Ça y est  : cette fois on a touché le fond  !

Auteur(s)
Xavier Azalbert, France-Soir
Publié le 24 mars 2023 - 13:40
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Ça y est : cette fois on a touché le fond !
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Pour ceux d'entre vous qui l'ignoraient encore, Rima Abdul Malak est l'actuelle ministre de la Culture de la République de France.

C'est désastreux pour l'image du pays, affirment moult observateurs, ceci non pas en référence au regard du manque de respect manifeste qu'elle a envers la grammaire et la syntaxe. Ses « élucubrations » disent ses détracteurs les plus vivaces. (1)

Non. Ce sur quoi il importe de mettre l'index ici, est un problème majeur : une image pédopornographique élevée au rang d'Art par Madame la ministre de la ministre de la Culture !

C'est en tout cas ce qui a été déduit par la majorité des personnes qui ont eu vent de la réponse      que Madame Malak a faite à l'Assemblée nationale, à la question d'une députée, à propos d'un tableau montrant, on ne peut plus explicitement un adulte debout, imposer une fellation à un enfant à genoux devant lui, les mains attachées dans le dos.

Voici le texte intégral de sa réponse, reproduit à l'identique, à savoir avec sa syntaxe, ses pléonasmes et les répétitions via lesquelles elle a voulu faire dans la solennité :

« Ne mélangeons pas tout. Le combat pour la protection de l'enfance et contre toutes les formes de violence, on le mène tous collectivement, aux côtés de ma collègue Charlotte Caubel, tous les jours.

Ce tableau, de quoi s'agit-il ? C'est un tableau d'une artiste Suisse, Myriam Khan, son exposition au palais de Tokyo, artiste de 73 ans, qui depuis 40 ans documente et dénonce les horreurs de la guerre. C'est son intention. Vous êtes allés faire votre coup de com, filmer ce tableau. Mais est-ce que vous avez vu l'ensemble de l'exposition ? Est-ce que vous avez échangé avec les médiateurs ? Est-ce que vous avez lu les explications. Parce qu'on ne peut pas sortir une œuvre de son contexte. L'intention de l'artiste est diamétralement opposée, diamétralement opposée à l'interprétation que vous en faites. Pour elle c'est une dénonciation des crimes de guerre. Voilà ce qu'elle dit. Ce ne sont pas des enfants qui sont représentés. Ce tableau traite de la façon dont la sexualité est utilisée comme arme de guerre, comme crime contre l'humanité. Le contraste entre les deux corps figure la puissance corporelle de l'oppresseur et la fragilité de l'opprimé. La répétition des images de violence dans les guerres vise à dénoncer. Oui ! L'art peut choquer, peut questionner, peut parfois susciter du malaise voire du dégoût. L'Art n'est pas consensuel. Et, heu. La liberté d'expression et de création est garantie par la loi. Vous avez toute liberté d'interpréter l'œuvre comme vous voulez. Ce n'est, ni à une ministre, ni à une parlementaire, en revanche, de qualifier une infraction pénale : c'est le rôle de la justice. C'est le rôle de la justice. »

Mince !

« L'Art n'est pas consensuel. Et, heu. La liberté d'expression et de création est garantie par la loi. Vous avez toute liberté d'interpréter l'œuvre comme vous voulez. »

Si la ministre de la Culture pouvait défendre la liberté d'expression aussi bien qu'elle l'a fait avec cette artiste, que quand il s'agit de France-Soir (et pareil pour tout autre organe de presse),  jugé « complotiste » par son collègue de la justice, le débat public s'en trouverait enrichi. Et surtout le droit à l'information.

Si dixit la ministre de la Culture, il n'entre pas dans ses attributions de demander le retrait immédiat d'un tableau, qui, selon 99,99% au moins des personnes qui le voient, représente indéniablement une image à caractère pédopornographique absolument inadmissible, totalement écœurante, sauf pour un détraqué, un pervers sadique revendiqué et passible de poursuites judiciaires.

Si effectivement, respect de la liberté d'expression oblige, il n'entrerait pas dans les attributions de la ministre de la Culture de demander le retrait d'un tel tableau, il doit encore moins entrer dans les attributions du ministre de la Justice de demander le retrait de l'accréditation d'un organe de presse, au motif que celui-ci tient des propos qui conteste la pertinence... de la version officielle que le Gouvernement donne de la vérité sanitaire ou autre, n'est-ce pas ?

Et comme c'est le ministre de la Justice qui a autorité sur le parquet, le respect de loi dont Madame Malak se targue à demi-mots d'incarner, ce respect exigeait d'elle qu'elle répondît ceci concernant ce tableau, en lieu et place d'en faire l'apologie :

« N'ayant nullement autorité sur le parquet, ce n'est pas à moi, ministre de la Culture, de demander le retrait de ce tableau. C'est le ministre de la Justice qui est seul compétent pour le faire. Dès lors, puisque vous estimez que l'exposition de ce tableau, matérialise le délit de publication d'une image à caractère pédophile, c'est au ministre de la Justice que vous devez vous adresser. Pas à moi. »

Évoquer cette artiste quasi-inconnue, ce travail discutable, pourquoi pas ? Mais attention. Cela reste de l'art. C'est comme ça. Fin de la discussion. Ah bon ?

Et ce n'est pas un hasard, mais bien délibérément que Madame Malak parle de justice. Elle sait que le terrain est impraticable pour ses détracteurs. Que c'est une polémique d'avance stérile.

En revanche, rien ne nous empêche de se poser la question de ce qui touche le plus à notre culture essentielle, de ce qui menace le plus les enfants au quotidien, désormais à une échelle inégalée auparavant.

On peut par exemple s'interroger sur le fait que les Big Tech dont Google-Alphabet en premier lieu utilisent à foison pour censurer les propos qu'ils jugent complotistes, ont laissé, et laissent encore, depuis des années, des contenus plus que douteux sur des plateformes à l'accès totalement public, YouTube en tête.

Faisant cela, ils mettent gravement en danger les enfants, et ils exploitent leur image d'une façon entièrement inappropriée et scandaleuse. Ceux-ci sont seuls devant les écrans, laissés à eux-mêmes dans la production de vidéos à caractères pédophiles. Et là, ce n'est pas juste une toile insoutenable dans un musée. Là, c'est partout, tout le temps et sur un temps très long.

Et pareil pour Twitter qui, avant l'arrivée de Elon Musk, avait un sérieux problème avec la légalité sur le sujet, vu les contenus que la plate-forme laissait diffuser.

Bref, il y a le symbole, d'accord, mais il y a aussi les tendances de fond. Or, elles, peu de personnes les abordent. Peu de personnes se posent la question de savoir pourquoi tel algorithme de Google laisse telle vidéo émerger, verse clairement dans l'influence. Pourquoi la plate-forme a mis un temps infini pour censurer des commentaires de vidéos qui montraient clairement des enfants en danger. Pourquoi Twitter, dixit Elon Musk lui-même, n'a « rien fait » contre « une certaine criminalité. »

C'est vrai : c'est dommage.

Voilà. Mais avant de vous quitter, j'ai cette dernière remarque à faire, Madame Malak.

Cette remarque émane d'un éminent constitutionnaliste, et elle concerne cette partie-ci, précisément, de son intervention d'avant-hier :

« Ce n'est pas à une parlementaire, de qualifier une infraction pénale : c'est le rôle de la justice. »

Il s'inscrit en faux contre cette affirmation, et au soutien de cela, il verse l'argument suivant.

« Qualifier » une infraction, c'est déterminer expressément, par un texte normatif, l'élément matériel de cette infraction, à savoir les faits qui, s'ils sont commis, doivent être obligatoirement considérés  par la justice comme matérialisant cette infraction.

« Obligatoirement », c'est parce que principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs oblige.

En effet, ce principe édicte que déterminer quels sont les faits qui matérialisent une infraction,    cela relève de la compétence exclusive, selon les cas, soit du pouvoir exécutif, soit du pouvoir législatif, et qu'appliquer le texte normatif qui en procède, cela relève ensuite de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire (qu'on appelle en France « l'autorité judiciaire de la nation »).

Et voici, Madame la ministre de la Culture, ce que disent les articles 25, 34 et 35 de la Constitution, s'agissant de qui a compétence pour la détermination des crimes et des délits ou des contraventions, texte normatif suprême dont vous ne pouvez pas décemment soutenir être ignorante ni ignare :

  • article 25 : « Le Parlement vote la loi. »
  • article 34 : «La loi fixe les règles concernant  la détermination des crimes et délits. » (1)
  • article 35 : « Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère           réglementaire. »

Ainsi, sauf évidemment si pour vous, la publication d'une image manifestement à caractère pédopornographique constitue, non pas un délit ou un crime (article 34 de la Constitution), mais juste une contravention dont dès lors la qualification étant du domaine réglementaire (article 35), serait de la compétence exclusive du Gouvernement. Hormis cette occurrence moralement attaquable, ne vous en déplaise, Madame la ministre de la Culture, c'est bel et bien le rôle du Parlement (article 25) et donc le rôle de tout parlementaire de qualifier cette infraction pénale, ce délit pénal qu'est la publication d'images à caractère pédopornographique.

Et c'est d'ailleurs ce que le Parlement a fait. Le Parlement a adopté une loi qui a doté le code pénal d'un article 227-23, aux alinéas 1er, 2 et 3 ainsi rédigés :

« Le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d'enregistrer ou de transmettre l'image ou la représentation d'un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Lorsque l'image ou la représentation concerne un mineur de quinze ans, ces faits sont punis même s'ils n'ont pas été commis en vue de la diffusion de cette image ou représentation.

Le fait d'offrir, de rendre disponible ou de diffuser une telle image ou représentation, par quelque moyen que ce soit, de l'importer ou de l'exporter, de la faire importer ou de la faire exporter, est puni des mêmes peines. »

Et voyez-vous, je suis de son avis.

Oui. Selon moi et très certainement aussi 99,99 % au moins des Français, l'exposition de ce tableau que vous, Madame la ministre de la Culture, vous estimez ne pas consister en une image à caractère pédopornographique. L'exposition de ce tableau matérialise pleinement le délit qui est défini et puni par l'article 227-23 du code pénal.

 

(1) « ainsi que les peines qui leur sont applicables. »

 

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