Nouveau gouvernement : plutôt qu'un remaniement, Macron tente un élargissement

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Pierre Plottu
Publié le 16 octobre 2018 - 18:01
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Le président Emmanuel Macron
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© ludovic MARIN / POOL/AFP
Avec ce remaniement, Emmanuel Macron cajole le centre et la droite LREM-compatible.
© ludovic MARIN / POOL/AFP
Le remaniement ministériel tant attendu est désormais officiel. Comment faut-il analyser ce grand chambardement (4 départs, 8 arrivées et 7 changements de portefeuille)? Bien plus qu'à un simple remaniement, Emmanuel Macron a procédé à un élargissement de sa majorité présidentielle. Mais surement pas vers la gauche.

Tout ça pour ça. A première vue, le remaniement ministériel officialisé ce mardi 16 -après deux semaines d'attente- ressemble à tout sauf  à un signal politique fort. Ce serait même l'inverse...

Avec quatre départs, huit arrivées et sept changements d'affectation, il s'agit pourtant bien d'un grand chambardement. Mais, surtout, la nomination de cette nouvelle équipe gouvernementale prend tout son sens si l'on se place du point de vue de l'art délicat des équilibres politiques. Plus qu'à un simple remaniement, Emmanuel Macron s'est livré ce mardi à un élargissement: celui de sa majorité.

Il fallait agir, tant l'autorité et l'assise d'Emmanuel Macron se sont érodées. L'affaire Benalla, notamment, et l'absence de résultats probants sont passées par là. La grogne se fait entendre jusque dans les rangs des députés LREM, qui ont si mal élu Richard Ferrand au perchoir mi-septembre (254 voix, alors que De Rugy en avait recueillies 353 l'an passé)... Puis le coup de grâce: la démission fracassante de Gérard Collomb, proche parmi les proches du président, parti en dressant bien haut un doigt d'honneur constitutionnel au chef de l'Etat, achevant de le fragiliser.

Lire- Remaniement: l'épilogue d'un laborieux feuilleton?

Cette majorité qui doute, où certains sont au bord de la fronde, explique également pourquoi Edouard Philippe n'a pas démissionné à l'occasion de ce remaniement comme c'était initialement prévu. Mardi 9, il n'y a encore qu'une semaine, des sources gouvernementales l'assuraient: le Premier ministre allait présenter la démission de son gouvernement pour acter un large remaniement. Dans la foulée, Emmanuel Macron le renommerait et validerait la nouvelle équipe qu'ils avaient préparé ensemble pour donner un "second souffle" au quinquennat. Le tout devant s'achever en apothéose avec un discours de politique générale à l'Assemblée plébiscité par un hémicycle largement dominé par LREM et ses alliés.

Sauf que... Sauf que la belle entente entre Macron et Philippe a connu quelques accrocs, notamment car le Premier ministre aurait tenté d'imposer ses fidèles au président. Le couple exécutif a également renoncé au vote de confiance de peur que la confiance au chef du gouvernement soit mal votée. Tout le monde n'aurait retenu que ça, gâchant la fête.

LREM est pourtant fort d'un groupe de 310 députés, 356 en comptant son allié MoDem et plus encore en comptant la trentaine de députés du groupe UAI (UDI-"Agir, la droite constructive" et indépendants). Soit une majorité bien plus large que celle de François Hollande (331 en 2012) ou même Nicolas Sarkozy (348 en 2007). Mais la cohésion des troupes est menacée.

Sur ce sujet: Mal élu, Richard Ferrand accède au perchoir de l'Assemblée

C'est probablement le principal enseignement de ce remaniement. Sur les huit nouveaux entrants, outre les visages encore inconnus ce mardi matin, le gouvernement accueille le MoDem Marc Fesneau et le député et président d'Agir Franck Riester. Ces deux entrées au gouvernement, qui plus est au rang de ministres (chargé des Relations avec le Parlement pour Fesneau, à la Culture pour Riester), sont ainsi une manière de cajoler les supplétifs de la majorité. Où quand le nouveau monde succombe aux méthodes de l'ancien...

C'est différent pour ce qui concerne Didier Guillaume (Agriculture et Alimentation) et Gabriel Attal (secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse). Tous deux viennent renforcer le contingent des anciens du PS devenus marcheurs, ce qui pourrait être perçu comme un signe en faveur d'un virage à gauche. Pas évident car, tout d'abord, ces "débauchages" n'en sont pas: Guillaume est devenu un paria au PS et Attal, après avoir été siglé du poing et de la rose pendant 10 ans, est député LREM depuis 2017 et fait même figure d'étoile montante de la macronie. Ensuite car tous deux viennent remplacer numériquement Jacques Mézard (Cohésion des territoires) et Stéphane Travert (Agriculture), débarqués ce mardi, eux aussi ex-PS.

Idem pour ce qui est des "promotions" accordées à l'occasion de ce remaniement. Castaner, Denormandie, Schiappa et Mahjoubi ont beau être d'anciens socialistes, ce sont surtout des proches du président. Gourault est pour sa part cadre du MoDem, tandis que Blanquer est la superstar de ce gouvernement (surtout auprès de l'électorat de droite) et enfin Lecornu est un proche du Premier ministre, qui grappille donc un lot de consolation.

A l'arrivée, ceux qui appelaient de leurs voeux un recentrage du gouvernement à l'occasion de ce remaniement en seront pour leur frais. Et s'il faut chercher une -légère- correction de l'équilibre ministériel, il est à chercher du côté de la droite et du centre.

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