Sexologie : beaucoup de patients, très peu de praticiens
La sexologie, discipline née il y a 35 ans, compte en France trop peu de praticiens pour une demande croissante de consultations, ont regretté les professionnels lors des 9es assises françaises de sexologie et de santé sexuelle actuellement réunies à Reims.
"J'ai une très grosse clientèle, près de 180 patients et j'ai du mal à suivre", explique Olivia Bachet, psychologue de formation et sexologue depuis cinq ans, qui reçoit des patients de 17 à 75 ans dans son cabinet à Reims. "Les gens concernés sont pressés, en crise, ils vont mal et je ne peux les recevoir avant un mois et demi ni les voir très régulièrement. C'est frustrant et cela va à l'encontre de l'harmonie recherchée", ajoute Mme Bachet en marge du congrès qui se tient du 7 au 11 avril.
En France, la principale association professionnelle (AIUS), compte 800 professionnels, 900 en comptant les stagiaires. A Paris, l'association recense seulement 17 professionnels, dans le Nord neuf, et aucun en Gironde.
"Tous les sexologues ne sont pas médecins généralistes, psychiatres ou gynécologues", mais ils doivent faire partie d'une discipline médicale ou para-médicale pour être reconnues par la profession: "kinésithérapeuthes, infirmières, sages-femmes, psychologues...", affirme Marie-Hélène Colson, médecin coordinatrice de ce congrès réunissant 700 personnes autour, cette année, des "Libertés sexuelles". "Nous œuvrons depuis 30 ans pour l'encadrement de la profession et éviter que n'importe qui ne s'installe. C'est une garantie pour les personnes qui rencontrent des problèmes", ajoute-t-elle.
Car si la majorité des sexologues appartiennent d'abord au monde médical ou scientifique avant de suivre une formation complémentaire dans une université de médecine, il est légalement possible d'apposer sa plaque en bas de chez soi, sans aucune qualification dans le domaine de la sexologie. "Je connais un ancien agent immobilier parisien, reconverti en sexologue dans le sud de la France! Et c'est contre ça qu'on lutte", affirme Marie-Hélène Colson.
Pour choisir son professionnel, une seule adresse donc, dit Mme Colson: le site de la Fédération française de sexologie et de santé sexuelle (FF3S), regroupant des associations de professionnels. Selon elle, c'est notamment parce que "la Sécurité sociale ne rembourse pas", qu'on compte en France encore trop peu de sexologues, même si "11 universités de médecine forment à la discipline". Et les consultations, plus longues, poussent à des dépassements d'honoraires: un médecin généraliste ne va pas facturer 23 euros une consultation sexologique qui dure 45 minutes, alors que pendant ce laps de temps il aurait pu voir plusieurs patients "lambda". Par ailleurs, "l'Ordre des Médecins veille et la publicité est interdite", poursuit Marie-Hélène Colson. Ainsi, si un psychologue peut créer son site Internet publicitaire, un médecin ne le peut pas.
Le profil de ces clients de plus en plus nombreux: aussi bien des hommes que des femmes, les premiers principalement pour des problèmes d'érection ou d'éjaculation précoce, tandis que les femmes, même si elles consultent parfois pour des douleurs physiques, viennent d'abord pour des problèmes de désir. "Soit elles n'en ont jamais ressenti, parce qu'elles ont été battues ou à cause de leur éducation, soit le cumul d'un travail à l'extérieur avec les tâches ménagères les épuise. Dans ce cas, c'est la problématique conjugale qui est à questionner", affirme Mme Colson.
En outre, "les motifs de consultation évoluent avec l'arrivée de nouveaux médicaments, car le fait de savoir qu'il y a des solutions dédramatise les situations. Par exemple, en 1998, le Viagra a fait prendre un virage", rappelle-t-elle.
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