Orban rejette tout "chantage" devant le Parlement européen

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Par Marine LAOUCHEZ avec le bureau de Vienne - Strasbourg (AFP)
Publié le 11 septembre 2018 - 06:00
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Le Premier ministre Viktor Orban lors d'un débat au Parlement européen à Strasbourg le 26 avril 2017
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© FREDERICK FLORIN / AFP/Archives
Le Premier ministre Viktor Orban lors d'un débat au Parlement européen à Strasbourg le 26 avril 2017
© FREDERICK FLORIN / AFP/Archives

Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, accusé de porter atteinte aux valeurs fondamentales de l'UE, a dénoncé mardi devant le Parlement européen tout "chantage" visant à le faire dévier de sa position intransigeante à l'égard des migrants.

Pour la première fois, le Parlement européen fait usage de son droit de lancer la procédure dite de l'article 7 et demande aux membres de l'UE d'agir pour prévenir d'un "risque de violation graves de ses valeurs" en Hongrie.

La décision, qui sera prise mercredi midi lors d'un vote, a donné lieu à d'âpres affrontements mardi.

Combatif et véhément, Viktor Orban a martelé que son pays ne céderait pas au "chantage".

"Je n'accepterai pas que les forces pro-immigration nous menacent, fassent un chantage et calomnient la Hongrie sur la base de fausses accusations", a lancé le dirigeant ultra conservateur.

Il a ensuite qualifié le débat d'"absurde", lors d'une conférence de presse.

Pour appuyer son propos, son gouvernement a mis en ligne une "fiche d'information" de plus de 100 pages en réponse aux critiques du Parlement.

- 'Valeurs' européennes -

Le rapport de l'eurodéputée Judith Sargentini (Verts) établit une longue liste de "préoccupations" portant sur le bafouement des libertés et valeurs prônées par l'UE dans la presse, au sein des universités, contre les minorités, contre les migrants, mais aussi en matière de corruption et d'indépendance de la justice.

"Laisserez-vous un gouvernement bafouer sans conséquences les valeurs sur lesquelles cette Union s'est construite? Ou ferez-vous en sorte que les valeurs de cette Union soient plus que de simples mots écrits sur un bout de papier", a demandé Mme Sargentini.

Le vote s'annonce serré: outre la simple majorité des voix (376), la résolution doit recueillir au moins les deux tiers des suffrages exprimés.

Un résultat d'autant plus difficile à obtenir que le principal groupe politique, le Parti populaire européen (PPE, droite, 218 eurodéputés), accueille en son sein le Fidesz, le parti de Viktor Orban (12 représentants).

Le PPE, qui regroupe aussi des formations comme la CDU d'Angela Merkel, le parti chrétien-social du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et Les Républicains en France, n'a pas donné de consigne de vote. Le groupe est divisé, a indiqué l'un de ses porte-parole, mardi soir après une réunion. Cependant, le président du PPE, l'Allemand Manfred Weber, a indiqué qu'il voterait en faveur de la procédure.

La procédure de l'article 7 est rarissime: elle a été lancée pour la première fois fin décembre 2017 contre la Pologne, à l'initiative de la Commission.

"Le présent rapport bafoue l'honneur de la Hongrie et du peuple hongrois. Les décisions hongroises sont prises par les électeurs", a rétorqué M. Orban, estimant que son pays était puni pour avoir une vision "différente" sur la "nature chrétienne de l'Europe", le "rôle des nations", la "vocation de la famille" et les "questions migratoires".

- Enjeu politique -

Comme l'a rappelé le numéro deux de la Commission, Frans Timmermans, l'exécutif européen a jusqu'à présent recouru à plusieurs procédures d'infraction pour exprimer son mécontentement à l'égard de Budapest: sur le non-respect de la législation de l'UE en matière d'asile, sur la loi qui rend passible de poursuites pénales l'aide aux migrants, sur le financement des ONG et sur la loi sur l'enseignement supérieur.

"La Commission utilise tous les instruments à sa disposition pour s'attaquer à ces préoccupations de la façon la plus efficace", a souligné M. Timmermans. "La Commission n'hésitera pas à prendre plus de mesures si nécessaire".

Ligne dure anti-immigration, style autoritaire, prises de position anti-UE, Viktor Orban incarne la vague populiste qui déferle en Europe. Fin août, il avait, après une rencontre avec le ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini, désigné le président français Emmanuel Macron comme son ennemi en Europe.

Plusieurs chefs de groupe politique en faveur de la procédure de l'article 7 ont interpellé directement leurs collègues du PPE, formation de droite modérée, pour qu'ils prennent position contre M. Orban.

"S'il vous plaît, arrêtez ce cauchemar", a plaidé Guy Verhofstadt, farouche opposant à la politique du Hongrois.

La question est d'autant plus sensible à huit mois des européennes et alors que le président du groupe PPE, Manfred Weber, a été l'un des premiers à montrer son intérêt pour le poste de futur président de la Commission.

Selon M. Orban, le PPE n'est pas divisé sur la question de la démocratie mais sur celle de la migration. "S'il ne peut décider de son cap, nous échouerons" aux élections européennes.

Au sein des autres groupes, M. Orban peut compter sur le soutien des souverainistes, des eurosceptiques et de l'extrême droite. La gauche, l'extrême gauche, les libéraux et les Verts appuient la résolution.

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