !

Il n’est plus possible aujourd’hui de s’en remettre à la seule vigilance des soignants pour assurer pleinement la sécurité des patients

On ne peut plus tolérer que l’infirmière, professionnel du soin le plus démuni en matière d’aide informatique, continue aujourd’hui encore à préparer ses doses à administrer sur un coin de table sans jamais tracer quoi que ce soit dans le logiciel métiers lors de l’accomplissement de ses tâches.

C’est au logiciel métiers d’encadrer la pratique du professionnel en interagissant avec lui dans une démarche logique avec des technologies numériques éprouvées, telles que la lecture code-barres pour identifier sans erreur le patient ainsi que le médicament prescrit, à cueillir, à préparer, à étiqueter, ou à administrer, et en recueillant auprès du soignant les informations nécessaires à la bonne réalisation des contrôles et alertes, par exemple en cas de dépassement de la posologie maximale par prise ou par 24 heures…

Selon les meilleures pratiques 2022-2023 à l’hôpital pour les médicaments ciblés, définies par l’ISMP USA (ici : s’inscrire pour télécharger le document de 24 pages). Ci-après, une sélection des bonnes pratiques parmi les plus prioritaires :

  1. Dispenser et préparer la vincristine et les autres alcaloïdes de la pervenche (vinblastine, vinorelbine) dans un "minibag" (minipoche de perfusion de 25 ml chez l’enfant ou 50 ml chez l’adulte) d'une solution compatible (NaCl 0,9 % ou G5 %) et non dans une seringue. Ces volumes étant trop importants pour être administrés par voie intrathécale, la perfusion dans une poche de petit volume permet d’éviter ce risque d’erreur souvent fatale (130 décès recensés dans le monde selon ISMP). L’étiquetage doit porter la mention "Voie intraveineuse uniquement ! Mortel en cas d'administration par d'autres voies !"

En cas de sélection d’une présentation pharmaceutique de vincristine et autres alcaloïdes de pervenche, notamment via la lecture du code-barres présent sur le flacon, une alerte soit automatiquement générée pour attirer l’attention de l’infirmière (SAM)

  1. Utiliser un schéma posologique hebdomadaire par défaut pour le méthotrexate oral dans les systèmes électroniques lorsque les prescriptions de médicaments sont saisies. Exiger la vérification d'une indication oncologique appropriée* pour toute administration quotidienne de méthotrexate oral (SAM).

(*) D’où l’importance ici de l’obligation faite au médecin de tracer l’indication thérapeutique validée par l’AMM qui motive sont choix (Proposition n°2).

  1. Veiller à ce que tous les médicaments sous forme liquide orale qui ne sont pas disponibles dans le commerce sous forme de doses unitaires prêtes à l’emploi, soient délivrés par la pharmacie dans une seringue orale ou entérale conforme à la norme 80369 de l'Organisation internationale de normalisation (ISO), telle que ENFit. Ce type de norme garantie qu’un produit de nutrition entérale ne sera pas administré accidentellement par voie intraveineuse. Les erreurs de connexion sont rares mais peuvent présenter une menace vitale pour les patients. Les erreurs de connexion entre le système entéral et la voie intraveineuse (IV) forment un risque réel pour la sécurité du patient. Les petits raccords ont été conçus selon cette norme pour rendre impossible toute connexion à une voie intraveineuse.
  1. Séparer, séquestrer et différencier tous les agents bloquants neuromusculaires (NMB, ex. : curares) des autres médicaments, où qu'ils soient stockés dans l'organisation. Etiqueter : "Attention : peut provoquer un arrêt respiratoire – Patient ventilé uniquement »
  1. Administrer des perfusions de médicaments à l'aide d'une pompe à perfusion programmable utilisant des systèmes de réduction des erreurs de dose*. Maintenir un taux de conformité supérieur à 95 % pour l'utilisation des systèmes de réduction des erreurs de dosage. Contrôler mensuellement le respect de l'utilisation du logiciel de réduction des erreurs de dosage de la pompe intelligente. Si votre organisation permet l'administration d'un bolus intraveineux (IV) ou d'une dose de charge à partir d'une perfusion médicamenteuse continue, utilisez une pompe intelligente qui permette de programmer le bolus (ou la dose de charge) et le débit de perfusion continue avec des limites distinctes pour chacun d'eux.

Affecter des ressources à la maintenance, à la mise à jour et à l'essai du logiciel et de la bibliothèque de médicaments pour toutes les pompes à perfusion intelligentes.

S'assurer que le contenu de la bibliothèque de médicaments est cohérent avec les informations et la nomenclature des médicaments (par exemple, le nom du médicament, les unités de dosage, le taux de dosage) dans le dossier médical électronique.

Planifier la mise en œuvre de l'interopérabilité bidirectionnelle (c'est-à-dire l'auto-programmation† et l'auto-documentation‡) des pompes à perfusion intelligentes avec le dossier médical électronique.

(*) Le système de réduction des erreurs de dose (SRED) : désigne le logiciel intégré dans les pompes à perfusion intelligentes, destiné à aider à prévenir les erreurs liées à la programmation de la perfusion et à avertir les utilisateurs d'une éventuelle administration excessive ou insuffisante d'un médicament ou d'un liquide en vérifiant les doses ou les débits programmés par rapport à des limites prédéfinies configurables par l'établissement, spécifiques à un médicament, à un liquide et à une application clinique (par exemple : administration épidurale) et/ou à un lieu (par exemple : unité de soins intensifs néonatals, unité médicale/chirurgicale).

(†) Auto-programmation : programmation automatique des paramètres de perfusion à partir du système de dossiers médicaux électroniques vers la pompe à perfusion intelligente (qui sont ensuite vérifiés, et la perfusion est lancée manuellement par le praticien) après l'utilisation du système d'administration de médicaments à code-barres pour associer le patient, le contenant de liquide (par exemple, poche, bouteille, seringue) et le canal de la pompe.

(‡) Auto-documentation (également connue sous le nom d'auto-cartographie ou de documentation de perfusion) : l'envoi d'informations sur la perfusion, telles que les données d'admission, les changements de dose/débit et l'heure d'arrêt de la perfusion, au système de dossier médical électronique pour une confirmation manuelle du clinicien afin de permettre un enregistrement précis de ces informations dans le dossier du patient après la mise en place de la perfusion.

Cette meilleure pratique s'applique à toutes les structures hospitalières, qu'il s'agisse de patients hospitalisés ou non (par exemple : service d'imagerie par résonance magnétique [IRM], service des urgences, cliniques de perfusions ambulatoires), et à toutes les situations dans lesquelles des médicaments sont perfusés par voie IV ou épidurale, y compris l'anesthésie et l'analgésie contrôlées par le patient (ACP). La seule exception concerne les perfusions de vésicants de faible volume (c'est-à-dire les vésicants de chimiothérapie) qui, lorsqu'ils sont administrés par la voie périphérique, ne doivent être perfusés que par gravité et non au moyen d'une pompe à perfusion/seringue.

  1. Veiller à ce que tous les antidotes, agents d'inversion et agents de secours appropriés soient facilement disponibles. Disposer de protocoles standardisés et/ou des séries d'ordonnances couplées permettant l'administration d'urgence de tous les antidotes, agents d'inversion et agents de secours appropriés utilisés dans l'établissement. Disposer d'un mode d'emploi/d'administration facilement accessible dans toutes les zones cliniques où les antidotes, les agents d'inversion et les agents de secours sont utilisés.
  1. Maximiser l'utilisation de la vérification des codes-barres avant administration des médicaments et des vaccins en étendant leur utilisation au-delà des zones de soins réservées aux patients hospitalisés. La mise en œuvre de l'administration des médicaments assistée par la lecture code-barres est une stratégie de prévention des erreurs qui a fait ses preuves (Proposition n°8).

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