Feuilleton des incohérences, épisode 5 : le scandale EDF et les quotas Arenh

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Caroline Porteu, pour FranceSoir
Publié le 26 octobre 2022 - 11:40
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"Pourrions-nous demander très sérieusement à nos gouvernants ainsi qu’à leurs ministres un peu plus de « sobriété » dans les décisions délirantes prises sur les sujets du gaz ou de l’électricité depuis plusieurs années ?"
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TRIBUNE - Dans une des dernières séances devant le Parlement, le sénateur Fabien Gay vient d'expliquer comment nos gouvernants mondialistes et l'Union européenne spoliaient volontairement le peuple français avec des mesures totalement incohérentes et destructrices prises pour EDF lors de la libéralisation du marché de l’énergie. Celle-ci a été rendue obligatoire par l'appartenance de la France à l’Union européenne. Un petit extrait de son discours se trouve ci-dessous.

Jusqu’en 2007, EDF possédait le monopole public du marché de l’électricité en France. Elle produisait, transportait et distribuait l’électricité aux usagers. Pour la France qui bénéficiait d’une source importante d’électricité grâce à son parc nucléaire, cette formule permettait de faire bénéficier aux Français de tarifs très raisonnables. Puis le marché s'est ouvert à la concurrence et la loi Nome a été votée en 2010 avec l'organisation de ce nouveau marché et l'invention des « quotas Arenh » (Accès Régulé à l'Électricité Nucléaire Historique). Ces quotas sont calculés en fonction de la production d’énergie en provenance de nos centrales nucléaires, production moins coûteuse que les autres.

Depuis 2011, du fait des quotas Arenh, EDF est obligé de vendre à ses concurrents alternatifs une part de cette production nucléaire : 100 TWh a 42 euros/MGw. (1 TWh ou 1 terawatt représente 1 Milliard de Kilowatt/heure). 

C’est à peu près un quart de sa production nucléaire totale, lorsque tous les réacteurs fonctionnent, ce qui est loin d’être le cas actuellement. Cette nouvelle réglementation devait permettre aux concurrents directs d'EDF de gagner des parts de marché en concurrençant EDF sur les tarifs réglementés, parts de marché effectivement gagnées la plupart du temps avec des méthodes commerciales que l'on peut qualifier de "discutables". Le tarif réglementé EDF joue un rôle de protection des consommateurs finaux, qu’il s’agisse de particuliers ou de petites entreprises et contribue à la stabilité des prix. Il est fixé par les pouvoirs publics.

En contrepartie, les concurrents d'EDF s’étaient engagés à investir pour produire leur propre électricité dans une période de 15 ans.

Résultat : zéro euro investi.

Donc les contractants ne respectent pas leur contrat, mais personne n’a rien dit. Pire, la CRE (Commission de régulation de l'énergie), dont Emmanuelle Wargon est actuellement présidente, a accepté d’augmenter les prix des tarifs réglementés fixés par l’État pour que les concurrents puissent rester compétitifs par rapport à EDF. C’est-à-dire continuer à faire du profit sur les clients, ces augmentations n'étant pas dues au coût de l'énergie, mais à continuer à faire jouer une concurrence fictive au détriment d'EDF, de ses clients et de ses actionnaires (contribuables français par le biais de l’État). 

Ces contractants ou acteurs alternatifs ne produisent rien et ne font rien à l'exception des factures clients et des encaissements. Chaque année, ils demandent une augmentation des quotas Arenh. On parle d'écrêtement Arenh lorsque la totalité des demandes des fournisseurs alternatifs dépasse le seuil réglementaire disponible de 100 TWh. Si les quotas sont dépassés, les acteurs alternatifs doivent se fournir sur le marché libre qui s'est élevé bien au-dessus de 42€/ par mégawatt heure (MWH).

En 2021, le marché libre s'effondre à 21€/MWH et les concurrents attaquent EDF pour ne pas respecter le prix fixé par l'Arenh à 42€. Des sociétés comme Alpiq, Total énergie, Gazel, font jouer la clause de force majeure.

En 2022, depuis le début de la crise énergétique, les prix du marché libre se sont envolés et ont atteint jusqu’à 430€/KWH. Les concurrents ont demandé une hausse des quotas Arenh et ont obtenu 20TWH de plus en février 2022. Le manque à gagner pour EDF a été de huit milliards d'euros, obligé de racheter ces KW sur le marché libre pour les revendre à 42€, le prix devant être révisé à 49,5€/MWH en 2023, ce qui reste très en dessous des prix actuels du marché libre.

Pour obtenir l'augmentation des quotas de 20 TWH, les concurrents d'EDF ont promis que ces prix seraient totalement répercutés sur leurs clients avec une simple augmentation limitée par un bouclier tarifaire de 4%.

Les promesses n’engageant que ceux qui y croient, certains concurrents augmentent significativement leur prix, jusqu’à 70% pour une société comme Ohm Energie ou rompent les contrats avec leurs clients, comme l’a fait Mind Energie pour ne pas se retrouver limités par le bouclier tarifaire imposé par l’État. Certains acteurs ont même menacé de se retirer du marché, laissant des milliers de clients sur le carreau.

À ce niveau, il est important de comprendre le calcul des quotas Arenh qui est fait sur le nombre de clients, sur les heures creuses, week-end et jours fériés sur les mois de juillet et août. Donc, l’acteur ayant de nombreux clients l’été obtiendra un contrat plus important, même si le client part en septembre.

Si la société a 10 000 clients en août et 5 000 en septembre, son quota sera calculé sur 10 000, même s'il ne lui en reste que la moitié un mois plus tard. Il pourra donc affecter son quota sur les 5 000 clients, ce qui lui suffira sans doute pour les approvisionner sans avoir besoin d’aller chercher d’autres contrats sur le marché libre.

Et s'il lui reste un surplus de quota Arenh, il peut même le revendre sur le marché libre, ce qui peut faire un énorme bénéfice puisque son prix d’achat est de 42€/MWH et que le prix moyen actuel est de 430€.

À titre d’exemple, une société comme Mint Energie a envoyé des courriers à ses clients pour les préparer à une forte augmentation en septembre-octobre 2022 avec une incitation à repartir chez EDF. Ce type de courrier est équivalent à une rupture de contrat non seulement vis-à-vis du client, mais également vis-à-vis de l’État puisqu’il ne respecte en aucune manière le bouclier tarifaire. On peut de plus remarquer dans ces courriers que la plupart de la hausse porte sur l’abonnement, ce qui n’implique pas le « bouclier tarifaire ». Manière peu élégante de contourner les obligations contractuelles envers l’État lui-même.