Charles Pieri, pomme de discorde entre autonomistes et indépendantistes corses

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Par Maureen COFFLARD - Ajaccio (AFP)
Publié le 08 août 2018 - 16:35
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Charles Pieri lors des Journées nationalistes de Corte le 5 août 2018
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© PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP
Charles Pieri lors des Journées nationalistes de Corte le 5 août 2018
© PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

La personnalité controversée de Charles Pieri, ex-chef présumé du FLNC et secrétaire national de Corsica Libera, constitue une pomme de discorde entre les autonomistes de Gilles Simeoni et les indépendantistes de Jean-Guy Talamoni, même s'il n'y a "pas le feu" dans la maison nationaliste corse.

Dimanche, lors des journées nationalistes à Corte, rendez-vous annuel de Corsica Libera (indépendantiste), Gilles Simeoni, président de l'exécutif corse, a renoncé à débattre parce que Charles Pieri -considéré par les autorités comme l'ex-chef du Front de libération nationale corse (FLNC), ce qu'il réfute- était l'animateur du principal débat.

Charles Pieri, proche de Jean-Guy Talamoni qui a été son avocat, est "à l'évidence un personnage controversé, très aimé voire adulé par les siens et détesté par une partie du nationalisme", analyse le politologue André Fazi. "On le soupçonne d'avoir été au centre des affrontements meurtriers internes entre nationalistes des années 90, et les cicatrices n'ont jamais été totalement refermées", dit-il à l'AFP.

Charles Pieri, a été condamné en 2005 à 10 ans de prison -ramenés à 8 en appel - pour notamment "extorsion de fonds" et "association de malfaiteurs" puis en 2011 à un an de prison pour port d'armes. En 2005, le tribunal avait jugé "qu'il n'avait pas cessé ses activités terroristes" liées au FLNC et évoqué "le climat de peur et de soumission" que M. Pieri faisait régner dans l'île.

Un climat toujours dénoncé aujourd'hui par la rumeur publique.

A cela s'ajoute le procès qui l'attend le 4 septembre pour "injure publique en raison du sexe" et "en raison de l'origine", après la diffusion d'un message publié sur un compte Facebook qui lui était attribué. Celui-ci comparait la veuve du préfet Erignac, assassiné en 1998, aux "femmes françaises ayant eu des relations sexuelles avec des soldats allemands pendant la Seconde guerre mondiale".

- "aucun incendie dans la maison"-

Un message dont Gilles Simeoni avait immédiatement dénoncé "le contenu inacceptable". M. Talamoni avait assuré le lendemain que "quel qu'en soit l'auteur", il n'en partageait "ni la forme ni la teneur" mais en avril, à l'annonce des poursuites judiciaires, Corsica Libera s'était insurgé contre la "répression" vis-à-vis de "son secrétaire national", "visant à porter atteinte à l'homme" et "à travers lui à tous les militants de Corsica Libera".

Pour Thierry Dominici, politologue spécialiste de la Corse à l'université de Bordeaux, Charles Pieri est "le Bertrand Cantat" de la politique corse: "les gens estiment qu'il n'a pas assez payé, ils disent avoir peur, qu'il est partout et contrôle tout, mais ni la police ni la justice ni les médias ne l'ont prouvé".

"S'il y a des affaires Pieri, il faut les sortir, les prouver. Sinon, il est cadre de Corsica Libera, il est logique qu'il soit aux journées de Corte", estime M. Dominici.

En refusant de s'afficher aux côtés de Charles Pieri, "M. Simeoni a voulu envoyer un message à l'opinion nationale plutôt qu'à celle locale corse": Il veut incarner "un nationalisme institutionnel propre sur lui" et "effacer tous les plis qui pourraient déranger un hypothétique dialogue entre l'Etat et la Collectivité", analyse le politologue.

M. Pieri incarne "la mystique de la cagoule" selon l'expression du politologue Xavier Crettiez, ce que ne veut plus voir Gilles Simeoni. Pour M. Talamoni, qui n'a jamais condamné la lutte armée, c'est l'arrêt "unilatéral" de la violence par le FLNC qui a permis les victoires politiques.

Si Charles Pieri a bien été l'un des derniers chefs du FLNC, il a été un "entrepreneur de la violence" mais a aussi "probablement été essentiel dans la décision de cesser cette violence", note M. Dominici et Fazi. Si c'est le cas, "son parti politique lui doit énormément", estime M. Fazi.

Mardi, Corsica Libera a assuré qu'il n'y avait "aucun incendie dans la maison nationaliste", évoquant un "petit +couac+ organisationnel, rien de plus" lors des journées de Corte.

André Fazi estime, lui, que "la cohésion interne est le principal défi de la majorité nationaliste" qui se retrouve sur le rejet de la proposition d'article constitutionnel pour la Corse, jugé insuffisant, et le sentiment d'être maltraité par le gouvernement et Emmanuel Macron.

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