La Suisse envisage des peines de prison pour ceux qui montent leur chauffage à plus de 19 degrés

Auteur(s)
FranceSoir
Publié le 18 septembre 2022 - 17:30
Image
La Suisse pourrait infliger des peines de prison pour non respect des consignes énergétiques
Crédits
Ina FASSBENDER / AFP
Les bâtiments chauffés en gaz ne pourront pas dépasser 19°, selon le rapport officiel relevé par le Daily Mail, publié le 7 septembre.
Ina FASSBENDER / AFP

Dans un contexte de guerre en Ukraine, les pays occidentaux ont multiplié les sanctions économiques contre la Russie. Aujourd’hui, ces sanctions semblent nous revenir comme un boomerang puisque la Russie menace à son tour de couper l'approvisionnement en gaz de l'Europe. Comme de nombreux pays, la Suisse est également menacée de pénuries de gaz, mais également d'électricité. 

Pour se préparer à passer un hiver difficile, certains pays envisagent des mesures de restriction énergétique et même des mesures punitives… C'est le cas de la Suisse qui réfléchit à punir les citoyens récalcitrants qui oseraient braver les consignes gouvernementales en ne respectant pas les limitations de température de leur habitat en cas de pénurie d'énergie. 

Des mesures inédites qui, selon les informations du Daily Mail publiées le 7 septembre, pourraient conduire à des mouvements de contestations dans le pays. 

Surveiller…

Le 31 août avait lieu la deuxième conférence du Conseil fédéral consacrée à l’approvisionnement de la Suisse en gaz. Pour venir rendre compte de la situation et décliner un certain nombre de propositions, les plus hautes autorités de la Confédération helvétique sont intervenues. Le président de la Confédération suisse, Guy Parmelin, a présenté les grandes lignes du projet tandis que Bastian Schwark, chef du département de l'énergie et de l'approvisionnement, est intervenu pour apporter certaines précisions, notamment sur la question des quotas.

Quelles sont ces mesures envisagées et comment le gouvernement entend-il les mettre en œuvre ?

En pratique, les deux principaux intervenants de cette conférence ont commencé à décliner tout un arsenal de mesures visant à limiter les dépenses énergétiques. En effet, les autorités ont prévu « des interdictions de chauffage dans les parties de bâtiments inutilisés ou les piscines, ainsi que des interdictions d’utilisation de radiateurs, de cheminées à des fins décoratives ou de nettoyeur à haute pression ».

Des restrictions qui ne s’arrêtent pas là puisque des limitations pourraient s’appliquer aux bâtiments publics, aux bureaux et en cas d’urgence aux particuliers même si les autorités assurent que les interdictions concernant les ménages privés seront envisagées en dernier recours.

Dans le détail, si la situation devenait critique et exigeait que des mesures restrictives soient mises en place, les lieux équipés au gaz ne devraient pas avoir une température de l’air qui dépasse les 19 degrés tandis que la température de l’eau des chaudières à gaz serait limitée à 60 degrés. Et, à l’exception des hôpitaux, des maternités, des cabinets médicaux et des maisons de retraite et de soin, personne ne pourrait échapper à ces règles édictées par la Confédération helvétique qui pourrait faire appel au Conseil fédéral en cas de non-respect de ces consignes. Cependant, les autorités espèrent n'avoir jamais à appliquer ces quotas. 

Avant la mise en place de ces mesures, les autorités veilleront à ce que tous les acteurs concernés soient informés de toutes les modalités à temps, à savoir des droits, des devoirs et des obligations qui incombent à chacun en cas de pénurie.

... et punir

Que risqueront les Suisses s'ils se chauffent à 20 degrés au lieu de 19 dans un contexte de restriction énergétique ? 

Durant la saison froide, si le gaz venait à manquer, ceux qui enfreignent les directives gouvernementales encourent des peines pécuniaires, mais également des peines de prison.

Dans son communiqué du 31 août 2022, le Conseil fédéral a fait directement référence à l'article 49 du texte législatif pour annoncer les peines encourues par les citoyens qui viendraient à enfreindre intentionnellement les prescriptions sur les mesures d'approvisionnement de l'énergie. 

Ces mesures, décidées par le Conseil fédéral n'ont pas fait pas l'objet d'une votation. Elles sont imposées à tous les citoyens suisses et les cantons seront chargés de les faire appliquer. 

La loi prévoit différentes peines selon la gravité de l'infraction.

« En cas d'infraction délibérée des directives, une peine pouvant aller jusqu'à trois ans de prison pourrait être prononcée. Même en cas d'infraction par négligence aux mesures, une peine pécuniaire pouvant aller jusqu'à 180 jours-amende est possible ». 

En Suisse, on ne plaisante pas avec la loi. Le fait n'est pas nouveau, mais le porte-parole du département de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR), Markus Spörndli est là pour le rappeler : 

 « Les infractions à la loi sur l'approvisionnement du pays sont toujours des délits, voire ponctuellement des crimes, et doivent être poursuivies d'office par les cantons. »  

Les peines pécuniaires prévues peuvent être très lourdes lorsqu'on sait que l'amende quotidienne varie de 30 à 3 000 francs suisses. Toutefois, Markus Spörndli précise que « le nombre de jour-amende est déterminé en fonction de la faute » et ajoute que « le montant du jour-amende est évalué au regard de la situation personnelle et économique de l'auteur ».

Se voulant plus rassurant, le président de la Confédération suisse Guy Parmelin a déclaré :  « Nous ne sommes pas un État policier ».  Et de préciser : « La police ne passe pas chez tout le monde – mais il peut y avoir des contrôles ponctuels ». 

La situation à venir inquiète le directeur général de la police Fredy Fässler. Ce dernier met en garde le gouvernement contre les désordres qui pourraient subvenir en cas de coupure du réseau. Pour éviter des situations de tension extrême et « une rébéllion de la population », il conseille au gouvernement de « n’ordonner que des mesures qui peuvent être mises en œuvre et, surtout, contrôlées ». Privilégiant le dialogue, il a également suggéré de choisir les amendes administratives plutôt que les procédures pénales coûteuses lorsque cela est possible.

De leurs côtés, les cantons inquiets de l'aspect sécuritaire, exigent d'être préparés afin de pouvoir appréhender au mieux ces situations extrêmes et inédites. 

Le 7 septembre 2022, des révélations explosives du Canard enchaîné faisaient état d'un projet du gouvernement français analogue à celui de la Suisse. Selon le journal, au cours du Conseil de défense consacré à la question énergétique du 2 septembre, le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, aurait envisagé de créer une « police des températures » pour s'assurer que les entreprises respectent la température maximale de 19°. Devant le tollé provoqué par cette information, le gouvernement qui n'a pas pour autant démenti, a cependant assuré qu'il n'entendait pas mettre cette mesure en œuvre. 

Voir aussi : Sobriété énergétique : bientôt une police des températures ?  

À LIRE AUSSI

Image
Olivier Véran voiture
Les ministres et la "sobriété énergétique" : le moteur est en marche
L'adage est bien connu : "Faites ce que je dis, pas ce que je fais". Le plan de sobriété énergétique que le gouvernement appelle de ses vœux en est une belle illustrat...
01 août 2022 - 16:00
Politique
Image
Conseil de défense
Un nouveau Conseil de défense pour l'énergie : encore un passage en force ?
"Le président de la République va tenir un Conseil de défense vendredi matin. Il sera consacré à l'approvisionnement en gaz et en électricité, au vu de l'augmentation ...
31 août 2022 - 18:20
Politique
Image
Macron 14 juillet itw
“La guerre va durer“ : Macron prépare les Français à des contraintes de “sobriété énergétique“
Pour la deuxième fois depuis son élection, le chef de l'État a donné un entretien télévisé le 14 juillet à TF1 et France 2, après avoir assisté au défilé militaire sur...
14 juillet 2022 - 21:15
Politique

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.