Quand les parachutistes s'emparent des techniques des archéologues

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Par Hervé GAVARD - Montbeton (France) (AFP)
Publié le 18 mai 2018 - 14:18
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Des hommes de la section Fouilles opérationnelles spécialisées (FOS, 12 militaires) du 17e régiment du génie parachutiste dans une forêt du Tarn-et-Garonne, le 16 mai 2018
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© PASCAL PAVANI / AFP
Des hommes de la section Fouilles opérationnelles spécialisées (FOS, 12 militaires) du 17e régiment du génie parachutiste dans une forêt du Tarn-et-Garonne, le 16 mai 2018
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Quatre militaires grattent avec précaution la terre, dans une forêt du Tarn-et-Garonne, et peu à peu apparaît un squelette, le but de leur recherche. Mission réussie pour ces parachutistes de Montauban validant ainsi une collaboration unique avec l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP).

L'exercice de recherche de cadavre s'est déroulé sous l'oeil attentif de Patrice Georges, archéologue à l'INRAP, qui pendant près de deux ans a transmis les techniques propres à l'INRAP aux hommes de la section Fouilles opérationnelles spécialisées (FOS, 12 militaires) du 17e régiment du génie parachutiste.

Techniques qui leur permettent aujourd'hui d'envisager la recherche d'un corps aussi bien sur le territoire national que sur un théâtre d'opérations extérieures, afin de le restituer en vue de son inhumation, ou d'être engagés dans la recherche de charniers.

Les deux années de formation devraient se traduire par une très officielle convention -- en cours de signature -- entre l'armée et l'établissement public, spécialisé dans la recherche et l'étude du patrimoine archéologique lors de travaux d'aménagement du territoire.

La rencontre avec la section FOS et l'INRAP tient du hasard: en 2016, dans le cadre de la disparition d'une jeune femme dans le Tarn, les militaires font l'objet d'une réquisition judiciaire pour aider les gendarmes à tenter de découvrir son cadavre. Patrice Georges, de son côté, est aussi un expert judiciaire.

C'est pour la FOS l'occasion de se rendre compte d'une lacune: "Quand on quittait une zone de fouilles, on ne pouvait pas affirmer qu'on quittait un lieu sans cadavre", explique le lieutenant Michel M., chargé de la section et qui, comme tous les militaires impliqués dans cet exercice, a requis l'anonymat.

"Les techniques qu'on employait --les chiens, le géoradar, le détecteur de métal -- ont des limites", dit-il. Le détecteur car il ne répond qu'au métal, le géoradar car le signal passe mal dans certains sols, argileux ou humides, développe le lieutenant. "Il fallait nous emparer du savoir-faire de l'Inrap", dit-il.

-"Décapage"-

Pour l'archéologue Patrice Georges, "la seule technique infaillible" pour repérer un endroit qui aurait été creusé pour dissimuler un corps, "c'est le décapage et l'observation visuelle du terrain".

"Le décapage, c'est enlever des couches de terre" avec des engins de BTP "pour mettre en évidence des excavations", explique-t-il. "C'est le seul outil cent pour cent efficace", ajoute-t-il, tandis que dans la forêt de Montbeton, le site près de Montauban choisi pour l'exercice, s'avance lentement une pelle mécanique.

Au préalable, la zone a été sécurisée par les militaires. Ils ont découvert une mine fictive, et l'ont dégagée avec des gestes maintes fois répétés. "C'est à ce moment que se mélangent les deux techniques, la militaire et celle de l'INRAP", analyse le lieutenant M.

La pelle se met en branle et déblaye peu à peu une zone suspecte car débarrassée de la foisonnante végétation sylvestre qui pousse alentour.

Couche après couche, la terre apparaît et par endroits, sa couleur et sa texture ne sont pas les mêmes, commente Patrice Georges. "Cela montre qu'il y a eu creusement". Ce que va prouver le pressiomètre qui s'enfonce facilement dans la zone remuée et qui bute sur le squelette enroulé dans un linceul de plastique et de carton.

"Cette technique, se félicite le sergent-chef E, est la seule qui nous permet d'être sûrs à 100% qu'il y a eu creusement et que l'endroit recèle potentiellement un cadavre ou de l'armement".

"On a décliné des outils qui n'étaient pas utilisés par les militaires mais qui font partie de la caisse à outils des archéologues", conclut Patrice Georges.

"Aujourd'hui, on voit que les militaires ont acquis une bonne expérience, un niveau intéressant qui leur permettrait de remplir les missions qu'on leur demanderait", ajoute-t-il.

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