Victoire de Javier Milei à la présidentielle argentine : le pays s'engage dans une ère politique inédite

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Trina Banderas, France-Soir
Publié le 20 novembre 2023 - 15:30
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Victoire Milei Argentine
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Luis Robayo / AFP
Javier Milei célèbre sa victoire en compagnie de ses supporters à son QG de campagne
Luis Robayo / AFP

MONDE - En moins de trois ans, Javier Milei sera passé du petit écran à la Casa Rosada, siège du pouvoir exécutif argentin. Vainqueur des élections présidentielles dimanche 19 novembre, le candidat ultra-libéral prendra les rênes de la troisième économie d'Amérique latine à partir du 10 décembre. Cela marque le début d'une expérience politique et économique sans précédent.

L'Argentine a été le théâtre dimanche 19 novembre d'élections cruciales, marquées par la victoire du candidat ultra-libéral Javier Milei sur son rival péroniste Sergio Massa, qui a rapidement reconnu sa défaite. Contrairement aux prévisions serrées des sondages, Milei a remporté une victoire éclatante, avec 55,69 % des voix contre 44,30 % pour Massa (sur 99,26% des votes dépouillés).

À 2 heures du matin, heure française, le nouveau président élu de l'Argentine s'est adressé à une foule de partisans euphoriques. Dans un discours étonnamment serein, il a déclaré : "Aujourd'hui marque le début de la reconstruction de l'Argentine, la fin de sa période de décadence."

Économiste, libertaire et "anarchiste de marché"

Javier Milei, économiste diplômé d'universités privées de Buenos Aires, affilié au World Economic Forum se définit comme un "libéral libertaire" et un "anarchiste de marché". Son plaidoyer en faveur d'une réduction de l'État repose sur la limitation des dépenses publiques, des impôts et de l'intervention gouvernementale dans l'économie. À la tête du Parti libertaire d'Argentine, faisant partie de la coalition d'extrême droite La Libertad Avanza, il a triomphé lors des élections du PASO (élections primaires, ouvertes, simultanées et obligatoires).

Avant de faire le saut en politique en 2019, Javier Milei s'est distingué par ses interventions médiatiques en tant que chroniqueur pour des journaux tels que La Nación et El Cronista, ainsi que par son rôle d'animateur de talk-show à la télévision.

Dans ses discours, Milei adopte un langage incisif. Il a même menacé lors d’une conférence publique ses opposants politiques : "Fils de pute de gauche, tremblez". À une autre occasion, il a défendu l'idée de dynamiter la Banque centrale d'Argentine, précisant que ce n'était pas une métaphore : "Quand je parle de brûler la Banque centrale, ce n'est pas une métaphore, je veux la dynamiter, mais c'est littéral", a-t-il affirmé au média El Café Diario.

Entre ambition anarcho-capitaliste et défis économiques

À l'âge de 53 ans, se définissant lui-même comme un "anarcho-capitaliste", Milei a exprimé son ambition de rediriger l'Argentine vers la voie de la prospérité. "Aujourd'hui, nous retrouvons le chemin qui a jadis forgé la grandeur de notre pays, en embrassant à nouveau les principes de liberté", a-t-il déclaré dans son discours inaugural en tant que président élu.

En Argentine, le manque d'accord politique à moyen terme et l'accentuation des tensions entre le parti au pouvoir et l'opposition ont entrainé une instabilité croissante et une détérioration économique. Actuellement, plus de 18 millions d'Argentins, soit 40 % de la population totale, vivent dans la pauvreté, et l'inflation annuelle atteint 143 % sur les 12 derniers mois (jusqu'à fin octobre), selon les chiffres officiels.

Face à ces défis, les Argentins ont confié le pouvoir à un candidat dont la rhétorique anti-establishment suscite des comparaisons avec des figures telles que l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro et l'Américain Donald Trump, qu'il affirme admirer.

Dollarisation et liquidation de la Banque centrale

Dans la première phase de son programme électoral, Milei préconise une réduction drastique des dépenses publiques et une réforme visant à alléger la pression fiscale. Les propositions initiales incluent également la flexibilisation du travail, du commerce et de la finance accompagnée de réformes globales dans les secteurs de la santé, de l'éducation et de la sécurité.

La deuxième phase englobe la réduction des fonds de pension et de retraite, ainsi que la suppression de certains ministères et des programmes sociaux. Après avoir supprimé un total de 11 ministères, l'homme politique a annoncé à plusieurs reprises qu'il n'en conserverait que huit : "Je conserverai le ministère de l'Action sociale, le ministère des Infrastructures, le ministère de l'Economie, le ministère de la Justice, le ministère de la Sécurité, le ministère de la Défense, le ministère des Affaires étrangères et le ministère de l'Intérieur". Milei entend ainsi mettre fin aux "fraudes" dans son pays.

Quant à la troisième et dernière phase du plan, elle implique la "liquidation" de la Banque centrale et la dollarisation de l'Argentine. Le dollar est la monnaie d'épargne des Argentins. Dans ce pays, une maison, une voiture et même des appareils électroménagers sont vendus en dollars, bien que la monnaie officielle soit le peso argentin. Après des décennies de forte inflation, les Argentins se méfient du peso. C'est pourquoi le discours de Javier Milei a résonné fortement. Selon lui, pour mettre fin à l'inflation, il faut retirer aux politiciens le pouvoir de créer excessivement de la monnaie (utilisation de la planche à billets) pour financer le déficit de l'État. Il suggère ainsi de supprimer la Banque centrale, qui produit la monnaie nationale (le peso), et d'opter exclusivement pour le dollar afin de réduire l'inflation.

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