Crimée : le tueur, un "passionné d'armes" animé par la vengeance

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Par Thibaut MARCHAND - Kertch (AFP)
Publié le 18 octobre 2018 - 11:53
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Le président russe Vadimir Poutine, derrière son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, le 17 octobre 2018
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© Pavel Golovkin / POOL/AFP
Le président russe Vadimir Poutine, derrière son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, le 17 octobre 2018
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Des proches du tueur du lycée de Kertch en Crimée, qui a tué 20 personnes avant de se suicider, ont dressé jeudi le portrait d'un jeune homme "passionné d'armes" voulant se venger de ses camarades, Vladimir Poutine préférant de son côté blâmer la "mondialisation".

Selon M. Poutine, cette tragédie est "le résultat de la mondialisation" et des "réseaux sociaux et d'internet", qui ont selon lui permis l'importation en Russie du phénomène des tueries de masse en provenance des Etats-Unis.

"Nous ne créons pas le bon contenu pour les jeunes. Cela mène à des tragédies dans ce genre", a-t-il déclaré jeudi, alors que les autorités russes ont renforcé ces dernières années leur tour de vis sur l'internet.

Ces déclarations interviennent au moment où les enquêteurs russes tentent de comprendre ce qui a poussé Vladislav Rosliakov, 18 ans, à commettre la pire tuerie en milieu scolaire de l'histoire de la Russie, que la presse a qualifiée de "Columbine russe".

Vendredi matin, une cérémonie d'hommage aux victimes et un office religieux sont prévus sur la place centrale de Kertch.

L'attaque a fait également une quarantaine de blessés, dont certains sont toujours dans un "état très grave", selon la ministre russe de la Santé Veronika Skvortsova.

L'ex-petite amie du tueur, interrogée par la chaîne de télévision RT, a expliqué sous couvert d'anonymat que le jeune homme disait "ne plus faire confiance aux gens depuis que des personnes dans sa classe avaient commencé à l'humilier parce qu'il n'était pas comme les autres".

"Vladislav me disait tout le temps qu'il se disputait souvent avec son entourage", a-t-elle dit, affirmant qu'il "ne voulait plus vivre" et entendait se venger des humiliations subies.

Selon elle, Vladislav Rosliakov était passionné de tir et "aimait différents types d'armes".

- "Passion pour les armes" -

Selon le quotidien Kommersant, le jeune homme a "grandi dans une famille assez pauvre" : son père, handicapé, ne vivait pas avec sa mère, qui travaille dans une clinique médicale et serait membre des Témoins de Jéhovah, une organisation considérée comme "extrémiste" et interdite en Russie.

Plusieurs médias ont fait le rapprochement avec la tuerie du lycée de Columbine aux Etats-Unis qui avait fait 13 morts en 1999, alors que des photos du tueur diffusées mercredi sur internet le montrent portant une tenue similaire à celle d'Eric Harris, l'un des deux auteurs de ce massacre.

Selon les enquêteurs, le tueur, qui était armé d'un fusil et avait apporté avec lui deux bombes artisanales, fabriquait chez lui des engins explosifs et s'en vantait auprès de son entourage.

"Dès l'enfance, il a eu une passion pour les armes et le tir. Il y a même eu un incident une fois quand il m'a tiré dans le pied", a raconté à RT l'une de ses voisines.

Une voisine interrogée par l'agence Ria Novosti parle d'un garçon "asocial, qui ne parlait avec personne et n'avait pas d'amis."

Le mobile de cette tuerie est pour le moment inconnu. Selon le dirigeant de la Crimée, Sergueï Aksionov, l'assaillant recevait une bourse d'étude et n'avait jamais fait preuve d'agressivité dans son lycée. Selon lui, il pourrait "ne pas avoir agi seul".

Le corps du jeune homme a été découvert dans la bibliothèque de l'établissement, où il s'est donné la mort. Il avait obtenu légalement un permis de port d'arme en passant avec succès tous les tests psychologiques, d'après une source des services de sécurité citée par l'agence de presse RIA Novosti.

- "Tendance dangereuse" -

Le dernier bilan du massacre fait état de 20 morts, dont neuf mineurs. La majorité des victimes sont des élèves de ce lycée de Kertch, qui accueille des adolescents suivant des cursus techniques.

Des soldats de la Garde nationale ont été déployés dans tous les établissements scolaires de la péninsule ukrainienne de Crimée, annexée par la Russie en 2014, où un deuil de trois jours a été décrété.

Alors que certaines voix se sont élevées en Russie pour appeler à durcir la législation sur le port d'armes, le porte-parole du Kremlin a souligné que des "décisions impulsives" étaient à éviter, et a dit vouloir privilégier "une approche sérieuse et systémique" du problème des tueries dans les écoles.

"Personne ne peut garantir que cela ne se reproduira plus", relève pour sa part le journal Izvestia, soulignant qu'"il n'existe toujours pas en Russie de service de psychologie de qualité en milieu scolaire, ni de système de centres d'aide aux familles en cas de crise ou d'organisme fédéral chargé de la sécurité des établissements scolaires".

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