Charles Maurras effacé du livre des commémorations nationales

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Par AFP - Paris
Publié le 28 janvier 2018 - 11:33
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La ministre de la Culture Françoise Nyssen à Paris le 23 janvier 2018
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© Eric FEFERBERG / AFP/Archives
La ministre de la Culture Françoise Nyssen à Paris le 23 janvier 2018
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La ministre de la Culture Françoise Nyssen a coupé court dimanche à une polémique naissante sur l'écrivain d'extrême droite Charles Maurras, retiré du Livre des commémorations nationales 2018 après des protestations d'associations antiracistes.

Pour "lever l'ambiguïté" sur "des malentendus qui sont de nature à diviser la société française", la ministre a demandé le rappel du Livre des commémorations nationales 2018 et sa réimpression "après retrait de la référence à Maurras", indique-t-elle dans un communiqué.

Le "Monsieur antiracisme" du gouvernement, Frédéric Potier, avait demandé samedi le retrait de Charles Maurras de ce recueil, rejoint par SOS Racisme et la Ligue internationale de lutte contre le racisme et l'antisémitisme (Licra).

"Commémorer c'est rendre hommage. Maurras, auteur antisémite d'extrême droite, n'a pas sa place dans les commémorations nationales 2018", écrivait le Délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l'antisémitisme.

Une polémique semblable en 2011 sur un autre écrivain antisémite, Céline, avait amené le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand à retirer du même livre l'auteur de "Voyage au bout de la nuit".

Mme Nyssen a dit vouloir recevoir "très prochainement" les membres du Haut-comité qui a rédigé le recueil "afin de questionner, ensemble, la pertinence de cette démarche mémorielle conduite au nom de l'État par des experts".

Présidé par l'Académicienne Danièle Sallenave, ce comité est composé entre autres des historiens Pascal Ory, Jean-Noël Jeanneney et Claude Gauvard.

"Le travail et l'expertise des membres du Haut-comité ne sont évidemment pas en cause", selon la ministre.

- Terme 'équivoque' -

Mme Sallenave a salué cette prise de position, appelant à "lever l'ambiguïté" autour du Livre des commémorations nationales.

Ce volume de plus de 300 pages, publié par les Éditions du patrimoine (Centre des monuments nationaux), est un catalogue de dates marquantes de l'histoire de France dont l'année est l'occasion de se souvenir, vendu 10 euros. Le 150e anniversaire de Maurras faisait partie de la liste.

"Il est évident qu'il y a une équivoque quant au terme de commémoration. À mon avis, il est important que nous menions une vraie réflexion sur le mot, sur son usage. Peut-être commémorer a-t-il pris un sens positif", a déclaré l'auteure à l'AFP.

Dans le dictionnaire Larousse, "commémorer" est défini comme "célébrer par une cérémonie le souvenir d'un événement important".

"Charles Maurras est quelqu'un dont je condamne absolument le développement des engagements (...) Il est hors de question que tout cela puisse contribuer à une quelconque forme de réhabilitation", a souligné l'essayiste.

Maurras (1868-1952), royaliste et antiparlementariste, a laissé une empreinte importante sur l'histoire politique et littéraire de la IIIe République. Il a, entre autres, nourri les lectures de Charles de Gaulle.

Son soutien au régime de Vichy a valu à ce polémiste une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité et à la dégradation nationale.

L'Académie française, où il avait été élu en 1938, le qualifie d'"inspirateur de la politique de collaboration" avec l'occupant nazi.

Beaucoup moins lu depuis 1945, l'ancien directeur du journal monarchiste Action française reste un incontournable de l'histoire des idées politiques en France.

La collection "Bouquins" (Robert Laffont) doit sortir en avril un volume rassemblant ses oeuvres principales et des écrits jamais réédités, dont ses diatribes antisémites dans la presse collaborationniste.

"Ceux qui hurlent contre la commémoration Maurras, vous demandez-vous pourquoi Proust, Walter Benjamin, Daniel Cordier, Bergson, Apollinaire, Althusser, Lacan, Colette, Claude Roy, Clavel, Malraux, Gide, Messmer ou Blanchot admirèrent Maurras?", a lancé sur Twitter le journaliste du Figaro Magazine Jean-Christophe Buisson, qui préfacera ce volume.

Début janvier, les éditions Gallimard avaient renoncé à la réédition des pamphlets antisémites de Céline, qui avait suscité une forte réticence.

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