Merkel contestée sur sa politique migratoire en Allemagne et en Europe

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Par Damien STROKA - Berlin (AFP)
Publié le 12 juin 2018 - 19:23
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La chancelière allemande Angela Merkel avec le ministre de l'Intérieur Horst Seehofer à Berlin le 12 juin 2018.
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© Kay Nietfeld / dpa/AFP
La chancelière allemande Angela Merkel avec le ministre de l'Intérieur Horst Seehofer à Berlin le 12 juin 2018.

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Angela Merkel a affronté mardi de fortes turbulences au sein de son gouvernement sur l'accueil des réfugiés, qui risquent de fragiliser encore son projet de système d'asile européen contesté par bien des membres de l'UE.

Le sujet est politiquement très sensible en Allemagne depuis que la chancelière a ouvert en 2015 et en 2016 les frontières à plus d'un million de migrants, et lui vaut régulièrement les critiques de son propre camp, qui l'accuse de laxisme.

Depuis lundi, sa fragile coalition gouvernementale associant son parti chrétien-démocrate (CDU), son allié bavarois très conservateur (CSU) et les sociaux-démocrates (SPD) connait une poussée de fièvre: la chancelière s'oppose à une réforme de son ministre de l'Intérieur Horst Seehofer (CSU) visant à restreindre l'accueil des migrants.

Plutôt que de céder, le ministre, qui n'a cessé depuis plus de deux ans de dénoncer l'arrivée des réfugiés, a reporté sine die la présentation prévue mardi de son plan qui incluait le refoulement à la frontière de tout demandeur d'asile ne disposant pas de papiers. Une mesure que la chancelière considère comme une infraction au droit et aux principes européens.

- Pas de "mauvais compromis" -

En retour, M. Seehofer a annulé sa participation à une réunion sur l'intégration des migrants présidée mercredi par Mme Merkel.

Les deux responsables ont toutefois déclaré lors d'une réunion de députés conservateurs vouloir négocier "dans les prochains jours" pour sortir de l'impasse.

Mais M. Seehofer affirme qu'il n'acceptera pas de "mauvais compromis" sur cette question et cherche des alliés en Europe pour faire monter la pression sur la chancelière.

Il a ainsi eu mardi un entretien téléphonique avec son homologue italien, Matteo Salvini, le dirigeant de La Ligue (extrême droite), qui a mis en évidence "une pleine harmonie de vues" entre les deux hommes sur la sécurité et l'immigration, selon un communiqué du ministère italien de l'Intérieur.

Et M. Seehofer a semblé recevoir le soutien du chancelier autrichien Sebastian Kurz, un conservateur allié à l'extrême droite, qui a assuré lors d'une conférence de presse avec Mme Merkel que l'objectif de l'Autriche était "de stopper le flux de migration illégale vers l'Europe".

"Nous devons décider de qui peut venir en Europe, et non pas les passeurs", a martelé M. Kurz.

- Sommet européen -

Cette dispute publique intervient alors que la chancelière tente de négocier en vue du sommet européen du 29 juin une politique d'asile commune à toute l'UE et un partage du fardeau migratoire.

Mais elle fait face à des vents de plus en plus contraires venus de Pologne, de Hongrie ou de République tchèque. Et désormais aussi d'Italie, où un gouvernement réunissant populistes et extrême droite est depuis peu aux affaires.

Elle a promis dimanche de "jeter toutes (ses) forces" dans la bataille.

L'idée d'un refoulement à la frontière des migrants proposée par M. Seehofer fait craindre à la chancelière un effet domino dans l'Union européenne: que chaque pays fasse porter au voisin la charge de l'accueil des demandeurs d'asile.

"Il m'importe que l'Europe décide ensemble et non d'agir unilatéralement", a-t-elle réaffirmé mardi soir.

Elle paraît toutefois assez isolée sur la question dans son propre camp conservateur, échaudé par l'essor de l'extrême droite qui a obtenu un score historique aux législatives de septembre en capitalisant sur les inquiétudes générées par l'arrivée des migrants.

Membre de la CDU de Mme Merkel, le patron de l'Etat régional de Saxe, Michael Kretschmer, a approuvé mardi les mesures préconisées par le ministre de l'Intérieur. "Bien sûr qu'ils doivent être repoussés à la frontière, c'est pour cela qu'on a une police aux frontières", a-t-il estimé.

"On ne cèdera pas!", a aussi prévenu le secrétaire général de la CSU, Markus Blume.

Le climat général dans l'opinion est en outre exacerbé par un sordide fait divers, le viol et l'assassinat d'une adolescente par un jeune demandeur d'asile irakien débouté mais qui n'avait pas encore été expulsé. Il était arrivé en octobre 2015 lors du pic de l'afflux des demandeurs d'asile dans le pays.

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