Unedic : du paritarisme vers l'étatisation rêvée par Macron, les dangers d'une idée technocratique et coûteuse
Le candidat Emmanuel Macron semblait pondéré. Le président Macron semble survolté et friand de termes qui frôlent parfois l'insulte pure et franche ou la langue des dialogues de Michel Audiard. Contraste troublant. Et regrettable.
Concernant le dossier Unedic, on constate le même mouvement de balancier: au départ, il s'agissait de corriger les excès du paritarisme. Désormais, le mot d'étatisation court dans plus d'une tête des gestionnaires publics de ce dossier. Depuis des années la gestion de l'Unedic est vertement critiquée et on pointe du doigt le déficit de cet organisme. Or, une étude économique précise rapporte sans détour que le déficit de l'Unedic provient d'une part de la prise en compte de 10% du coût de fonctionnement de Pôle Emploi et d'autre part du régime dérogatoire des intermittents du spectacle. Avant d'accuser l'Unedic en tant que telle, il faut prendre le temps de lire et d'effectuer un "fast-fact-checking".
Les négociations qui se sont ouvertes vont, une fois encore, porter sur la qualité intrinsèque de la gestion de l'Unedic dont il ne faut pas oublier que la résultante dépend de la conjoncture économique et ainsi du nombre de chômeurs à indemniser. L'actuelle embellie (prévision de 1,8 % de croissance du PIB pour 2017) est un atout pour l'Etat mais un rocher sérieux se dresse sur le chemin de la négociation. Il s'agit de l'élargissement de l'assurance-chômage aux indépendants, commerçants, ou autres entrepreneurs. Et aux salariés démissionnaires, une fois tous les cinq ans. Cette proposition du candidat Macron est supposée permettre de fluidifier le monde du travail et d'inciter à la prise de risques.
Toutefois, chacun comprend vite que d'aucuns pourraient être tentés par des contournements du nouveau dispositif (s'il voit le jour tel que programmé) ce qui change le chiffrage. Le candidat Macron a soutenu que tout ceci ne coûterait pas davantage que deux milliards d'euros. D'autres experts économiques –même proches du pouvoir– estiment que ces mesures pourraient engendrer un coût total de plus de huit milliards. Autant dire que la promesse présidentielle est une gageure pour les comptes de l'Unedic au moment même où l'Etat veut s'immiscer clairement et virilement dans sa gestion.
Dans une société, il faut savoir aller vers l'Autre: c'est le gage de la paix civile. Dans une entité comme l'Unedic, je ne trouve pas déplacé de voir les représentants du monde patronal travailler, les yeux dans les yeux, avec les représentants des syndicats ouvriers. Nous n'avons pas la cogestion à l'allemande dans les conseils d'administration des grandes entreprises, alors sachons garder cette spécificité française que l'on nomme le paritarisme même si un sérieux toilettage devra concerner les budgets formation et les 32 milliards afférents.
La nationalisation de l'Unedic est une idée technocratique qui ne fera que déplacer le déficit vers l'impôt alors qu'actuellement seule la dette de l'Unedic est garantie par l'Etat au moyen du hors-bilan. Je rappelle que plus de 30 milliards de dettes à l'Unedic, cela représente l'équivalent d'une année de cotisations. L'Etat affiche 2.230 milliards de dettes qui représentent plus de sept années de l'ensemble des recettes fiscales! Il me semble qu'il est toujours délicat de donner des leçons de gestion lorsqu'on présente un si brillant palmarès chiffré.
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