Assurance chômage : le patronat claque la porte de la négociation

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Par Bertille OSSEY-WOISARD - Paris (AFP)
Publié le 28 janvier 2019 - 13:30
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Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, le 10 décembre 2018 à l'Elysée
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© ludovic MARIN / AFP/Archives
Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, le 10 décembre 2018 à l'Elysée
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Haro sur le bonus-malus: les organisations patronales ont suspendu lundi leur participation à la négociation sur l'assurance chômage, fâchées par la "détermination" d'Emmanuel Macron à mettre en place ce dispositif réclamé par les syndicats pour lutter contre la précarité.

Jeudi, lors de sa rencontre avec des citoyens dans la Drôme, le président Macron a réaffirmé sa volonté de réguler les contrats courts par le bonus-malus.

Cette déclaration, en pleine négociation sur l'assurance chômage, a fortement irrité le Medef, la CPME (représentant les PME) et l'U2P (artisans, commerçants, professions libérales). Les trois organisations ont annoncé lundi la suspension de leur participation aux discussions.

"Tous les efforts menés par les négociateurs pour +déprécariser+ les contrats courts ont ainsi été balayés d'un revers de main", a réagi la confédération des petites et moyennes entreprises, trois jours avant une nouvelle séance de négociation.

"Dans ces conditions", le Medef a dit dans un communiqué séparé ne pas être "en situation de poursuivre la négociation sans une clarification préalable du gouvernement sur la suite qui serait donnée à un accord entre partenaires sociaux".

Pour l'U2P, le document de cadrage adressé par le gouvernement aux partenaires sociaux leur demandait "de se positionner sur cette problématique, sans pour autant imposer la solution".

Démarrée en novembre, la négociation doit prendre fin le 20 février après avoir été prolongée de deux séances, syndicats et patronat échouant notamment à se mettre d'accord sur un mécanisme qui réduirait le recours excessif aux contrats courts.

En 20 ans, les CDD de moins d'un mois ont été multipliés par 2,5, une source de précarité et un surcoût de deux milliards d'euros pour l'Unedic qui gère l'assurance chômage.

Le système de bonus-malus consiste à moduler les cotisations chômage de l'employeur en fonction du taux de rupture de contrats de travail. L'idée est de faire varier la cotisation patronale à l'assurance chômage, actuellement de 4,05%, en fonction du taux de rupture de contrats donnant lieu à inscription à Pôle emploi, promesse présidentielle soutenue par les syndicats.

Mais le patronat y est fermement opposé. En novembre, au tout début de la négociation sur l'assurance chômage, Geoffroy Roux de Bézieux, le patron du Medef, avait assuré qu'un tel système allait "détruire des CDD et des emplois intérimaires sans pour autant créer de CDI".

La CPME est contre toute "nouvelle forme de taxation des entreprises qui créent des emplois". Elle estime que ce serait "dévastateur" pour l'économie française.

- "Se contenter du malus" -

Le 23 janvier, à l'occasion d'une séance de négociation, les trois organisations patronales ont présenté une série de propositions alternatives pour réguler les contrats courts.

Y figuraient la suppression des délais de carence, un assouplissement du renouvellement des contrats courts ou encore la priorité à l'embauche des travailleurs précaires. Certaines propositions ont été jugées floues, d'autres provocantes par les syndicats.

Laurent Berger, le numéro un de la CFDT, avait prévenu tôt lundi que "le patronat portera(it) la responsabilité de l'échec" de la négociation sur la réforme de l'assurance chômage s'il persistait à refuser tout mécanisme de +bonus-malus+".

Dans un communiqué, son syndicat a regretté "vivement" cette suspension "unilatérale" qui "sonne comme une fin de non-recevoir à la nécessaire responsabilisation des employeurs sur cette situation que subissent de nombreux salariés".

Philippe Martinez, son homologue de la CGT, est allé dans le même sens sur France Inter: "du bonus, ils (les employeurs) en ont beaucoup, donc si on pouvait se contenter du malus ça irait mieux".

Plus généralement, il a critiqué le cadre "contraint" de cette négociation imposée par le gouvernement, qui réclame des économies "sur le dos des chômeurs". Le gouvernement a imposé aux partenaires sociaux que la nouvelle convention d'assurance chômage permette entre 3 et 3,9 milliards d'euros d'économies en trois ans.

De son côté, Michel Beaugas, le négociateur pour Force ouvrière, a estimé que le patronat prenait "en otage des millions de demandeurs d'emplois sur une position dogmatique". Il est "très inquiet" que le gouvernement reprenne en main le dossier et impose "une baisse des droits drastique aux demandeurs d'emploi indemnisés".

"Suspendre, ce n'est pas arrêter", a relativisé Jean-François Foucard, de la CFE-CGC, pour qui la "responsabilisation des entreprises ne peut passer que par des cotisations".

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