Être séparés de leurs enfants, un risque pour les demandeurs d'asile aux USA

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Par Javier TOVAR, avec Said BETANZOS à Tijuana - Los Angeles (AFP)
Publié le 02 mai 2018 - 12:16
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Quelque 150 Centre-américains attendent le 30 avril 2018 dans un campement improvisé à Tijuana, au Mexique
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© GUILLERMO ARIAS / AFP
Quelque 150 Centre-américains attendent le 30 avril 2018 dans un campement improvisé à Tijuana, au Mexique
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Pour Yolany Reyes c'est très clair, personne ne la séparera de son fils de trois ans.

"Ce serait comme m'arracher une partie de moi", assure cette femme de 26 ans originaire du Honduras, qui a voyagé avec la caravane des migrants ayant traversé le Mexique en train, bus et à pied pour demander l'asile aux États-Unis.

Un dilemme, car elle sait aussi qu'elle ne peut pas retourner chez elle, où elle dit que son père a été tué pour des motifs politiques.

"On a souffert tant de tragédies", poursuit cette femme, qui ne se sentira en sécurité qu'aux États-Unis, dit-elle.

Les quelque 150 Centre-américains qui restent dans cette "caravane" attendent depuis dimanche dans un campement improvisé à Tijuana, au Mexique, juste en face du poste-frontière où ils veulent faire leur demande d'asile. Quelque 25 d'entre eux sont déjà passés devant un agent de l'immigration.

Ils se voient alors placés en détention pour initier le processus: déterminer s'ils encourent "une menace crédible" dans leur patrie, a expliqué à l'AFP Stephen Yale-Loehr, professeur de droit migratoire à l'Université Cornell.

Si c'est le cas, "on passe à une audience sur les mérites de la demande d’asile devant un juge de l’immigration. Un demandeur n'a théoriquement plus à être maintenu en détention à ce stade, mais de fait il l'est souvent car le gouvernement veut s'assurer qu'il ou elle se présentera à l'audience", poursuit M. Yale-Loehr.

- Décourager l'aventure -

D'après le The New York Times, environ 700 enfants ont été séparés de leurs parents à des postes-frontière depuis octobre 2017, 100 ayant moins de quatre ans.

Les critiques du président Donald Trump - qui a conquis la Maison Blanche sur un programme très anti-immigration - affirment que la séparation des enfants contribue aussi aux efforts pour décourager les sans-papiers de tenter l'aventure.

Ce que nie Tyler Houton, porte-parole du département américain de la sécurité nationale (DHS): "Il n'existe pas de politique de séparation des familles à la frontière dans un but dissuasif".

"Comme le demande la loi, le DHS doit protéger les mineurs qui traversent nos frontières et parfois cela se traduit dans la séparation d'un adulte si nous ne sommes pas certains de la relation parentale ou pensons que l'enfant est en danger", ajoute-t-il.

"C'est l'une des niches que nous aimerions voir le Congrès clore pour reprendre le contrôle de nos frontières", conclut le porte-parole.

Le gouvernement américain a alerté sur une envolée des détentions de sans-papiers à la frontière: 90.033 entre janvier et mars contre 62.525 sur la même période en 2017, et a qualifié la caravane "d'attaque contre la souveraineté de la nation".

"Ils profitent des failles du système", dénonce le vice-président Mike Pence."

"Certains ont un bon dossier, mais pas beaucoup", a assuré Tom Homan, directeur par intérim de l'agence de la police des frontières (ICE) sur Fox News mardi.

James Jones, avocat de l'immigration à Chula Vista, une banlieue de San Diego qui jouxte la frontière, s'est rendu au Mexique pour conseiller gratuitement les membres de la caravane sur le processus d'asile et ses risques.

- Peur du retour -

Si beaucoup ont peur d'être séparés de leurs enfants, "ils craignent encore plus de rentrer chez eux" où ils risquent de se faire tuer.

C'est l'attitude de Johana Magaly. Cette mère de 37 ans préfère se séparer de ses cinq enfants temporairement si cela veut dire entrer aux États-Unis et ne pas retourner au Guatemala, où elle assure, sans donner de détails, qu'un homme la menace de mort.

L'Union américaine des libertés civiques (ACLU) a poursuivi le gouvernement en justice pour sa "politique de séparation des familles", au nom d'une Congolaise qui fuyait la violence de son pays et a été placée dans un centre à 3.200 km de là où avait été envoyée sa fille de 7 ans. Le gouvernement américain a fini par relâcher la mère pour qu'elle puisse retrouver son enfant.

"Il reste beaucoup d'autres familles séparées et nous continuerons à nous battre contre cette horrible pratique", promet l'ACLU.

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