Un ministre l'assure : seulement "50 personnes" dorment dans la rue en Île-de-France
"D'ici à la fin de l'année (...) plus personne" ne dormira dans la rue, a promis l'été dernier Emmanuel Macron. Une promesse non tenue, a concédé ce mardi 30 sur France inter Julien Denormandie, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Cohésion des territoires. Pour autant, à l'en croire, "une cinquantaine d'hommes isolés" seulement dorment dans la rue "en Ile-de-France" à ce stade grâce aux efforts du gouvernement. Un chiffre à prendre avec des pincettes.
Ce mardi matin, Julien Denormandie a ainsi vanté l'action du gouvernement, mettant en avant les 13.000 places d'hébergement d'urgence ouvertes en 2017 (à écouter en cliquant ICI, à partir de 6 minutes). Un "effort sans précédent" qui "permet au moment où on se parle à toute femme, toute famille qui appelle le 115 de se voir proposer une solution adaptée, ça fait très longtemps que ce n'était pas arrivé", selon lui. Une affirmation en soi sujette à caution.
"Les chiffres de 2017 ne sont pas encore disponibles mais, en 2016, un total de 5.000 femmes ont appelé le 115 avec une solution à la clé pour 25% d'entre elles" seulement nous explique ainsi un porte-parole de la mairie de Paris. Le nombre de réponses positives du 115 aurait-il dans ce cas explosé? Oui, confirment plusieurs professionnels de terrain qui constatent la mise en œuvre de moyens importants par les pouvoirs publics à Paris, essentiellement pour répondre à la forte hausse concernant spécifiquement les femmes isolées et les familles.
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"Il faut saluer cet effort", abonde Eric Pliez directeur général de l'Association Aurore et président du Samu social de Paris. Pour autant, "si on a aujourd'hui et depuis quelques semaines zéro demandes en soirée non pourvues de ce type au 115 de Paris, ce n'est qu'une facette du sujet". Les demandes en journées, nombreuses, mais aussi les personnes qui n'appellent plus le 115 ou qui n'arrivent pas à le joindre sont ainsi exclues de cette statistique, développe Eric Pliez.
Idem en ce qui concerne la globalité des demandes d'un public majoritairement masculin. La "cinquantaine d'hommes isolés" qui seraient les seuls à dormir dans la rue la nuit en Ile-de-France serait ainsi un biais statistique dû au système de comptage. Ce chiffre correspondrait ainsi aux seules "personnes qui ont appelé le 115, on été +décrochées+ mais sans se voir proposer de solution", tempère ainsi la Fondation Abbé Pierre. L'ordre d'idée avancé par Julien Denormandie ne tient donc pas la route. "Baladez-vous Quai de Valmy et vous verrez que c'est irréaliste", réagit ainsi un professionnel.
Pour le seul 10e arrondissement, une expérimentation de décomptage a été menée la semaine dernière, en vue de la Nuit de la Solidarité qu'organise le 15 février la mairie de Paris. L'objectif est de combler le manque de chiffres fiables sur l'ampleur du phénomène, sur le modèle de ce qui se fait dans de nombreux autres pays, afin de déterminer les moyens nécessaires pour adapter l'offre d'hébergement. Résultat de ce test: 450 personnes dormant dans la rue ont été recensées pour le seul 10e arrondissement de la capitale.
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Lutter contre la grande détresse sociale, celle qui mène à la rue "c'est un problème de fond qui nécessite un travail à long terme, ce qu'a aussi rappelé Julien Denormandie", ajoute Eric Pliez. Puis de conclure: "C'est une bonne chose de mettre des moyens, de mobiliser. Mais il ne faut pas oublier que cette problématique perdure après l'hiver".
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