Chronique Covid N°5 – Le confinement généralisé, contre-intuitif, n’était pas une bonne idée

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François Pesty pour FranceSoir
Publié le 07 juillet 2020 - 16:16
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CHRONIQUE : Après avoir découvert que malgré les décisions « moutonnières » de la plupart des chefs d’État occidentaux, il existait une intense controverse scientifique à propos de la pertinence du confinement généralisé, nous allons pouvoir mieux comprendre ses mécanismes d’action et décortiquer ses effets bénéfiques et indésirables, attendus et inattendus.

 

Reprenons la chronologie des principaux événements qui ont mené à la décision de confiner toute la population (ou presque) en France et chez nos voisins :

- 8 février 2020, 5 britanniques contaminés à Contamines-Montjoie en Haute-Savoie par un compatriote de retour de Singapour,

- 15 février, un touriste chinois âgé de 80 ans, hospitalisé en France depuis fin janvier, décède en réanimation, 1er mort hors d’Asie,

- 17 au 24 février 2020, rassemblement religieux de 2000 protestants près de Mulhouse,

- 26 février 2020, 1er décès français d’un patient infecté par le SARS-COV-2, enseignant de 60 ans dans l’Oise, mort à l’Hôpital La Pitié-Salpétrière, Paris, où il avait été transféré,

- 8 mars 2020, Giuseppe Conte annonce le confinement de 17 millions d’italiens dans le nord de l’Italie, et généralise le confinement strict à toute l’Italie le 10 mars,

- 9 mars 2020, les écoles sont fermées dans l’Oise,

- 12 mars 2020, 1ère allocution d’Emmanuel MACRON qui annonce l’isolement des résidents dans les EHPADs, les mesures barrières, le maintien du premier tour des élections municipales, la fermeture des écoles,

- 14 mars 2020, l’Espagne confine, la France ferme ses écoles maternelles, primaires, crèches, collèges, lycées et Universités,

- 16 mars 2020, Emmanuel MACRON annonce une période de confinement d’au-moins 2 semaines à partir du mardi 17 mars midi,

- 18 mars 2020, la Belgique confine, suivie par l’Allemagne le 22 mars (confinement partiel),

- 24 mars 2020, après une résistance au confinement, puis étant tombé lui-même malade, Boris Johnson finit par ordonner un confinement total le 24 mars,

- 13 avril 2020, Emmanuel MACRON annoncera lui-même le prolongement du confinement jusqu’au lundi 11 mai.

 

Remarque importante : Le 15 mars 2020, soit quelques jours avant le pic de l’épidémie, le nombre de reproduction effectif (nombre de personnes contaminées par une seule personne) avait été estimé en France à 2,8 (Source : Point épidémiologique du 11 juin 2020, Santé Publique France (ici))

L’illustration ci-dessus, montre qu’avec un taux de reproduction (R0) de 3, le « patient 0 » (en rouge) pourra contaminer un total de 40 personnes

Les principes du confinement aveugle et total avaient-ils fait l’objet d’une réflexion murie par l’exécutif et ses conseillers ?

En France, la fermeture des crèches (restées ouvertes uniquement pour les enfants de soignants), des écoles maternelles, élémentaires, des collèges, lycées, universités, a bien souvent conduit au moins un des parents à se mettre en arrêt de travail (l’assurance maladie a été assez généreuse à cet égard alors que d’ordinaire ses agents et praticiens conseils, plus tatillons, font beaucoup de contrôles et chassent les « AT » abusifs…) ou en chômage partiel pour garder les enfants « à la maison ».

Le confinement national a été assorti de :

La fermeture des commerces non alimentaires (sauf pharmacies, bureaux de tabac), des restaurants, bars, des salles de cinéma, de concert, de théâtre, des musées, parcs… Bref, l’arrêt de la « vie normale ».

La réduction des déplacements routiers (grâce au développement du télétravail) et ses limitations par attestation dérogatoire aux « achats de première nécessité ») ou par effondrement du trafic aérien, des nombres de trains, métros, tramways, bus en service…

De fait, le confinement total a créé deux situations différentes ayant chacune leurs propres inconvénients

Il ne faut pas sortir de l’ENA pour comprendre qu’enfermer la population dans ses habitations, puisse réunir, soit uniquement des sujets « naïfs » du virus (aucun des membres du foyer n’est porteur du virus), soit mélanger des porteurs sains (encore appelés « asymptomatiques »), voire même des malades symptomatiques, avec d’autres membres de la famille, qui n’avaient pas jusque-là été en contact avec le virus, dont des vulnérables, personnes âgées, voire très âgées, avec ou sans comorbidités (pathologies, notamment chroniques, de type : insuffisance cardiaque, maladie coronarienne, broncho-pneumopathies chroniques obstructives, asthme, diabète, hypertension, cancers…)

Plus le virus circule vite, et c’était le cas le 17 mars comme nous l’avons souligné, plus un confinement aveugle exacerbera les contaminations et embrasera l’épidémie dans les foyers avec mixité de sujets naïfs et de porteurs du virus (« chevaux de Troie »).

Evidemment les plus démunis seront les plus frappés par cet embrasement épidémique, dans les quartiers défavorisés, là où cohabitent dans un même logement exigu, voire insalubre, les membres d’une famille nombreuse, avec trois ou quatre générations dans un appartement de 10 ou 20 m2… Ce n’est pas la densité de population que les virus apprécie le plus, mais la surpopulation (définie par plus d’une personne par pièce, en excluant la cuisine et la salle de bain).

Dans l’autre cas de figure, les foyers composés de purs naïfs du virus, s’ils respectent scrupuleusement les gestes barrières, pourront rester indemnes de la Covid-19. Mais repousseront aux calendes grecques, et en l’occurrence à la période du déconfinement, leur éventuelle mise en relation avec le virus, une rencontre nécessaire en l’absence de vaccin, pour qu’ils puissent s’immuniser.

 

Bref, le confinement aveugle, favorise l’embrasement épidémique dans les foyers mixtes, et retarde l’acquisition d’une immunité collective des foyers naïfs.

En quelque sorte, notre exécutif à donné huit semaines au virus pour qu’il passe d’un membre à l’autre de la famille dans les foyers mixtes, et huit semaines aux naïfs pour faire baisser leurs défenses immunitaires.

Est-ce bien en se cachant que nous avons appris à lutter contre les pathogènes infectieux ? Si l’humanité a pu traverser toutes les pandémies et même les plus mortifères (peste noire, grippe espagnole, choléra…), c’est bien grâce à « l’immunité de troupeau ».

Il faut noter que dans le même temps, mais c’est une autre histoire dont nous reparlerons, nous n’avons pas été capables d’isoler strictement (en chambre individuelle) les plus fragiles, à savoir nos aînés, notamment dans les Ehpad.

 

Les objectifs du confinement national affichés par l’exécutif

L’hospitalo-centrisme à la française et l’hospitalo-tropisme des Énarques qui nous gouvernent, les ont guidés vers un objectif unique, éviter la submersion des réanimations et autres unités de soins intensifs (USI), avec une stratégie principale, « aplatir la courbe », et une tactique, le confinement total, « sacrifions les confinés pour sauver les réas ». Une stratégie secondaire était de doubler en quelques jours la capacité des réanimations en lits équipés pour la ventilation assistée.

Nous verrons dans les prochaines chroniques ce qu’il en a été réellement…

 

Les avantages éventuels du confinement

- Réduction de l’accidentologie routière et de sa mortalité, grâce aux limitations de déplacements

Effectivement, en prenant les chiffres de la sécurité routière (voir ci-dessous), nous étions à environ 250 décès en janvier et en février 2020, et mars et avril totalisent à peu près 250 décès. Nous pourrions au mieux considérer que 250 à 300 vies pourraient avoir été sauvées indirectement grâce au confinement. Moins de 1% des décès attribués au SARS-COV-2…

- Une baisse de la délinquance liée aux addictions aux drogues, mais en aucun cas de leur consommation, qui elle, a dû augmenter avec une logistique qui s’est adaptée

- Un air moins pollué dans les zones urbaines

Nous avons bien du mal à trouver d’autres avantages

 

Ses inconvénients majeurs

- Le déclenchement d’une crise économique et sociale sans précédent, qui ne fait que commencer et frappera plus fort encore les plus démunis, accroissant les inégalités sociales.

- L’augmentation importante des violences faites aux femmes, probablement une explosion de divorces et des séparations…

- L’augmentation des maltraitances d’enfants,

- Le report de soins « non urgents » avec pertes de chance par exemple dans la chirurgie des cancers (Nos hôpitaux et cliniques ne traitaient plus qu’une seule maladie, la COVID-19…)

- Le renoncement aux soins urgents, notamment hospitaliers, par peur de se faire contaminer (les crises cardiaques avaient presque disparu pendant le confinement)

 

Le confinement, surtout lorsqu’il est mis tardivement en place (c’était le cas de l’Italie, l’Espagne, le Royaume Uni, les USA, mais aussi la France) produit probablement davantage de décès. Mais la France ne s’est pas mise en capacité d’évaluer comparativement les effets du confinement, contrairement à ce qu’elle a investi comme moyen pour tester des médicaments…

En confinant sa population, l’Etat français a transformé 51 millions de Françaises et de Français bien portants en malades et dans le même temps, il n’a pas su protéger les 16 millions de vulnérables.

Il s’agit respectivement des plus graves actes de « surmédicalisation » et de « sous-médicalisation » jamais observés dans notre pays (et hélas dans d’autres).

 

Citons pour terminer cette chronique en prenant un peu de hauteur, ce qu’écrivait le 26 mai John IOANNIDIS, épidémiologiste clinicien américain de fort renom, dans un article intitulé « La totalité des preuves » : « On estime que le chômage prolongé entraînera 75 000 décès supplémentaires dus au désespoir, rien qu'aux États-Unis, au cours de la prochaine décennie. Au niveau mondial, les perturbations [liées aux fermetures] ont porté à plus d'un milliard le nombre de personnes menacées de famine, la suspension des campagnes de vaccination de masse fait peser la menace d'une résurgence des maladies infectieuses qui tuent les enfants, les modèles suggèrent un excès de 1,4 million de décès dus à la tuberculose d'ici 2025, et l'on s'attend à ce que le nombre de décès dus au paludisme double en 2020 par rapport à 2018. J'espère que ces prévisions de modélisation [des épidémiologistes modélisateurs] se révéleront aussi fausses que celles de plusieurs modèles du COVID-19, mais ce n'est peut-être pas le cas. Tous ces impacts sont également importants. Les décideurs politiques doivent prendre en compte les inconvénients des décisions restrictives, et pas seulement leurs avantages ».

 

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