Levothyrox : deux avocats s'attaquent à la forteresse Merck

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Par Hugues JEANNEAUD - Toulouse (AFP)
Publié le 12 janvier 2018 - 14:40
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Christophe Lèguevaques, avocat des patients qui s'attaquent à la compagnie pharmaceutique allemande Merck, productrice de Levothyrox, à Toulouse, le 10 janvier 2018
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© PASCAL PAVANI / AFP
Christophe Lèguevaques, avocat des patients qui s'attaquent à la compagnie pharmaceutique allemande Merck, productrice de Levothyrox, à Toulouse, le 10 janvier 2018
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Deux avocats toulousains sont en pointe dans le combat judiciaire qui oppose des malades de la thyroïde, souffrant d'effets secondaires de la nouvelle formulation du Levothyrox, au laboratoire Merck. Deux hommes avec un parcours et une stratégie radicalement différents.

Le premier, Me Jacques Lévy, 73 ans, est un talentueux pénaliste toulousain, connu notamment pour avoir obtenu l’acquittement de Jacques Viguier dans la mystérieuse affaire de la disparition de sa femme.

"Dans le dossier Levothyrox, notre souci c'est la rapidité, que les malades obtiennent rapidement leur médicament (l'ancienne formule)", explique-t-il. Aussi a-t-il choisi "l'option originale du référé".

Le second, Me Christophe Lèguevaques, est lui aussi né à Toulouse en 1968, a vécu dans la cité populaire d'Empalot et intégré le barreau de Paris après ses études.

"Dans ma famille, il n'y avait pas de bachelier et encore moins de juriste", dit ce fils "d'électricien et d'une femme de ménage".

Christophe Lèguevaques a assigné le groupe allemand à Lyon, où Merck a son siège français, dans le cadre d'une action collective pour "défaut d'information" et "préjudice d'angoisse".

-'Scandale sanitaire'-

Pour Me Lévy, le ténor toulousain, le dossier Levothyrox est un véritable "scandale sanitaire". L'avocat tempête contre "le prétendu effet nocebo" derrière lequel s'abrite Merck: comment les malades peuvent-ils développer un effet d’autosuggestion alors "qu'ils ignoraient qu'on avait changé leur médicament?".

Fils de l'avocat et grand résistant, Maurice Lévy, il se rapproche comme son père du PS et se lance en politique dans les années 1980. Il tente en vain de conquérir la mairie de Toulouse en 89 et 95.

Jacques Lévy obtient l'une des premières décisions d'indemnisation des victimes de l'affaire du sang contaminé.

Lorsque l'une de ses amies, Sophie Chéreau vient le consulter en septembre, il choisit "l'action en référé" pour répondre à la situation d'urgence des patients. Certains vont s'approvisionner à l'étranger où l'ancienne formule est toujours en vente.

-'Actions collectives'-

Après sept années dans un grand cabinet parisien, Christophe Lèguevaques ouvre son propre cabinet à Paris, puis un bureau secondaire, chez lui à Toulouse en 2005. Il entre dans les dossiers des irradiés de Rangueil, AZF, Spanghero...

"Erreur de jeunesse ou outrecuidance", il confesse avoir décidé en 2008 de "devenir maire de Toulouse". Après un "sévère râteau" à la primaire socialiste, il part s'installer à Pondichéry (Inde) pendant 2 ans.

A son retour, il décide de s'attaquer "aux actions collectives". Fustigeant la lourdeur de la loi Hamon sur les "class action à la française", il décide d'ouvrir un cabinet virtuel, MySMARTcab. Il s'agit d'un portail permettant à des personnes de s'agréger à une action "pour le prix d'une paire de chaussures".

Près de 10.000 personnes se sont inscrites depuis dans cette action collective contre Merck pour "défaut d'information" et "préjudice d'angoisse".

De plus, le 26 janvier, devant le TGI de Paris il va demander un référé expertise, pour étudier "les effets indésirables rapportés" par les patients.

De son côté, Me Lévy, estime avoir "atteint (son) objectif" en obtenant le 14 novembre à Toulouse la condamnation des laboratoires Merck. Le juge des référés avait ordonné aux laboratoires de délivrer "sans délai" l'ancienne formule du médicament à 25 patients de Haute-Garonne. Une décision assortie d'une astreinte de 10.000 euros par jour.

Merck a fait appel, de ce jugement. Depuis, les juges de Saint-Gaudens (Haute-Garonne, le 26 décembre) et de Toulouse (le 11 janvier) n'ont pas suivi le premier jugement de Toulouse et ont débouté les malades estimant qu'il n'y avait "plus de défaut d'approvisionnement", précise Me Lévy.

Cependant, l'avocat se prépare à d'autres actions en référé, à Castres puis à Tarbes.

"Fin 2018, Merck a décidé d'arrêter de produire l'ancienne formule. Nous allons faire la preuve que le produit n'est pas disponible", menace Me Levy, signifiant que la guerre de positions contre le laboratoire n'est pas encore finie.

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